Louis Guédet

Au dimanche de Pentecôte 27 mai 1917 988ème et 986ème jours de bataille et de bombardement

6h soir  Rentré ce soir de St Martin, désemparé. La désolation de ma pauvre femme m’inquiète beaucoup, mes 2 grands exposés fort, très fort à Berry-au-Bac, mon Père malade, et à son âge pouvant disparaître d’un moment à l’autre. Voilà mon état d’esprit. Et dans tout cela je ne vois aucune issue, aucune lueur de voir cesser nos épreuves et ma misère !…  Je suis à bout de tout.

Quand je suis arrivé à St Martin j’étais exténué, et depuis 2 ou 3 jours seulement je commençais à reprendre vie un peu, et esprit, mais voilà que je suis obligé de renter inopinément ici, rappelé pour aller demain à Rilly-la-Montagne faire signer un petit partage aux Lepitre. Je pars demain à 8h.

Ici ce matin bombardement et gaz lacrymogènes par obus. Dont les effets se sont fait sentir à la maison sur nos bonnes. Rien de grave elles avaient des picotements aux yeux et des larmes. En ce moment le calme.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Paul Hess

Pentecôte 27 mai 1917 – Bombardement, dès 5 h 1/2.

A 7 h, à peu près, alors que je me rasais la barbe, la fenêtre ouverte, dans la cuisine du 10 de la rue du Cloître, par un temps superbe, je me sens subitement très incommodé par des picote­ments aux yeux qui me donnent à penser que ma vue commence à se fatiguer, ce que je m’explique sur le moment, sans prendre garde à une autre cause, par le séjour continuel dans les caves.

Nous devons, à la mairie, travailler toute la journée à la lu­mière de lampes à pétrole et quand je sors du bureau, c’est uni­quement pour aller prendre mes repas à la popote avec le même éclairage, puis pour venir passer la nuit, cour du Chapitre, encore dans la cave.

Je songe sérieusement à aller voir un oculiste dès que cela me sera possible, au cours d’une permission, car j’ai bien du mal de continuer l’opération dans laquelle j’ai été arrêté. Très gêné, les yeux remplis de larmes, j’achève ma toilette à l’aveuglette, comme je le puis et je sors vers la place royale.

Une première personne que j’aperçois se garantit la figure avec son mouchoir. Deux ou trois autres que je vois ensuite, font de même ou se tamponnent les yeux et je comprends alors que, dans le centre, nous venons de ressentir les effets de gaz lacrymo­gènes.

Était-ce une nappe qui s’était répandue jusqu’en ville, ou des obus spéciaux avaient-ils éclaté à proximité ?

Les gens rencontrés avaient été certainement surpris comme moi, car aucun n’avait son masque.

— Les obus tombent serrés, toute la matinée. L’après-midi se passe tranquillement mais vers 19 h 1/2, c’est la reprise du bom­bardement.

Paul Hess dans Reims pendant la guerre de 1914-1918, éd. Anthropos

Cardinal Luçon

Dimanche 27 – A 8 h. + 20°. De 6 h. à 11 h. 30, bombes sifflantes conti­nuellement ; senti de nouveau odeur douceâtre à ma fenêtre que j’ai dû fermer ; souffrance légère aux yeux (gaz asphyxiants ou lacrymogènes). Presque à tous les obus, des éclats tombent chez nous ou chez nos voisins.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Dimanche 27 mai

Actions d’artillerie intermittentes sur la plus grande partie du front, assez vives dans la région a l’est de Vauxaillon et en Champagne, dans le secteur du Mont-Haut et du Téton.
Un coup de main ennemi sur nos petits postes, au nord-est de Vauxaillon, a complètement échoué.
Au nord de Cerny, nos batteries ont pris sous leur feu et dispersé des rassemblements ennemis.
Nos pilotes ont abattu dix avions ennemis; dix-sept autres appareils allemands ont été contraints d’atterrir. Nos escadrilles ont bombardé les gares de Mars-la-Tour, Chambley, Conflans, Vouziers, Anizy; les bivouacs de la région de Laon, etc, 13000 kilos d’explosifs ont été lancés.
Les Anglais ont repoussé des coups de main au nord de Gouzeaucourt et à l’est d’Armentières. Ils ont progressé sur la rive droite de la Scarpe. Canonnade de Croisilles à la Scarpe.
Un raid d’avions allemands dans les comtés du sud-ouest de 1’Angleterre, a fait un grand nombre de victimes, surtout des femmes et des enfants.
Les Italiens, s’avançant toujours sur le Carso, ont porté à 22419 le total de leurs prisonniers en dix jours.

Source : La Grande Guerre au jour le jour