Louis Guédet

Jeudi 17 février 1916

523ème et 521ème jours de bataille et de bombardement

7h soir  Calme, vent, ondées. Audiences réquisitions militaires. Je me suis bien amusé. Bertaux huissier à Reims, actuellement officier d’intendance, sous les ordres du Sous-intendant Racine (le galonné) lui racontait son infortune et sa surprise en arrivant chez lui ce matin rue Cérès, de trouver son « home » occupé…  militairement. Prise de tête, engueulade, etc…  Racine menaçant de toutes ses foudres le malheureux officier qui avait violé le domicile de son sous-ordre, etc…  C’était plutôt hilarant, et je pensais à tous les pauvres malheureux propriétaires qui étaient molestés de la même manière et n’avaient pas le droit de sévir et de se plaindre. Pour cette fois c’était bien tombé. Aussi n’ai-je pu m’empêcher de dire à Racine : mon cher Sous-intendant, vous voyez comment vos camarades nous traitent. Je ne suis pas fâché que vous le constatiez personnellement !…

Il n’a pas protesté et il a…  encaissé.

Ma pauvre femme m’annonce la disparition de mon chien Bock qui était si bon, si bien de sa race. Encore une peine ajoutée à toutes les autres. Il est dit que tout ce que j’aimais disparaitrait…  me serait enlevé. J’en ai gros cœur. J’aurais tant aimé l’avoir encore après la guerre, il était une compagnie pour moi, un ami. Tout m’est enlevé ! Je ne puis m’attacher à rien sans qu’il me soit ravi. C’est dur…  triste, douloureux. Mon pauvre Bock qui lisait si bien dans mes yeux ! Pauvre cher chien !! C’est dur !!

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Cardinal Luçon

Jeudi 17 – Nuit tranquille ; pluie ; + 4. Visite à M. Heidsieck, à M. Abelé.

Reçu lettre de Mgr Sevin ; formule

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Juliette Breyer

Jeudi 17 Février 1916. Charlotte va revenir. Paulette est malade et moi je n’ai toujours pas de réponse de chez Mignot. Tant pis, mais je voudrais pourtant travailler. Ton papa est venu nous voir. Si tu voyais quand il arrive, ta petite Blanchette regarde toujours s’il a un paquet dans ses mains. Pense donc mon Charles qu’elle va avoir l’âge qu’avait André quand tu es parti. D’y penser, vois-tu, cela me fait mal.

J’ai encore appris aujourd’hui que le petit Charles Arnould, celui qu’on appelait Mikado, avait été tué en Septembre 1914. Combien de morts ?

Je t’aime mon Charles, toujours autant.

Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) - Lettres prêtées par sa petite fille Sylviane JONVAL
De sa plus belle écriture, Sylviane Jonval, de Warmeriville a recopié sur un grand cahier les lettres écrites durant la guerre 14-18 par sa grand-mère Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) à son mari parti au front en août 1914 et tué le 23 septembre de la même année à Autrèches (Oise). Une mort qu’elle a mis plusieurs mois à accepter. Elle lui écrira en effet des lettres jusqu’au 6 mai 1917 (avec une interruption d’un an). Poignant.(Alain Moyat)

Il est possible de commander le livre en ligne


Jeudi 17 février

En Artois, nous avons fait jouer aux abords de la route de Lille, un camouflet qui a bouleversé les travaux de mines de l’ennemi.
Notre artillerie a canonné les convois de ravitaillement allemands an nord de Tracy-le-Val, à l’est de l’Oise, et dans la région de Berry-au-Bac.
Au sud-est de Saint-Mihiel, nous avons bombardé les organisations ennemies dans la forêt d’Apremont.
L’armée allemande, après un terrible bombardement du front d’Ypres, a fait plusieurs attaques d’infanterie. L’ennemi a pénétré sur environ 600 mètres de large dans une tranchée anglaise de première ligne. Partout ailleurs il a échoué. Le bombardement a continué.
Les Russes, qui avaient enlevé successivement un fort, puis un second, puis sept autres à Erzeroum, se sont rendus maîtres de la capitale de l’Arménie.
Les ministres de la Triple Entente au Havre ont déclaré au gouvernement belge :
I° que leurs pays ne cesseraient pas les hostilités tant que la Belgique ne serait pas restaurée dans son indépendance politique et économique et n’aurait pas été indemnisée des dommages subis;
2° qu’elle serait appelée à siéger à la conférence de la paix.
Un incendie allumé par des criminels a sévi dans le port de Brooklyn (New-York) où il a causé de graves dégâts.

Source : La Grande Guerre au jour le jour

 

Gare de Reims