Louis Guédet

Lundi 21 janvier 1918

1228ème et 1226ème jours de bataille et de bombardement

6h soir  Paris. Toujours beau temps. Ce matin vu Lenoir qui ne parait pas rassuré sur le sort de Reims. Tout cela m’angoisse !! Reims évacué, c’est la ruine de toute la Ville. Et peut-être sa prise, car les troupes ne pourront jamais résister à la tentation de téter l’or de nos bouteilles. Alors, l’armée ivre ! Les allemands n’auront qu’à entrer dans Reims !? Dieu nous évite cette dernière et suprême épreuve. Je crois que Reims a suffisamment payé sa part de misères.

Déjeuné chez Paul Cousin qui est furieux de la conduite de Girard à mon endroit et à l’endroit des enfants Mareschal dans la société Périer-Jouët. Bref, un tour malpropre avec la connivence de Charbonneaux, de Lelarge et de Thiénot et consorts. Triste monde !

Vu à 2h le Procureur général Lescouvé qui a été plus que charmant avec moi. Il doit venir me voir à Reims en février, et me préviendra de sa visite. Causé avec lui comme si nous nous connaissions de longue date. Je l’ai quitté enchanté.

Puis discussion du contrat de Robert Heidsieck avec sa belle-sœur. Toujours mêmes discutions sur les donations irrévocables par contrat de mariage, système du Nord(Rayé)!! Non ! nous avons une autre mentalité, certes ! Ce soir dîner chez Guelliot (Docteur Octave Guelliot (1854-1943)). Mon Dieu, pourvu qu’on n’évacue pas Reims !! J’en mourrais je crois ! Etre resté là en pure perte, ce serait atroce, et injuste. Voir notre dévouement, nos efforts pour défendre nos ruines et nos épaves, et cela en vain !! Non, Dieu ne peut permettre cela !!

Les trois feuillets suivants ont été découpés.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Paul Hess

21 janvier 1918 – Bombardement. A 16 h 3/4, des explosions d’arrivées assez proches se font entendre à la mairie ; les obus tombent vers le cimetière du nord et le Boulingrin.

Paul Hess dans Reims pendant la guerre de 1914-1918, éd. Anthropos


Cardinal Luçon

Lundi 21 – Nuit tranquille. + 9°.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Lundi 21 janvier

Nous avons repoussé aisément deux coups de main ennemis, l’un dans la région au sud-est de Saint-Quentin, l’autre au nord de Courtecon.
Sur le front britannique, l’aviation a montré de l’activité. Les aviateurs alliés ont jeté des bombes sur divers objectifs à terre, y compris un long convoi, qui a subi de nombreuses pertes vérifiées. Trois appareils ennemis, ont été abattus en combats aériens et un quatrième par les feux d’infanterie; un cinquième a été abattu, désemparé, par les canons spéciaux.
Sur le front italien, canonnade en plusieurs secteurs. Nos alliés ont réussi un coup de main, faisant prisonniers un officier et deux soldats.
L’artillerie italienne a dispersé des transports et des patrouilles ennemies dans les environs de Stabiozzo et de Grave.
Un combat naval s’est livré entre le croiseur de bataille allemand Goeben, le croiseur léger Breslau, des destroyers ennemis et une force navale anglaise, à l’entrée des Dardanelles.
Le Breslau a été coulé, le Goeben a pu s’enfuir fortement avarié et il a été s’échouer à la pointe de Nagara, où il a été attaqué par les aéroplanes de la flotte. Les Anglais ont perdu le monitor Raglan et le petit monitor N° 28.
Lénine a procédé à la dissolution de la Constituante.

Source : La Grande Guerre au jour le jour