Louis Guédet

Lundi 20 décembre 1915

464ème et 462ème jours de bataille et de bombardement

11h soir  Beau temps, dégel. Je suis exténué. Couru la matinée pour ouvrir le coffre-fort de Mme Désaubeau 16, rue des Consuls, Hôtel de Ville service, Comptoir des Escomptes dépôts des valeurs retirées de son coffre. Palais pour le testament, rentré à 12h et trouvé 3-4 personnes à répondre. Réglé rente Martin pour Mareschal. Déjeuné entretemps, et à 1h parti pour Ville-Dommange pour la levée des scellés Mimil, rentré à 6h du soir, trouvé lettre de Charles Heidsieck, m’appelant d’urgence rue St Hilaire pour causer de l’affaire Schülz qui se complique pour lui, parce qu’associés. C’est une vaste fumisterie et du chantage. La maison Charles Heidsieck n’ayant jamais d’associés qu’entre eux, et Schulz était suisse. Et tout cela remue ciel et terre au Parquet général à Paris. C’est honteux si ce n’était grotesque. Rentré dîner à 8h et me voilà à 11h1/2 finissant ma journée. C’est fatiguant…  exténuant.

Vu l’abbé Landrieux ce matin, parlé de son sacre. J’irais donc à Dijon comme je lui avais déjà dis le 2 février 1916. Il a paru sensible à cela. Remis 1000 Fr pour la famille Mareschal et donné somme de 200 Fr pour moi et Maurice comme fabriciens. Je voudrais bien que ce voyage puisse correspondre avec celui que je dois faire à Bâle pour les valeurs Mareschal. Je n’ai plus le temps d’écrire ! Suffirai-je à ma tâche… ?? Je n’ai encore lu aucun journaux… !  Je ne sais vraiment pas comment je vie. En ce moment, en cet instant où j’écris, des coups de feu d’échange espacés, comme en batterie, et c’est très rapproché…  les coups sont toujours vers Bétheny !! On dirait des tirs à la Ville. On n’y fait plus attention.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Paul Hess

20 décembre 1915. Bombardement vers la rue de la Justice, le Boulingrin et la place de la République, passage toujours dangereux. Quelques blessés.

Paul Hess dans Reims pendant la guerre de 1914-1918, éd. Anthropos

Cardinal Luçon

Lundi 20 – Nuit tranquille pour la ville. Peu d’activité autour.

Visite aux Petites Sœurs de l’Assomption. + 2 degrés – Visite de M. le curé de Merfy. Visite à l’École des Caves Chauvet. Pluie toute la journée ; + 4 degrés.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Juliette Breyer

Lundi 20 Décembre 1915. Cet après-midi Mme Forgeat, qui habitait rue Baron et qui actuellement se trouve à Courlancy, s’est dérangée de là-haut par une pluie battante pour venir me dire qu’à la Poste il y avait des lettres à mon adresse de la rue de Beine, dont une du Ministère de la Guerre. Tu penses dans quelle impatience je suis. C’est parce qu’il était trop tard, sinon j’y serais partie tout de suite. Je crois que je ne dormirai pas beaucoup.

Ta petite femme qui t’aime toujours.

Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) - Lettres prêtées par sa petite fille Sylviane JONVAL
De sa plus belle écriture, Sylviane Jonval, de Warmeriville a recopié sur un grand cahier les lettres écrites durant la guerre 14-18 par sa grand-mère Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) à son mari parti au front en août 1914 et tué le 23 septembre de la même année à Autrèches (Oise). Une mort qu’elle a mis plusieurs mois à accepter. Elle lui écrira en effet des lettres jusqu’au 6 mai 1917 (avec une interruption d’un an). Poignant.(Alain Moyat)

Il est possible de commander le livre en ligne


Lundi 20 décembre

L’activité de l’artillerie demeure intense.
En Belgique, les batteries françaises et britanniques ont violemment bombardé les tranchées allemandes d’où partait une émission de gaz suffocants dirigés vers le front anglais. Il n’y a pas eu d’attaque d’infanterie. Des avions ennemis ont survolé la région de Poperinghe et jeté une dizaine de bombes. Une femme a été tuée. Une femme et deux enfants ont été blessés.
Notre artillerie a dispersé des travailleurs dans le secteur de Thelus, au nord d’Arras. Cette ville a reçu une centaine d’obus ennemis.
Entre Somme et Oise, nos engins de tranchées ont détruit un ouvrage allemand à Dancourt.
Entre Soissons et Reims, notre artillerie a pris à partie les lance-bombes et les batteries de l’ennemi, à l’est de Berry-au-bac.
Notre artillerie lourde a causé de sérieux dommages à Sainte-Marie-à-Py, en Champagne, aux première lignes ennemies.
Canonnade près de Saint-Mihiel.
Sept de nos avions ont bombardé la gare de Metz-Sablons. Un de nos appareils, arrêté par une panne de moteur, a atterri sans incident dans nos lignes, à Dieulouard.
Aucun incident ne s’est produit dans le secteur français de Macédoine.
Le croiseur allemand Bremen et un torpilleur allemand ont été co
ulés en Baltique.

Source la Grande Guerre au jour le jour