Louis Guédet
Dimanche 5 décembre 1915
449ème et 447ème jours de bataille et de bombardement
6h soir Tempête de vent et de pluie toute la nuit. Ce matin, calme et beau temps, du soleil de décembre, température douce. Bombardement toujours sur les Coutures (quartier des Coutures) : il parait qu’hier 6 artilleurs ont été tués et qu’un de nos 75 a été démoli là. Journée triste pour moi comme toujours : quelle vie misérable j’ai. Reçu un mot de ma pauvre femme qui me dit que mon Père va mieux. Avec sa lettre il y avait une petite de Momo – pauvre petit – je lui ai répondu, mais pas gaiement, j’ai le cœur saignant. Pauvre petit.
Je prends mes dernières dispositions pour mercredi, demain je préparerai mes colis de valeurs. Pourvu qu’on ne vienne pas trop me déranger.
Mais malgré tout je suis bien las ! et malgré moi je suis angoissé ! Comme si un grand malheur me menaçait. Ah ! mon Dieu. Mourir ! Mourir !!!
Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils
Paul Hess
Les avions de part et d’autre circulent beaucoup depuis quelque temps, malgré la chasse que leur font journellement les artilleries adverses.
Tandis que nous traversons, aujourd’hui, la place de la République pour regagner l’avenue de Laon, M. Vigogne et moi nous arrêtons pour regarder un aéro qui vient de faire le « looping ». Ceci nous a surpris ; c’est la première fois que l’un et l’autre nous avons vu exécuter ce tour d’acrobatie. Comme il recommence, nous voyons fort bien, plusieurs fois encore, son blindage scintiller au soleil, lorsqu’il se retourne dans le ciel tout bleu.
— Pendant midi, place Amélie-Doublié, un bruit de mitrailleuses en l’air attire ma sœur à la fenêtre ; j’y vais également et nous voyons deux avions, l’un des nôtres et un boche se croiser et se combattre en tiraillant. Après cette courte alerte, il nous semble que l’Allemand retourne dans ses lignes.
Paul Hess dans Reims pendant la guerre de 1914-1918, éd. Anthropos
Cardinal Luçon
Dimanche 5 – Nuit tranquille, tempête jusqu’au matin. 8 bombes sifflantes sur batteries jusqu’à 10 h. 1/2 et toute la matinée. Aéroplane à 11 h. Reprise des obus sifflants gros calibre de 12 h. 1/2 à 2 h. 1/2. Aéroplanes allemands et français, canonnade contre eux.
Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173
Dimanche 5 décembre
Le mauvais temps gêne les opérations. Canonnade intermittente sur divers points du front. Quelques obus tombent à l’est de Grenay et autour de Sapigneul. Contact de patrouilles en Artois.
Lutte de mines en Argonne, à la Haute-Chevauchée et aux Eparges.
En Woëvre, nous démolissons une grosse pièce qui avait été signalée à l’est de Saint-Mihiel.
L’artillerie belge a bouleversé les travaux ennemis et contrebattu l’artillerie ennemie près de Dixmude.
Sur le front d’Orient, faible bombardement par les Bulgares de la gare de Krivolak.
Sur la Cerna, nous arrêtons des reconnaissances ennemies. Canonnade dans les secteurs de Doiran et de Stroumitza.
Les Anglais, devant l’arrivée des renforts turcs, se sont repliés en arrière de Ctésiphon, en Mésopotamie. Leurs pertes totales sont de 4500 hommes.
Le gouvernement américain a réclamé le rappel de l’attaché militaire et de l’attaché naval allemands à Washington, Boy-Ed et von Papen, dont la culpabilité avait été démontrée dans les complots pro-germains récents.
La Chambre italienne a exprimé sa confiance dans la politique générale du cabinet Salandra.