Louis Guédet
Vendredi 23 février 1917
895ème et 893ème jours de bataille et de bombardement
6h1/2 soir Temps de brouillard et de brume. Audience civile ce matin, peu de choses. En rentrant je trouve ma fidèle Adèle toute décomposée se trouvant mal. La pauvre fille est à bout de forces et en a comme nous tous assez. Je lui conseille d’aller se reposer quelques jours, et si cela n’allait pas mieux de rester dans sa famille, mais elle ne veut rien entendre, elle nous est vraiment attachée. Cela n’a pas été sans me bouleverser. Il ne me manquerait plus qu’elle, je ne sais comment je ferais sans domestique, moi qui suffit à peine à ma tâche, m’occuper de mon intérieur serait le comble. Déjeuner chez Marcel Heidsieck, causé d’un tas de choses, mais rien de saillant ! On est ans l’attente. Ce qui est fort énervant et désagréable ! Rentré à 2h pour voir ma dévouée domestique qui va mieux. Je crois qu’avec un peu de ménagement elle pourra rester, mais comme elle me disait : c’est si lent et puis tout ce que nous avons passé avec Monsieur depuis 30 mois il faut bien que cela se paye !! Elle a raison ! Mon tour viendra aussi où je serai usé, et je tomberai ! sans force, heureux encore si je n’y reste pas ! Enfin il faut que tous les ennuis, soucis, peines, douleurs, misères, etc… nous arrivent.
Ma pauvre chère femme est aussi à bout ! Et puis Robert vient de lui écrire qu’on allait bientôt envoyer les récupérés au front. Vous jugez d’ici les angoisses de la Mère !… Rien ne nous aura été épargné !… Tandis que d’autres… !! Je bondis, je suis outré quand je songe à cela !
Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils
Cardinal Luçon
Vendredi 23 – Idem.
Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173
Vendredi 23 février
En Belgique, des patrouilles allemandes qui tentaient d’aborder nos lignes près de Roode-Port (nord-est de Nieuport), ont été dispersées par nos feux. L’ennemi a subi des pertes.
Lutte d’artillerie assez vive sur la rive droite de la Meuse, dans le secteur de la côte du Poivre. Notre artillerie a pris sous son feu et dispersé un détachement allemand qui sortait de Béthincourt (rive gauche de la Meuse).
Activité d’artillerie sur tout le front de Macédoine. Action de patrouilles près de Serés et sur le front de Makukowo. Un raid sur Brest, près du lac Doiran, a permis de faire des prisonniers. Deux contre-attaques ennemies sur le même point ont été repoussées.
L’aviation a été très active. Elle a livré plusieurs combats heureux et réussi des bombardements sur les colonnes ennemies, près de Melnik.
Les Anglais ont repoussé des tentatives de raids effectuées par les Allemands à l’est de Vermelles et au sud de Neuve-Chapelle. L’ennemi a subi de nombreuses pertes et laissé des prisonniers entre nos mains. L’artillerie a montré de part et d’autre son activité habituelle, notamment au nord de la Somme et au sud d’Ypres.
Les Russes ont arrêté de fortes colonnes ennemies qui les attaquaient dans le secteur de Dorna-Vatra.
Echec autrichien sur le plateau d’Asiago (front italien).
Source : La Grande Guerre au jour le jour