Louis Guédet

Vendredi 2 mars 1917

902ème et 900ème jours de bataille et de bombardement

9h soir  Je suis éreinté. Temps de giboulées de mars, neige fondue, etc… Bombardement la nuit. Conseil de famille au Palais ce matin. Déjeuné au Cercle rue Noël, invité par Charles Heidsieck. Il y avait Charles Demaison, Lelarge, docteur Simon, Robinet, Farré, de Bruignac et moi. Causé d’un tas de choses, affaire Goulden, de Mumm, Langlet, etc…  potinages de Cercles, ce n’est pas cela qui me convertira à cette vie de Cercles !! En rentrant lettre désolée de ma pauvre femme pour Robert qui va bientôt partir au front. J’écris à Labitte pour lui demander conseil. Lettre de Madame Gambart m’annonçant que René Mareschal (fils de Maurice Mareschal, industriel (1898-1967)) va partir au front, il y a 2 mois 1/2 qu’il s’est engagé, cela ne me parait guère possible ! Nous verrons. Travaillé en rentrant à mes dossiers d’appels d’allocations militaires. Causé avec Jacques sur nos départs et absences, et d’Adèle qui est une grosse patraque quia le cafard. Je suis de cet avis, bref je vais demain déclencher mon voyage, après avoir vu Dondaine au sujet du Président et de mes Procureurs Bossu et Osmont de Courtisigny (Charles-Alfred (1861-1930)). Impossible d’avoir de l’essence minérale, j’ai pu arracher à Raïssac 5 litres pour ma pauvre femme. Avec tous mes travaux, ennuis, soucis, embêtements…  je suis absolument assommé de fatigue et d’abrutissement. Quelle vie de misère et puis les forces s’en vont.

10h  Je reprends mes notes pour donner le menu de Guerre du Cercle, rue Noël, en l’an du Seigneur sous les Boches 1917, 2ème du mois de Mars, le Dieu de la Guerre : Bouchées à la Reine, ______, Filet purée de marrons haricots verts, salade chicorée, fromage, mandarines, biscuits de Reims Tarpin (de l’ancienne biscuiterie de Reims Ch. Tarpin), café, liqueurs (Chartreuse, Bénédictine, Cognac), Champagne Charles Heidsieck, etc…

Bref, sans le manque de pétrole, essence minérale de houille, etc…  la vie Rémoise sous les bombes est encore…  supportable, mais malgré tout, ce confortable me froisse quand je songe à ceux qui souffrent, et à ma chère femme qui aurait été si heureuse d’avoir pareil menu, et à mes petits et mes pauvres 2 grands aussi qui vont aller au front !!

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Paul Hess

2 mars 1917 – Hier, à 20 h, certaines de nos pièces du 4e canton ont commencé à tirer, ainsi que chaque soir. La riposte est venue, comme depuis plusieurs jours, où les pièces allemandes avaient l’air de chercher les batteries en action.

Le quartier du haut de l’avenue de Laon a dû être fortement éprouvé ces jours-ci.

Paul Hess dans Reims pendant la guerre de 1914-1918, éd. Anthropos

 Cardinal Luçon

Vendredi 2 – Nuit tranquille sauf quelques coups de canon et mitrailleu­ses. 0°. Temps couvert. Prières à la Cathédrale. N’ai pu faire le Via Crucis parce que accès impossible. Sol jonché de débris des voûtes, enduits et pierres. Visite de M. Schmidt vicaire de Mézières, croix de guerre et fourragère. Visite d’un lieutenant envoyé par Colonel Nieger. Reçu photo­graphies et images. A 4 h. flocons de neige. Visite de M. Heidsieck et de M. Demaison de la visite de Courcelles {supra).

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Vendredi 2 mars

En Champagne, un coup de main effectué par nous sur une tranchée allemande, dans la région de Tahure, nous a permis de ramener des prisonniers. Action d’artillerie assez violente sur le front les Chambrettes-Bezonvaux.
Sur le front belge, violente lutte d’artillerie dans la région de Ramscapelle, Dixmude, Steenstraete, Hetsas. Le chiffre des prisonniers faits par les Anglais s’élève à 2133 pour février, dont 36 officiers.
Les Allemands ont continué à se retirer sur l’Ancre. Nos alliés ont encore progressé au nord de Miraumont de 540 mètres sur un front de 2400 mètres.
Un raid exécuté à la suite d’une émission de gaz, au sud de Souchez, leur a permis de faire un certain nombre de prisonniers. Un de leurs détachements a également pénétré dans les tranchées allemandes, au nord-est de Givenchy et la Bassée et ramené 9 prisonniers. Des détachements ennemis étaient parvenus, à la faveur d’un violent bombardement, à atteindre les positions britanniques vers Ablaincourt et Haucourt. I1s en ont été rejetés par des contre-attaques.
Les Russes ont repris une partie des positions qu’ils avaient perdues sur la chaussée Jacobeni-Kampolung.
L’Associated Press américaine publie un document prouvant que l’Allemagne voulait pousser le Mexique contre les Etats-Unis.

Source : La Grande Guerre au jour le jour

Tahure
Tahure