Louis Guédet
Mardi 5 février 1918
1243ème et 1241ème jours de bataille et de bombardement
4h1/2 soir Temps adouci, couvert. Des bombes asphyxiantes ce matin vers 6h sur faubourg de Laon. Je finis ma valise. Courrier plutôt mince, tant mieux. A 2h je file voir ces pauvres Melle Payard et Melle Colin, au 40 de ma rue qui sont un peu remuées. Causé puis à l’Hôtel de Ville où je ne rencontre personne. Je laisse un acte à signer par Houlon, puis de là pousse aux Hospices place St Maurice voir Raïssac. En arrivant j’y trouve Guichard et Gustave Houlon. Je vois Raïssac assez affaibli, puis Guichard me propose de nous ramener à la Ville où Houlon signera ma pièce. Les schrapnels sifflent, tonnent, éclatent en route sur 2 avions. Pourvu que nous ne recevions pas d’éclaboussures.
A la Ville le Capitaine La Montagne me saute dessus en me disant : « Mon auto vous prend pour donner une signature où on vous attend. » Le temps de prendre la signature de Gustave Houlon, serrer la main du Docteur Langlet et je saute dans l’auto de la Place qui me dépose ici où ou les Contributions indirectes m’attendent pour signer une ordonnance de perquisition, requête de la Place chez un nommé Jacques, débitant, rue des Ecrevées, pour dépôt d’alcool frauduleux. Et voilà ma vie de 2h1/2 à 4h1/2. Rien d’autre de saillant. Je classe, range ce qui me reste à ranger ici et je serai paré pour demain matin. Dieu garde cette maison-ci durant mon absence et mes 2 bonnes, et Dieu me protège ainsi que mes chers aimés, femme et enfants, que je vais voir en partie demain.
6h1/2 Jacques Simon, fils de Pol Simon, Maître peintre verrier de la Cathédrale de Reims, vient de m’apporter deux petits losanges des vieux vitraux de la Cathédrale de Reims avec leurs plombs du XIIIe siècle authentiques. Ils proviennent de la Grande Nef de la 2e ou 3e travée Nord, près du chœur. Il m’a assuré que ces plombs et vitraux n’avaient certainement jamais été touchés depuis qu’ils avaient été posés par l’ouvrier du Moyen-âge qui les avait sertis dans les plombs qui les enserraient. Il y en a un bleu et un rouge. Ce dernier, me dit-il très gentiment, en l’honneur de mon ruban rouge. C’est charmant de délicate attention… Je dois taire de qui je les tiens.
Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils
Paul Hess
5 décembre 1917 – Bombardement après-midi, par obus à gaz.
Paul Hess dans Reims pendant la guerre de 1914-1918, éd. Anthropos
Cardinal Luçon
Mercredi 5 – Nuit tranquille, sauf un coup de main vers l’est de Reims à 4 h 45 matin. – 4° froid ; beau temps. Tir sur les alentours des Trois-Fontaines, me disent les Sœurs. A 4 h. soir, avions français : tir contre eux.
Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173
Mercredi 5 décembre
Grande activité des deux artilleries en Champagne, notamment dans la région de Tahure-Maisons-de-Champagne.
Sur la rive gauche de la Meuse, les Allemands ont essayé d’aborder nos lignes à l’ouest d’Avocourt et dans le secteur de Forges. Ils ont été arrêtés net par nos feux.
Sur le front britannique de Cambrai, activité de l’artillerie ennemie vers Bourlon et Moeuvres. Aucune action d’infanterie.
Sur le front italien, actions d’artillerie dans le val Giudicarie, sur le plateau d’Asiago et sur la basse Piave. Les troupes franco-anglaises, qui sont venues apporter leur concours à nos alliés, sont désormais en ligne.
On signale de simples escarmouches autour de Jérusalem.
Les délégués des extrémistes russes chargés de conclure l’armistice, ont été reçus au grand quartier général allemand par le maréchal prince Léopold de Bavière. Les pourparlers ont commencé. Les Austro-Hongrois, les Turcs et les Bulgares y prennent part.
Le gouvernement français a indiqué dans une note officie1le les grandes lignes des résultats acquis par la conférence des Alliés et qui concernent l’action navale, l’armement et le ravitaillement des différents peuples de l’Entente.
Source : La Grande Guerre au jour le jour