Louis Guédet

Au mercredi 8 août 1917 1061ème et 1059ème jours de bataille et de bombardement

6h soir  Je rentre à l’instant de Paris. Le retour d’Épernay à Reims a été mouvementé, nous avions un chauffeur qui ne savait pas conduire, et ce qui fatalement devait arriver s’est produit, il nous jette sur 3/4 tas de cailloux heureusement, c’est ce qui nous a évité d’embrasser trop rudement les arbres de la route, un peu avant d’arriver à Champfleury. Un officier d’état-major de la 5ème Armée, 4 galons, est survenu et je lui ai expliqué le cas. Il a compris que ce malheureux ne savait pas conduire. Aussi ne l’auront nous plus !

Vu à Épernay Creté, Texier, le Procureur très aimable avec lequel j’ai parlé des procès de bicyclettes pour défaut d’autorisation de circuler. Il m’a demandé un rapport, je lui enverrai…

Vu hier soir Herbaux Procureur Général de Paris qui m’a parlé de ma future décoration qui est chose certaine. Il m’a dit que je la méritais bien, qu’elle m’était plus que due et que c’était promis, entendu avec Leroux, le Directeur du Personnel à la Chancellerie. Il m’a même demandé de le prévenir si j’avais jamais vent de la venue de Poincaré ou d’un ministre pour d’autres décorations, qu’aussitôt il verrait le Ministre de la Justice pour faire signer dans les 48 heures le décret de ma promotion. Il a vu dernièrement Vallé le sénateur, ancien ministre de la Justice, et lui en a parlé. Vallé a promis de m’appuyer, approuvant ma nomination, et Herbaux lui-même donné une note pour qu’il n’oublie pas d’en parler à Léon Bourgeois. Nous nous sommes quittés très aimablement, et il a insisté en disant que cela m’était plus que dû, et que je la méritais formellement.

Ici le calme. Je suis fatigué.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Cardinal Luçon

Mercredi 8 – + 14°. Brouillard épais ; nuit tranquille. Visite aux Trois- Fontaines. Matinée tranquille. Visite d’une Mission américaine. Le D. M. Chamberlain, financier. Avec un interprète envoyé par son Gouvernement pour se rendre compte des besoins financiers et économiques de la France. Autorisé à me dire – non pour les journaux – que dans six mois, il y aurait 1 million de soldats américains débarqués ; et 90 000 000 000 de francs (dix milliards de dollars) à notre disposition, sans amortissement du capi­tal, mais seulement de l’intérêt à payer. Ils sont venus avec nous, par huma­nité pour défendre le droit, mais aussi pour acquitter dette de reconnais­sance envers la France(1) (1775). Je lui ai fait répéter devant Mgr Neveux, que j’ai demandé à lui prudence. Je leur ai fait visiter la Cathédrale. Visite du Chanoine – Commandant (de Besançon). Promis d’aller à Saint-Jacques, dimanche 12, pour dire messe et parler aux soldats. Petit orage à 9 h.

(1) Les motivations américaines pour leur entrée tardives dans le conflit sont beaucoup plus économiques que sentimentales. Les effectifs américains qui vont arriver en Europe devront êtres armés, formés et instruits par nos soins, ce qui retardera leur entrée en jeu jusqu’à la fin du printemps de 1918
Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Neville Chamberlain 1921 –

Mercredi 8 août

Lutte d’artillerie assez violente en Belgique, particulièrement dans le secteur de Bixchoote, et au nord de l’Aisne sur le front Hurtebise-Craonne. Aucune action d’infanterie.
En Champagne, nous avons effectué dans les lignes allemandes trois incursions qui nous ont permis d’infliger des pertes à l’ennemi et de ramener des prisonniers.
Sur la rive gauche de la Meuse, l’ennemi a prononcé une attaque sur nos positions entre le bois d’Avocourt et la cote 304. Nos tirs les ont forcés à rentrer dans leurs tranchées de départ.
Sur la rive droite de la Meuse, l’ennemi a prononcé une attaque sur nos positions du bois des Caurières. Une fraction qui avait réussi à prendre pied dans un élément de notre première ligne en a été rejetée par une contre-attaque.
Sur le front belge, canonnade, lutte de grenades vers Dixmude.
Rien d’important à signaler sur le front britannique.
En Macédoine, notre artillerie exécute des tirs de destruction dans la boucle de la Cerna.
Les Russes ont à nouveau rétrogradé à la frontière de la Bukovine et en Moldavie, au nord de Focsany. L’évacuation de Kamenetz a été prescrite.
Kérensky a formé son cabinet avec des socialistes, des progressistes et des cadets. Dans son discours inaugural au ministère, il a montré que la défense nationale devait être la première préoccupation du nouveau gouvernement.
Un sous-marin allemand ayant canonné un chalutier espagnol, la presse de Madrid montre à nouveau une vive irritattion, et M. Dato a envoyé une protestation circonstanciée à Berlin.
Au cours d’une déclaration au sénateur Lewis, le président Wilson a dit que tous pourparlers au sujet de la paix seraient actuellement oiseux et qu’il serait le premier à adopter des initiatives dans ce but, quant l’heure lui semblerait venue.

Source : La Grande Guerre au jour le jour