Louis Guédet

Vendredi 1er février 1918

1239ème et 1237ème jours de bataille et de bombardement

6h soir  Hier soir de 7h à 10h bombardement avec des 105 vers Libergier, pont de Vesle, etc… Bref mauvais moment à passer, les éclats venaient jusqu’ici. Ce matin temps brumeux glacial pénétrant. Courrier assez chargé, j’y ai répondu. Lettre de Dagonet, à qui je réponds, Abbé Andrieux, ancien aumônier des fusiliers marins du régiment n°2, actuellement aumônier sur le « Jean Bart » de la 1ère Division navale, cinglant dans la Mer ionienne… Visite de Houlon qui me fera prendre par la Croix-Rouge quelques uns de mes cartons de dossiers que j’évacue, pour tranquilliser ma chère femme… Il est enchanté de son espoir pour le ruban et moi encore plus que lui, car vraiment j’étais presque honteux du mien auprès de lui, quoique nous ne l’ayons volé ni l’un ni l’autre ! Il m’a invité à déjeuner dimanche, j’ai accepté, car vraiment c’est un bon ami que je me suis fait.

Après-midi visite de mes voisins les anglais de la Croix-Rouge qui sont chez Houbart et cherchent un abri pour leurs bonnes. Je crois avoir trouvé avec eux, au coin de la rue Marlot et de la rue Boulard. Passé rue de Chativesle donner un coup d’œil à ma cave qui est bien gardée. De là passé jusqu’au cimetière du Nord. On couvre de fils barbelés les Promenades. Le cimetière du Nord fort abîmé depuis 3 semaines. Prié sur la tombe de Maurice et sur celle de ma belle-mère (rayé).

Il fait un soleil splendide. Les jours allongent. Je rentre à 5h, j’écris quelques lettres à Mme Schoen qui m’a envoyé un petit « Musset », charmant volume. Je la remercie et je joins à ma lettre un bout de mon ruban rouge en la priant d’en envoyer un fil à son mari exilé à Mulhouse. Ce sera la Goutte de sang du français de champagne au frère d’Alsace.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Paul Hess

1er février 1918 – Certaines marchandises deviennent difficiles à se procurer. En regagnant la mairie, à 14 h, je remarquais une dizaine de person­nes qui stationnaient avec leurs récipients, en attendant l’ouverture du magasin de quincaillerie tenu par A. Betsch, 4, rue Colbert (maison Camus), pour acheter un litre de pétrole chacune — car c’est tout ce qui leur sera délivré.

— Bombardement par rafales, sur le boulevard de Saint-Marceaux, de 17 h 3/4 à 18 h, puis le soir, sur le quartier Fléchambault — une trentaine d’obus — et reprise du bombardement la nuit.

Paul Hess dans Reims pendant la guerre de 1914-1918, éd. Anthropos


Cardinal Luçon

Vendredi 1er – 0°. Temps couvert. Via Crucis in Cathedrali. Vu une belle tête de roi décapité, du transept sud, placée sur un chariot. Canonnade allemande, vers 8 h. à 9 h. 1/2 soir. Reste de la nuit tranquille.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Vendredi 1er février

Lutte d’artillerie assez violente dans la région de Flirey.
Un avion allemand a été abattu par nos pilotes et trois autres sont tombés dans leurs lignes à la suite de combats.
Sur le front de Macédoine, près du lac Doiran, les troupes britanniques ont exécuté avec succès un raid qui leur a permis de ramener des prisonniers.
Actions d’artillerie réciproques dans la région de Monastir.
Un avion ennemi a été abattu dans la région de Doiran.
Sur le front de France et de Flandre, les troupes anglaises ont fait un certain nombre de prisonniers.
Nos alliés ont bombardé un aérodrome au sud de Gand, un important dépôt de munitions à l’est de Roulers et les voies de garage de Courtrai. Des troupes ont été prises sous leur feu. Quatre avions allemands ont été abattus.
Les Italiens ont continué des poussées énergiques au sud d’Asiago et à l’ouest du val Frenzela. Leurs batteries ont tenu sous leur tir les arrières de l’ennemi, battant sans arrêt les passages forcés. Activité d’artillerie dans le val Lagarina et entre l’Adige et l’Astico. Sept avions ennemis ont été abattus.
Les gothas ont accompli sur Paris et sa banlieue un raid qui a duré près de deux heures. Il y a eu trente-sept morts et cent quatre-vingt-dix blessés. Un gotha a été abattu près de Chelles.

Source : La Grande Guerre au jour le jour