Louis Guédet

Mardi 6 mars 1917

906ème et 904ème jours de bataille et de bombardement

5h3/4 soir  Beau temps, du soleil, la neige finit de fondre. Ce matin inventaire 22, rue des Murs. La femme qui a les clefs nous fait attendre pendant 1h, elle en prend pour son rhume. Je fais la prisée dictée à Dondaine que je laisse au dépouillement des papiers, car c’est pour l’Étude Jolivet. Dans les susdits papiers je trouve une lettre du greffier de Paix d’Épernay qui, au lieu de me prier d’apposer les scellés ici, écrit à cette femme de chercher s’il y a des valeurs ou autres papiers intéressants ! C’est assez piquant ! Si les héritiers savaient cela je crois que le susdit greffier passerait un vilain quart d’heure. Je rentre chez moi puis cours chez Landréat pour me faire un procès-verbal de prestation de serment d’Harel, notaire à Reims comme suppléant. Je déjeune en coup de vent, répond à quelques lettres et je file à mon audience de simple police à 1h1/2. Prestation de serment de Harel, puis l’audience habituelle. Je fais citer pour notre prochaine audience du 3 avril 1917 un capitaine de gendarmerie Bocquet, 151ème Division à Pargny, qui comme un imbécile qu’il est a fait dresser procès-verbal à un garçon boucher qui frappait les jambes (le sabot disent les témoins) d’un taureau qu’on menait à l’abattoir par un maréchal des logis de gendarmerie, par application de la loi de Grammont. Tous les témoignages disent qu’il n’a pas brutalisé l’animal. Nous allons voir ce que dira ce galonné digne acolyte de cette brute de Girardot.

Fin d’audience, je dresse et fais signer une réquisition de notification à mariage pour un aspirant qui est dans les tranchées en ce moment, vers le Linguet.

Couru faire quelques courses et rentré fourbu faire ma valise. Pourvu que je n’ai pas de retard demain. Je verrai tout mon Tribunal à Épernay, aussi je coucherai forcément. Je tâcherai de partir à 5h du matin jeudi pour St Martin. Je suis heureux de voir mon ancien Procureur Bossu et aussi les miens. Je suis fourbu et très énervé.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Paul Hess

6 mars 1917 – Beau temps. Nombreuses visites d’aéros boches toute la jour­née et tir en l’air, de l’artillerie, presque continuel.

Paul Hess dans Reims pendant la guerre de 1914-1918, éd. Anthropos

 Cardinal Luçon

Mardi 6 – Vers 5 h. très violent combat. Nuit tranquille. 0°. Neige cou­vre encore la terre. Aéroplane, tir contre lui. A 11 h. 1/2, un de nos obus éclate si près d’un avion allemand que j’ai cru qu’il l’avait atteint ; et en effet à partir de ce moment, il a décrit une courbe descendante pour retour­ner vers les lignes allemandes, comme pour atterrir. Visite à l’hospice Rœderer. De 7 h. à 9 h., canonnade lourde, lointaine au Sud-Est. Toute la nuit, violente canonnade à l’Est et au Sud-Est de Reims.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

roederer


Mardi 6 mars

Nos reconnaissances ont réussi plusieurs coups de main, notamment au nord-ouest de Tracy-le-Val et au bois d’Avocourt. Vers Troyon, dans la région de Reims et à la cote 304, nous avons arrêté des tentatives de coups de main ennemies.

Sur la rive droite de la Meuse, le bombardement dirigé par l’ennemi sur la région du bois des Caurières a redoublé d’intensité et a été suivi d’une violente attaque sur un front de 3 kilomètres, entre la ferme des Chambrettes et Bezonvaux. Entre le bois des Caurières et Bezonvaux, les efforts répétés des Allemands ont échoué sous nos tirs de barrage et de mitrailleuses. L’ennemi avait pu prendre pied dans nos éléments avancés au nord du bois des Caurières, mais il a été rejeté ensuite d’une partie de ces éléments.

A l’ouest de Pont-à-Mousson, une tentative allemande sur une de nos tranchées au nord de Flirey a complètement échoué sous nos feux. Nos tirs de destruction ont bouleversé les travaux de l’adversaire dans le secteur de la forêt de Bezanges.

Nous avons abattu deux avions allemands, l’un près d’Autrecourt (Meuse), l’autre vers Mampeel (Oise); Un troisième a été descendu en Alsace.

Succès italien dans le Haut-Tyrol.

Echec turc en Perse.

La session du Sénat américain s’est close sans que la loi de neutralité armée ait été votée. C’est le résultat de l’obstruction de quelques sénateurs. 83 membres de l’assemblée sur 96 ont exprimé à M. Wilson leur volonté de s’associer au projet.

Source : La Grande Guerre au jour le jour