Louis Guédet
Samedi 29 septembre 1917
1114ème et 1112ème jours de bataille et de bombardement
5h1/2 soir Nuit assez bruyante, temps couvert et frais, mal dormi. Été à 9h à Roederer pour la messe commémorative du fils de Gustave Houlon, Jean Houlon (soldat au 73ème RI, mort des suites de blessures de guerre le 29 septembre 1916 à l’Hôpital auxiliaire 66 à Paris). Cela m’a beaucoup émotionné en songeant à mes petits. Y assistaient Mgr Neveux, l’abbé Camu, l’abbé Béguin, Gaston Laval (allié), Guichard, M.M. Charles et Henry Mennesson, Simon-Concé, de Bruignac, Malicet économe des Hospices et Laffaille employé aux Hospices faisant fonction de Receveur, et quelques autres que je ne connaissais pas. Les religieuses étaient présentes bien entendu. La messe était dite par l’aumônier de l’Hospice Roederer l’abbé Maitrehut. Houlon était très ému, sa femme, sa grande jeune fille (Germaine) et sa plus jeune (Hélène). Il m’a remercié très affectueusement et paraissait touché que je sois venu. Il m’a dit « Je suis d’autant plus sensible à votre sympathie que je souhaite de tout mon cœur que vous ne passiez pas par la même épreuve, et je pense souvent à vos 2 soldats ! »
Causé avec l’un et l’autre à la sortie. Fait un modèle de testament pour un malade au sujet duquel Guichard me consultait, écrit un projet sur le capot de son auto. Vu quelques instants la Supérieure Sœur Thérèse, et rentré chez moi en passant par la Poste prendre mon courrier, assez volumineux.
Répondu à tout cela avant déjeuner et après dîner. Porté mon courrier, poussé jusqu’à la Ville et causé avec le Maire, Houlon et Raïssac de la visite du roi d’Italie et de Poincaré, et de la déconvenue de M. Mazzuchi, de la Maison G.H. Mumm, consul d’Italie, qui n’a su la venue du roi que le lendemain. Ce matin il me racontait cela, il était furieux !! « Comment, s’écriait-il, pour une fois que mon roi vient à Reims, et l’ambassade ne me prévient pas !! » Quitté la Mairie, rencontré en route Dramas avec Dazy (brasseur), Maire de Witry-les-Reims. Le premier me félicitait très gentiment de la citation de Jean et me disant qu’on n’oublierait jamais ce que j’ai fait pour les Rémois durant la Guerre.
En rentrant j’apprends qu’un obus est tombé sur la maison voisine cette de Ducancel, qui est mitoyenne à celle où je suis réfugié. C’est donc une gageure ! Cela m’a encore fortement impressionné. Si cela continue cela me fera mourir, mon pauvre cœur bat la breloque et j’ai des crampes qui me font souffrir. Vous voulez donc ma mort, mon Dieu !
Lettre de Madeleine me disant avoir de bonnes nouvelles du 23 – 24 de Robert, mais ajoutant que Jean devait être très exposé en ce moment. Pauvre petit, ce n’est pas cela qui me remet et me réconforte.
8h soir Ma bonne est rentrée et parait enchantée de ses vacances. Pourvu qu’elle ne soit plus aussi agitée et énervée qu’avant.
Je suis fatigué, et encore tout émotionné de cet obus. Pourvu que nous puissions dormir cette nuit tranquille. Tous les soirs c’est la même question ? serons-nous tranquilles ? et tous les matins même point d’interrogation pour la journée qui s’éveille. Quelle misérable vie !
Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils
Cardinal Luçon
Samedi 29 – Nuit tranquille : + 11°. Aux environs de Reims quelques coups de grenades et de fusil, ou mitrailleuses. A 1 h. bombes allemandes sur batteries jusqu’à 3 h. Commencé la copie de ma Relatio Diaecesis.
Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173
Samedi 29 septembre
Les Allemands ont tenté une série de coups de main sur le front de l’Aisne, dans la région du Panthéon, au sud de la Royère, dans la région au sud d’Ailles et sur nos tranchées, au nord-est de Courcy. Tous ont été repoussés par nos feux.
En Argonne, au Four-de-Paris, puis au nord-ouest de Tahure et à l’ouest de la ferme Navarin, l’ennemi a lancé sur nos positions trois attaques successives, mais nos tirs d’artillerie et d’infanterie l’ont empêché d’aborder nos lignes et lui ont fait subir de lourdes pertes.
Vives actions d’artillerie sur la rive droite de la Meuse, en particulier dans la région de la cote 344.
Malgré les conditions atmosphériques défavorables, nos escadrilles de bombardement ont, au cours de la nuit, copieusement arrosé de projectiles les terrains d’aviation de Marville et de Mars-la-Tour, les gares de Brieulles, Fléville et Romagne-sous-les-Côtes, les cantonnements de Peuvillers et de Sivay-sur-Meuse.
Les Anglais ont brisé une contre-attaque ennemie sur leurs positions de Zonnebeke. Ils ont enlevé, au sud de Tower-Hamlet et du bois du Polygone, des points d’appui isolés où des groupes ennemis tenaient encore à proximité de leurs nouvelles positions. Ils ont effectué avec succès un coup de main au sud-ouest de Cherisy.
Canonnade au sud de Lens.
Source : La Grande Guerre au jour le jour