Louis Guédet

Mardi 14 mai 1918                                                        

1341ème et 1339ème jours de bataille et de bombardement

9h matin  Pluie toute la nuit. Temps gris, maussade, humide ce matin, quelle température depuis 3 semaines ! Je suis de plus en plus attristé, désœuvré, découragé. Quelle existence ! Et voir souffrir les miens autour de moi. Et pas d’issue ! pas de trêve à ma misère !

4h soir  Courrier assez chargé. Lettre de M. Champenois qui m’apprend le pillage de la maison du 52 rue des Capucins où j’étais réfugié, et de la cave bien entendu !! Les gendarmes en tête, parait-il ! ce qui ne m’étonne aucunement. On devrait tirer sur ce peuple-là. Il a fait barricader portes et fenêtres ! Puisse cela en rester à cela.

Lettre de M. Jadart notre secrétaire de l’Académie de Reims. Fort triste et découragé. Il m’apprend la mort de notre collègue Laurent que je savais. Nous voilà réduits à 39 membres sur 45. Les décédés sont : M.M. Jullien (Ernest Jullien, le 10 juillet 1914), Lamy (Edouard Lamy, le 30 novembre 1914), abbé Haudecœur (Abbé Haudecœur, le 4 septembre 1915), Paul Simon (Paul Simon, le 17 mars 1917), Alphonse Gosset (Alphonse Gosset, le 11 novembre 1914) et J. Laurent (Jules Laurent, le 30 avril 1918)!! Puisse cette liste être close jusqu’à notre retour à Reims, si jamais nous y retournons ! Ces deux lettres sont loin de me remonter et de me donner des idées gaies ! Hélas ! De la pluie cet après-midi, par suite impossible de sortir, quel triste mois de mai, et froid ! J’ai fini de répondre à mes lettres, me voilà désœuvré jusqu’à demain. Si seulement j’avais quelque chose à faire pour me distraire, m’occuper, aller, venir, voyager, pour ne plus voir de tristesses et de ruines ! J’accepterais volontiers une mission quelconque à remplir à l’étranger, cela me changerait les idées et me redonnerait peut-être du courage. Mais quoi ? et qui songerait à moi ?

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

 Cardinal Luçon

Mardi 14 – Visite de M. de Aiala offrant son château d’Ay et pressant pour qu’on écrive au Général Gouraud

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Mardi 14 mai

Lutte d’artillerie assez vive dans la région au sud de l’Avre. Pas d’action d’infanterie.
En Lorraine, nos détachements ont pénétré dans les lignes allemandes, au nord de Nomény et ramené une vingtaine de prisonniers.
Dans la région de Saint-Dié, un coup de main ennemi a échoué sous nos feux.
Sur le front britannique, l’artillerie a été active pendant la nuit dans les secteurs de la vallée de la Somme, d’Albert, ainsi qu’entre Locon et la forêt de Nieppe.
L’aviation française de chasse s’est montrée active. Deux avions allemands ont été abattus et huit gravement endommagés. Un ballon captif a été incendié par nos pilotes.
Nos bombardiers ont lancé 7.000 kilos de projectiles sur les gares, dépôts et cantonnements de l’ennemi, notamment dans la région de Noyon, Chauny, Flavy-le-Martel. Sur ce dernier point, plusieurs incendies ont été observés.
Les aviateurs anglais ont jeté quatorze tonnes de bombes sur Péronne, Bapaume, Thielt, Douai, Zeebrugge et les docks de Bruges. Huit aéroplanes allemands ont été abattus et six forcés d’atterrir; neuf des aéroplanes anglais manquent.
L’Allemagne et l’Autriche publient une note solennelle datée de Vienne pour dire que leur alliance militaire et économique a été reserrée et complétée.

Source : La Grande Guerre au jour le jour