Abbé Rémi Thinot

12 SEPTEMBRE – samedi – 9  heures ; je suis dans la cathédrale, dans une stalle près de l’orgue. C’est une révolution. On vide la nef et les bas-côtés de toutes les chaises. Il faut loger ici 3.000 prisonniers. Et la discussion n’a pas été admise. L’autorité ne voulait même pas permettre l’enterrement qu’on est en train de faire à l’autel du Cardinal. On va remplir de paille notre cathédrale… puis ce sera l’invasion impie dans le temple de Dieu. Ce choix de Notre-Dame est

Cependant, le canon tonne et tonne tout près. Il est évident que des combats serrés se livrent aux environs de Reims et tout près.

1 heure ; La canonnade est infernale… l’effroi se répand à nouveau parmi la population.

Rentrant chez moi tout à l’heure, j’ai assisté à la violation du domicile de M. Bocquillon, rue de l’Ecole-de-Médecine. 3 soldats acharnés après la porte de chêne, avec des marteaux, des pinces, la crosse de leur fusil. On les regardait… Sans pudeur aucune, ils broyent les panneaux, entrent et recommencent sur chacune des portes de l’intérieur. C’est affreux.

le Curé, sortant du Lion d’Or, me disait qu’on était en train de dresser une liste de 100 otages, cent personnalités rémoises qui répondront de l’ordre dans la ville. Ce système est atroce et injuste. L’acte d’un fou peut ainsi coûter la vie à des hommes parmi les plus respectables.

9 heures du soir ; Une Journée mémorable ; ce matin, la paille dans la cathédrale, le St. Sacrement évacué à la Mission et à l’adoration Réparatrice, puis les travaux d’isolement, un barrage de toile au niveau du grand autel pour que le culte puisse être continué… du moins pour qu’on ne perde pas possession de la cathédrale…

La canonnade se rapprochait… il s’agit d’une véritable bataille ; le duel d’artillerie est formidable. Je suis monté avec M. le Curé sur la terrasse de M.Saintsaulieu ; on voyait la fumée des batteries. Poirier m’a dit qu’ils avaient pu suivre toute la bataille ; les français étaient logés sur un quart de cercle immense, allant de Rilly-la-Montagne à St. Thierry. Sans répit, les canons ont toussé, les feux se rapprochant de plus en plus ; on ne peut nier que les coups résonnaient dans nos rues d’une façon formidable. A la nuit très tombée seulement, le canon s’est tu…

Mais voici le tragique de la Journée ; descendant de chez Sainsaulieu[1], Je vois, avec M. le Curé, un groupe important de civils encadrés par des soldats, enfiler la rue du Cloître derrière l’abside. Ce sont les otages, les 100 otages qu’on va « parquer » au grand séminaire, rue de l’Université, pour répondre de la sûreté des troupes allemandes quittant la ville. Je cours prendre une traverse et je rejoins le groupe rue Vauthier. J’entre avec eux ; une multitude me prient d’aller avertir leurs familles qu’ils ne rentreront peut-être pas ce soir, qu’on se tranquillise sur leur compte. Parmi eux, MM. Camus, Andrieux etc… Je les laisse installés dans la Salle des Exercices et je commence par la ville mon triste pèlerinage.

Oh ! ce Reims apeuré par le canon… Reims terré dans les caves (chez Lanson, Mme de Bary et toute la cohorte des femmes distinguées et emmitouflées !) dans l’attente de la bombe affreuse. Jamais je n’ai vu une grande ville déserte ainsi… Et la pluie qui se met à tomber, une pluie triste d’octobre… Les maisons n’osaient s’ouvrir sous un coup de sonnette. Des filles, réunies dans une blanchisserie me crient ; ”M. L’abbé, bénissez-nous en passant !”, me rappelant celle que M. le Curé a confessée pendant le bombardement du 4 Septembre et celle qui s’est précipitée chez moi en citant qu’elle ne voulait pas mourir sans la bénédiction de M. l’Abbé. Et les volets qui s’entrouvraient parmi des frissons de peur… et se reclaquaient… Un blessé allemand me demandait sa route.

A 7 heures, j’étais loin encore du terme de mes litanies… quand je rencontre un homme, rue de l’Étape, qui me dit ; « Vous savez leur dernière, M. L’Abbé? Ils ont enlevé les otages ! »

Ils ont enlevé les otages, les entraînant à pied vers Witry… La rage me prend.

Je dîne rapidement chez M. X. et en rentrant chez moi, par le parvis grouillant de teutons, il y a quelques heures, maintenant désert et rempli d’une horrible paille humide et d’infects débris… je rencontre M. Camus… un otage.. !

Alors? Alors… à un certain moment, il paraît que le général allemand est venu remercier les otages, le Maire, de la façon dont la ville s’était conduite pour la sortie des troupes… désirant que celles qui restaient à Reims – celle des blesses.. ! – soient bien traitées. Par paquets, ils sont rentrés.

Et une immense lueur emplit tout l’horizon vers Bétheny. Poirier me dit que depuis les hauteurs de leur observatoire Pommery, ils ont vu le feu ravageant plusieurs points. Celui qui règne en ce moment est au Petit-Bétheny… le parc à fourrages… mais encore la lueur est formidable.

Il est 10 heures ; la pluie tombe à torrents. Les troupes ont dû coucher sur leurs positions. Et je crois qu’au petit jour le combat recommencera.

Dieu protège la France ; demain sera notre délivrance !

11 heures ; Je rentre d’un tour très rapide dans une ville archi-déserte, sous la pluie. Le pas lourd d’un allemand, baïonnette au canon, qui descend la rue de Vesle en fumant sa cigarette. Ma soutane relevée sous la pèlerine lui donne à penser ; « Halt ! » d’une voix rude. J’arrête ; il approche, me tâte les poches… D’où je viens ? Je sors mon insigne de la Croix Rouge, aussitôt, il me tend la main, s’excuse, s’éloigne. C’est curieux, leur culte pour la Croix Rouge. Il faut croire que l’insigne répond chez eux à des réalités de dévouement… Ce soldat a été brave, alors que les Français sont aux portes ; il m’aborde, inconnu, en pleine ville déserte…

[1] https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_Sainsaulieu (note Thierry Collet)

Extrait des notes de guerre de l'abbé Rémi Thinot. [1874-1915] tapuscrit de 194 pages prêté à ReimsAvant en 2017 pour numérisation et diffusion par Gilles Carré.

Juliette Maldan

Samedi 12 septembre 1914

En arrivant à la cathédrale pour la messe de 8 heures, je remarque qu’un certain désarroi semble régner dans l’église. On s’agite, on enlève précipitamment les chaises de la grande nef pour les entasser ailleurs…

J’apprends que l’État-major allemand a exigé hier que la cathédrale lui soit livrée pour y installer des blessés.

Les Docteurs ont vainement protestés en objectant l’humidité de l’immense nef, le vent qui souffle à travers les vitraux brisés par le bombardement, et tous les inconvénients de cette installation pour des blessés. « C’est possible, a-t-il été répondu, mais l’ordre part de trop haut pour que nous puissions nous y dérober ».

Les officiers exigent que toute la grande nef soit couverte d’une couche de paille épaisse de cinquante centimètres.

11 Il n’est pas facile de se procurer tant de paille, mais n’importe, il faut obéir, et ce matin, on s’est mis en devoir d’exécuter cet ordre étrange.

Pauvre chère cathédrale ! En la quittant après la messe, combien peu pourtant je ne doute que c’est la dernière fois que je la contemple intacte, dans son rôle de prière !… Il semble qu’elle soit trop grande, trop sainte pour que les hommes osent s’attaquer à elle, et déjà ce matin, la main mise sur elle par l’État-major allemand nous indigne.

Bientôt un épais lit de paille couvre toute la nef, et une frêle cloison de bois et de toile sépare l’arrière-chœur, qui seul reste conservé au culte.

Vers neuf heures, le canon commence à gronder d’une façon formidable, et ses roulements vont toujours en grandissant. Les détonations se suivent, s’entrecroisent sans interruption. Avec quelle angoisse on écoute cet orage sinistre qui gronde plus fort, sans cesse plus fort sur nos têtes !… Il n’y a plus de doute, on se bat aux portes de Reims, et notre sort, le sort de la ville va se décider…

Les heures passent, et nulle interruption ne se produit dans la bataille.

Les vitres du grand salon tremblent et vibrent perpétuellement sous ces coups qui déchirent l’air. On essaie de l’occuper, de tirer quand même l’aiguille, sans savoir ce que l’on fait, tant l’esprit est ailleurs, tendu vers la région toute proche où le sang coule, ou chacun de ces coups fauche des vies !

Vers 2 heures, Marie de la Morinerie, suivie de Maurice et de sa mère, arrive toute en larmes, et raconte à travers des sanglots que Raymond vient d’être pris comme otage ! Les allemands réclament cent otages parmi les notables de la ville.

Un peu après, une patrouille s’arrête en face de la maison. Ils emmènent déjà M Benoist et Osouf, et viennent chercher M Gaudefroy. Nous assistons à son départ que hâtent avec impatience le groupe de soldats.

Le bruit terrible du canon ne cesse pas un instant, la pluie tombe, les rues sont désertes, une sorte de stupeur pèse sur la ville…

Le défilé des troupes allemandes reprend au milieu de l’après-midi. Le pesant matériel, des files interminables de lourds charriots qui entassent sous leurs bâches grises les objets les plus hétéroclites, produits du pillage.

Puis la cavalerie, l’artillerie… Nous comptons 26 canons qui passent sous nos fenêtres, tout cela en hâte, mais pourtant avec ordre. Serait-ce une retraite ?… Est-ce un mouvement stratégique ?…

Tout à coup, des troupes qui défilent en rangs pressés, jaillissent des chants de guerre. Ces hommes ont des voix graves et sonores, et ces chants étranges sont d’un effet impressionnant.

Que signifient-ils ?… Nous ne savons que penser…

Vers quatre heures, sous nos fenêtres, dans la boue et sous la pluie qui tombe par rafales, nous voyons passer les otages… Le Maire est en tête. Il y a là M. Abelé, Raoul de Bary, etc. Ils marchent enveloppés de soldats ennemis, la baïonnette au poing… On les entraîne vers le faubourg Cérès. Que vas-t-on faire d’eux ?…

Maurice, d’une fenêtre, a vu passer son père dans ce triste cortège. Il demande que l’on ne dise rien à sa mère dont l’angoisse serait encore accrue. Nous donnons aux domestiques une consigne de silence.

Les heures continuent à passer sans amener aucun répit dans la canonnade, qui va toujours en se rapprochant…

C’est bon signe, sûrement les français avancent !

Les troupes ennemies ont repris leur défilé précipité, entrecoupé, de loin en loin, par des chants de guerre sauvages. Certains régiments, couverts de boue, les vêtements déchirés, ont bien l’aspect des troupes qui viennent de battre… ou plutôt d’être battues. Mais, si c’est une retraite, ce n’est pas une déroute. Cet ordre, cette force, me donnent la crainte que ces troupes ne se reforment bien près d’ici.

La nuit tombe, on n’y voit plus du tout, et le canon gronde toujours !…

Un peu avant 8 heures, un coup de sonnette retentit dans le silence de la rue devenue déserte… C’est Raymond !

Quelle joie pour sa femme après cette journée d’angoisse !

Trempé, brisé, Raymond nous raconte sa journée :

Du Palais de Justice où ils avaient d’abord été parqué, les otages ont été transportés au Grand séminaire. De là, les soldats sont venus les prendre pour les faire marcher derrière les troupes, de façon à couvrir leur retraite, dans le cas où on aurait tenté de tirer sue elles. Les otages savant que si un civil s’avise de bouger, ils seront immédiatement « pendus ». Et comme ils protestent contre ce genre de mort, et réclament au moins le privilège d’être fusillé, les autres insistent « Non, non, pendus ! »

Sur l’Esplanade Cérès, une longue halte a lieu sous la pluie. « Où nous emmenez-vous ? » – « C’est bon, vous verrez ! »

La troupe se remet en marche et les entraîne au-delà du faubourg Cérès et du cimetière, loin dans les champs. Là on les fait ranger en lignes, le long des arbres de la route, tandis que les officiers, révolvers au poing, se promènent de long en large devant eux.

La nuit est venue, une nuit d’automne, où la pluie, accompagnée d’un vent de tempête, fait rage. Un immense incendie qui monte de le ville, éclaire tout le ciel de ses lueurs sinistres, tandis que le canon gronde plus formidablement que jamais dans la campagne déserte. Au milieu de ce lugubre décor, tous, parmi les otages, ont bien cru leur dernière heure venue !…

Au bout d’un certain temps, après avoir suffisamment joui de ce cruel effet, un officier a fini par dire aux otages : « La population de Reims a été calme. Vous êtes libres ! … »

Toutefois, Raymond rentre plein d’inquiétude sur les travaux de défense qu’il a pu contempler pendant cette lugubre promenade.

Au-delà du faubourg Cérès, les allemands ont creusé d’énormes tranchées, et se sont installés fortement sur ces positions. Il faut donc d’attendre à voir la lutte se continuer aux portes de la ville.

Le canon a enfin cessé de gronder, mais une immense lueur d’incendie monte dans la direction de l’aérodrome et du parc à fourrages. La moitié du ciel est en feu.

Ce matin, dans toutes les maisons, les allemands prévoyant leur départ, ont réquisitionnés « sous peine de mort » tout ce qui restait encore de bidons d’essence. Ils s’en sont servis pour mettre le feu aux quatre points de la ville avant de la quitter.

Le vent gémit, lugubre, à travers les fenêtres sans vitres de la maison.

Le crépitement des mitrailleuses, des coups de fusil tout proches, résonnent encore dans la nuit.

Anxieux, nous observons le ciel tout rouge par-dessus les toits, et les nuages cuivrés et livides qui montent à l’horizon. Quelle nuit après quelle journée !…

Journal de Juliette Maldan, grand-tante de François-Xavier Guédet, retranscrit par lui-même.

Louis Guédet

Samedi 12 septembre 1914

7h1/2 matin  Je recopie les quelques lignes que j’ai écrite dans la chambre n°21 de l’Hôtel du Lion d’Or comme otage.

8h20 vendredi soir  J’arrive au Lion d’Or. Je cause avec un petit caporal qui a été à St Étienne (Loire) dans les rubans : à toi Brimbonais ! (André Benoiston) du reste il connait la maison Benoiston, qui me vise mon nouveau sauf-conduit pour Reims et les environs. Le caporal nous présente le Commandant Lindig, car depuis 1h on a déposé le Springmann pour nous rendre le Lindig !! Peu m’importe !

On nous conduit ensuite à nos chambres au 1er étage sur la place de la Cathédrale, en face du bas-côté droit. Le n°24 échoit à Rohart et Lejeune, le n°21 à Fréville et à moi. Il parait que les 22 et 23 sont occupés par le Prince Henri de Prusse, frère cadet du Kaiser. Nous voilà donc les voisins ou plutôt les gardiens ? d’une Altesse... (Voir le croquis des chambres de l’Hôtel du Lion d’Or). Fréville n’en est pas plus fier ! Rohart fit dans ses culottes !!

Bref enchanté d’avoir Fréville comme compagnon de chambre.

Pendant que j’écris ces quelques mots et que je fais ce croquis Fréville se couche et moi je vais en faire autant. Il est 8h1/2, bonsoir.

Du bruit toute la nuit. Allées et venues sur la place devant l’Hôtel du Lion d’Or. Automobiles arrivant, partant. Vers deux heures du matin je me réveille à tout ce bruit, plus loin vers la rue de Vesle le roulement sourd que nous entendons depuis 4 nuits. Toujours des équipages et des convois avec de l’artillerie. J’entends sonner 2h puis à 2h1/2 je me rendors. A 4h nouveau réveil, mêmes bruits. En plus de cela Fréville ronfle comme…   un trombone à coulisse ou un saxophone. Je ne le conseille pas d’être son voisin de lit ou même de chambre !! Quelle musique !! Il y  en a pour tous les goûts !! Sauf pour le mien. J’aimerais mieux le silence.

A 6h10 sonnante je m’éveille, Fréville me cause et nous nous habillons, sans nous presser, nous ne serons libres qu’à 7h du matin.

A 6h50 nous quittons notre chambre. Rohart n’a pas dormi…  je pense sans doute qu’il a eu le trac. Lejeune ne dit rien. C’est…  un modeste…  mais il n’était pas fier. Fréville à repris sa blague, la nuit fatale est passée ! Il a eu aussi peur. Moi pas ! oh ! pas du tout, sans le bruit j’aurais dormi comme dans mon lit. Pourquoi aurai-je eu peur ??

Je repasse par la cathédrale, une sentinelle garde la porte extérieurement et intérieurement. Je ressors sur la place, elle se vide de ses équipages et de ses troupes. Je rentre à la maison que je trouve…  bien…  vide…

11h matin  Impossible de tenir en place. Je sors et je rencontre mon voisin M. Legrand qui m’apprend que les allemands ont fait évacuer les habitants de Tinqueux dans le cas où on se battrait. Les Français ou les Anglais seraient donc bien près de là. Il tenait cela de M. Trousset, de Tinqueux, qui est venu lui demander l’hospitalité.

Toutes les troupes allemandes refoulent sur Courlancy.

Pris le tramway Place Royale, la rue de l’Université est bouchée, encombrée jusqu’au Lycée de blessés allemands de toutes sortes en troupeaux. Je saute du tramway place Godinot et je vois Gobert « du Courrier », courant avec Messieurs Jules Gosset, Français et un autre Monsieur. Nous entendons des coups de canons, rares. J’apprends que le curé de Ludes M. l’abbé Delozanne serait arrêté avec un autre prêtre sous le prétexte qu’ils auraient excité la population à se défendre. Il parait que le pauvre curé de Ludes pleurait à chaudes larmes. On est allé de l’archevêché demander pourquoi ils étaient arrêtés. On leur a fait la réponse que je cite plus haut en ajoutant : « Ceci regarde la Cour Martiale ».

Je reviens avec Gobert vers la Cathédrale, nous entrons, on déménageait toutes les chaises de la Grande Nef et on y déchargeait de la paille (ceci explique les sentinelles de ce matin). L’abbé Andrieux me dit qu’ils ont exigé la cathédrale, bien que d’autres locaux, usines, écoles, etc… soient disponibles. On va laisser inoccupé uniquement la partie entourée de grilles du Grand Autel et les chapelles du pourtour. 3 000 blessés sont à y caser.

Nous refilons sur l’Hôtel de Ville. Peu ou pas de nouvelles, sauf, (je l’ai échappé belle) que cette nuit un habitant de l’avenue de Paris aurait tiré sur les allemands qui l’ont arrêté (heureusement), et ont brûlé la maison du voisin : les allemands s’étaient trompés de numéro. Ce matin cet imbécile a été fusillé.

On voit des incendies un peu partout autour de Reims. On dit, que ne dit-on pas, que les français et les anglais seraient à Mont-Notre-Dame près de Bazoches, à Billy, au Mont-Saint-Pierre, tout près de Reims, à la Colonne de 1814, d’autres disent qu’ils sont à Berry-au-Bac. Cela ce ne sont que des on-dit. Je dis l’exact plus haut.

Au tournant de la rue du Cloître et de la rue Robert de Coucy, Gobert et moi nous apercevons une auto venant à toute vitesse de l’Hôtel de Ville, dans laquelle se trouvaient M. Eugène Gosset, M. Rousseau adjoint, M. Raïssac et M. Langlet se dirigeant vers l’Hôtel du Lion d’Or, la « Commandantur ». Ils étaient escortés par des soldats dans une autre auto, baïonnette au canon. Ils étaient appelés là pour donner une liste de futurs otages, pris non seulement parmi la bourgeoisie, mais aussi parmi les ouvriers dont les allemands ne paraissent pas très sûrs, surtout avec la bêtise de cette nuit.

Pendant que j’écris ces lignes plusieurs coups de canon par salve (1, 2, 3, 4, 5) successives tonnent.

Nous devrions être tranquilles, car le drapeau blanc est toujours hissé sur la Cathédrale et sur la Mairie. Une remarque : le drapeau tricolore flotte toujours à l’Hôtel de Ville. Les prussiens n’ont pas songé à le faire amener. Il est 11h20.

Le fils Renard, des Déchets, signalait à la Mairie la conduite scandaleuse de Villain, père, greffier du Tribunal civil de Reims, s’installant encore hier soir au Café du Palais avec deux grues dont la Petite Lison ? qui serait sa maitresse attitrée. Et cela pendant l’occupation Prussienne et quand il a sous les verrous son fils. Celui qui a assassiné Jaurès. Il manque absolument de sens moral, c’est un être abject !

Toujours quelques coups de canon : 1 ou 2, 3/4 à d’assez longs intervalles. Les premiers venaient du côté de l’avenue de Paris, maintenant ils paraissent venir du côté de la Porte Dieu-Lumière. Allons-nous recevoir encore des horions ? et être entre le marteau et l’enclume !

Les soldats allemands vont et viennent dans les rues comme s’il n’y avait rien.

Non, cela vient bien du côté de Tinqueux, rien du côté Dieu-Lumière.

Après les obus allemands du 4, les obus français du 12… ce serait complet.

11h40  La canonnade s’anime…

12h10  Je dis à Adèle de me faire à manger…  elle a oublié l’heure, elle est toute effarée, se frictionne les mains avec fébrilité, pas de déjeuner…  je la secoue…  je ne veux pas descendre à la cave le ventre creux s’il le faut. Je mets la table à la diable…  Une nappe s’il vous plait ! Boudin, je mange tout : veau piqué, pommes frites. Pendant tout ce temps, j’entends des coups de canon, de la fusillade du côté de Bezannes et ensuite côté de Tinqueux.

12h40  J’entends très bien les coups de fusils vers Tinqueux et les obus siffler, un tout autre sifflement que celui du 4, plus creux si je puis dire ainsi.

12h45  La pauvre Adèle ne veut pas manger. Les obus qui arrivent du côté Pont de Soissons, St Charles, Tinqueux sifflent à chaque coups, avec un sifflement semblable à un déchirement d’une                toile. Plus flou que le 4, moins aigu, moins ssion ssion ou ou !! comme diraient André et Momo.

Je distingue parfaitement le coup partant et arrivant, et si je connaissais la vitesse, je pourrais dire la distance à laquelle ils tirent. Je suis toujours à table, mon café refroidit. Pan ! pan ! deux coups. Allons, il faut que je monte voir au 2ème si je verrai quelque chose.

Ah ! si je n’étais pas père de famille, je serais déjà du côté ou ça pette (canon). Çà tourne toujours de gauche à droite par rapport à notre salle à manger où je suis à ma place ordinaire : en regardant vers le jardin dis-je, les coups progressent depuis 11h40, de gauche à droite, de la Maison Blanche, Bezannes vers Tinqueux, Maco, Champigny, Merfy, Chenay, St Thierry. En ce moment, 12h54 juste, la fusillade marche toujours vers une propagation sud-nord, vers le coin de mon jardin, côté des acacias. Çà tape – Pan ! repan – pan – repan (envoi et reçu). Certainement c’est près de Tinqueux, car quand les allemands tiraient sur nous le 4, les coups d’envoi étaient beaucoup moins près.

1h55 soir  Les mitrailleuses crépitent en face de moi qui écris sur la table de ce bon Robert ! La toile se déchire et il pleut !!!

Depuis 1h le canon tonne vers l’ouest et la bataille fait rage, on prend Reims. Les mitrailleuses font rage. Je disais plus haut ce qui s’est passé de 12h54 à 13h55. La fusillade ralentit. La canonnade aussi.

La bataille qui s’est livrée depuis 1h a eu lieu du côté droite française, gauche allemande. Voici la ligne d’après la carte (ça donnait comme canonnade…).

Lignes françaises : rive gauche Vesle française. Hauteurs de : Ville-Dommange, Jouy, Pargny, Coulommes, Vrigny, Gueux, Rosnay, Courcelles, Sapicourt où je voyais très bien le Château Lüling.

Lignes allemandes : rive droite Vesle. Hauteurs : Tinqueux, Champigny, Maco, Merfy (St Thierry, Pouillon ??), Chenay, Trigny, Butte de Prouilly, Prouilly.

Flambent ! et je voyais très bien les coups accusés : Pargny ou Coulommes, Rosnay 3 obus. Lignes allemandes : les marais de Vesle, Trigny, Chenay. Je voyais très bien les shrapnels éclater en l’air, au-dessus de la plaine de Vesle. Et la canonnade continue, et les mitrailleuses tirent sur nous face au fond du jardin sud-ouest, en ligne droite de la fenêtre où je suis, Rosnay, Courcelles, Sapicourt. Et les mitrailleuses jouent toujours leur air funèbre !!

2h10 soir  Cela s’accentue sur Reims côté Tinqueux, La Haubette et les mitrailleuses, çà se rapproche. Côté Chenay, Trigny, c’est loin.

J’ouvre une parenthèse, au moment où j’avais été sur la terrasse du Petit Paris voir les feux qui à la fin ne formaient plus qu’une fumée. Dans la plaine entre rive gauche et rive droite de la Vesle, je vis un peloton de malheureux citoyens encadrés baïonnette au canon par les prussiens, enlevés comme otages. Par la pluie battante on ne voyait que leurs parapluies à ces pauvres gens. Cahen et Fribourg sont du lot, chacun son tour, hier soir c’était moi. Dieu soit béni, je reverrai les miens, j’en suis sûr. La Vierge nous protège trop pour que je n’en sois pas sûr, ce sont chaque moment miracles sur miracles.

2h1/4   Et toujours les mitrailleuses et le canon. Je suis les coups, si seulement je pouvais être sur un toit élevé ce serait fort intéressant.

Mon pauvre Roby tu ne te doutais guère que ton encrier et ta table et ton encre remplis il y a…  allons que je regarde sur le calendrier…  il y a samedi 2 semaines presque heure pour heure puisque je t’ai reconduis à St Martin à 2h56, et qu’il est 2h24 exactement. Votre pendule retarde mes petits Grands Jean et Robert car elle sonne à l’instant 2h, je vais l’avancer et la remonter pour qu’elle n’oublie pas de sonner l’heure française ! l’heure de la délivrance. La captivité aura été courte, Dieu soit béni.

C’est fait ! la pendule est remise à l’heure elle est remontée ! Les mitrailleuses font rage du côté Ormes, Thillois d’après la carte et il y a une mitrailleuse allemande qui m’agace du côté de Ste Geneviève, Porte de Paris, La Haubette, ce qu’elle m’agace toujours la même !! Pan ! pan ! pan ! pan ! pan ! pan et des coups de fusil. Je remarque que chaque décharge de mitrailleuse dure 7 secondes, avec des intervalles… (en blanc). Plus rien du côté rive droite. Oh ! cela retonne et les obus rechantent, ou n’est-ce pas plutôt des schrapnels, car ce bruit est bien différent de celui des obus du 4 septembre 1914.

2h29  Je me suis mis dans la chambre des Grands, car de là j’entends parfaitement tous les coups et la canonnade et la fusillade. (Zut, arriverai-je à ne pas me tromper dans l’orthographe de canonnant, 2 n mon cher !! Pardon de la parenthèse). Pendant cette parenthèse, çà pétarade, çà fusille et çà tonne ! Mon Dieu ! Cela ne peut m’effrayer, si seulement je pouvais aller voir, mais je suis Père de 5 enfants, sans cela ! que je serais là-bas aux premières loges. J’ai manqué ma vocation, j’aurais du être militaire !!

Je jette mon regard sur le théâtre. 2, 3 ou 4 camions qui hésitent au théâtre entre côté Paris et côté Berlin, c’est ce dernier qui l’emporte. Bataille d’infanterie en ce moment,  à ma gauche toujours ma sale bête de mitrailleuse,  si j’y étais ça ne durerait pas longtemps.

2h40  Quelques coups de fusils, la mitrailleuse marche par saccade (par coups saccadés veux-je dire). Un coup de canon de temps en temps, si seulement je pouvais distinguer les coups de canons français de ceux des allemands !! Je marquerais les coups ! Ma satanée mitrailleuse (à ma gauche) tire coups par coups par 2 coups. Boum à droite, le Brutal retonne !! oh ! oh ! mon cher amour de mitrailleuse, je crois que tu vas cesser cette fois ta chanson. Non, elle recommence, la Rosse !!

Je crois que je vais aller chercher mon drapeau !

2h3/4  Oh ! ça reprends côté St Brice, le canon, à gauche des tirailleurs tirent, comme à la cible, coup à coup !!

Je n’entends plus ma vieille connaissance ! La sale bête, elle reprend… Zut ! Je la laisse tranquille.

2h55  Je remonte à ma fenêtre (la chambre d’Augustine). Ça tonne toujours sur ma droite, côté Cormicy ! coups de canon, et à gauche les coups de fusils, et ma sacrée mitrailleuse ! qui est du côté droit, St Thierry ou Maco, c’était  l’écho qui m’envoyait sa musique à gauche.

Bref, nous avançons et ils…  reculent en attendant la bataille de Corbeny ou de Berry-au-Bac.

3h  Crépitation de fusillade, passée du côté français. Quelques coups de canons français. Je commence à les distinguer. Nos coups de canon à nous sont secs, un peu plus forts qu’un coup de fusil, et on entend un bruissement  sion  sion  on !  Tandis que les canons prussiens tonnent lourds comme eux. Oh ! en ce moment crépitement général sans un arrêt, c’est un roulement continu de coups de fusils. Je signale ce crépitement par des traits télégraphiques ………. ……. …….. ….. ……… …….  …… ……… arrêt, reprise !…  Tout le tremblement ! en amont (3h04) quelques secondes mais ils reculent !! Quelques coups de fusils en sourdine ! Oh ! ça recommence, les feux de salve ! C’est une bataille et une vraie !

J’entends ma vieille connaissance, du côté de St Brice.

6h05 soir  N’y tenant plus, vers 3h1/4, et voulant voir, comme je savais que des couvreurs travaillaient chez M. Rogelet rue de Talleyrand, j’y vais, et le concierge me dit : « Mais on voit très bien de la toiture de M. Georget, et les couvreurs, et les couvreurs de chez nous peuvent très bien vous y conduire… »

Bref avec un brave couvreur et avec une échelle nous descendons chez M. Georget, nous grimpons dans les combles et de là sur le toit lui-même, couvert en zinc. On s’assied et là je suis aux premières loges…

La ligne de combat est bien celle que je supposais. Nos troupes tiennent tout le faîte des côtes de Montchenot à Sapicourt, St Brice et probablement plus loin car je ne peux voir plus loin. Les Allemands, les hauteurs de St Thierry à Trigny, Prouilly et plus loin. Bref c’est le passage de la Vesle qui se dispute et se disputera depuis 11h du matin jusqu’à maintenant. Le canon fait rage.

Du côté rive droite : Tinqueux, Chenay, Maco, Merfy (?) flambent et plus loin sans doute Prouilly, Trigny, Chalons-sur-Vesle.

Du côté rive gauche, Bezannes, Ormes, Thillois, Rosnay, Janvry, Gueux, Vrigny, Pargny, (Coulommes ?), Les Mesneux ensuite, par une courte attaque qui se dessine vers 4h1/2. Alors flambent  Sacy, Villers-aux-Nœuds, Écueil, Champfleury, peut-être Trois-Puits. Ville-Dommange ne paraît rien avoir.

Je descends à 5h de mon observatoire et la bataille reprend, terrible, jusqu’à maintenant encore.

En bas, dans la rue, les allemands paraissent se replier vers l’est, en ce moment l’infanterie passe, et le canon se rapproche fort, allons-nous être obligés de descendre à la cave (6h20).

Je lis une affiche verte : 80 otages sont réunis au Grand séminaire, menacés d’être pendus si nous bougeons. Mon pauvre Beau-père est encore pris avec le Maire. Reçu les 2 cartes ci-jointes (voir annexes). Que va-t-il lui arriver ? Je tremble pour lui et nous ? Est-ce qu’ils vont brûler Reims ? Ils sont capables de tout. Que Dieu nous protège !

Mon Dieu que je suis heureux que ma pauvre femme et mes chers petits ne soient pas là, ils seraient morts de frayeur !

Voilà 7h1/2 de bataille, et que je ne cesse d’entendre le canon et la fusillade ! C’est comme le tonnerre, sans discontinuer.

6h25  Plus rien, allons-nous avoir la Paix avec tout ce bruit ?

6h50  Le canon tonne toujours au même endroit, mais par intermittence. Pluie battante depuis 1 heure. Nos pauvres blessés !! Les pauvres environs de Reims, brûlés, saccagés !! Adieu les belles propriétés : Messieurs les rémois et Mesdames les rémoises qui avez surtout pensé à vous amuser, à jouir !! Le feu purifie tout.

6h51  2 coups de canon ! on ne voit plus clair – 5 coups – 3 coups –

6h53/6h54  1 + 1 = 2 coups (je me dis : ce sont les derniers) 8 heures de bataille sans discontinuer.

Je descends dîner !! 7h1/4 encore le canon, 4 coups, plus 1, plus 1, le dernier jusqu’à présent, et j’espère de la nuit.

7h55  Il pleut à torrent. Pauvres chers blessés, les nôtres, car les leurs oh ! non ! ma charité ne peut aller jusqu’à les plaindre. Il faut laisser passer la justice divine et je crois qu’elle passe partout, oui elle passe, est passée aujourd’hui ! Que de choses aurai-je à rapprocher !!! On en faisait la fête, il y a des ruines et du sang, à nos portes, à vue de jumelles !! Singulier spectacle ! auquel j’ai assisté depuis 3h1/4 ou 3h1/2 jusqu’à 5h, je ne pouvais m’en détacher. Sur le ciel sombre, nuageux, orageux, presque tout se dessinait très bien, à part le moment où les incendies obscurcissaient l’horizon, fumées de toutes sortes, de tous points ! Éclatement de shrapnels explosant en l’air comme des feux d’artifices, des feux de Mort ! Non, c’est un spectacle inoubliable !

8h10 soir  Parenthèse, riez !! : Adèle m’arrive comme une folle ! « Monsieur tout brûle !! » avec ses bras elle désigne tous les points cardinaux !! « Venez voir dans ma chambre ! » et des soupirs à faire culbuter les tours de la cathédrale ! Je monte, en effet le ciel est rouge côté Nord-Est. Ce doit être l’aviation ou Bétheny qui brûle le G.P.C. de ces bandits en attendant les autres sans doute demain ! C’est dans leur sang ! Il faut qu’ils voient rouge toujours !! Le jour : du sang ! la nuit : la lueur rouge des incendies !!

Fermez la parenthèse et reprenons où nous en étions 12 lignes plus haut s’il vous plait, et comptez si vous voulez !

9h  Toujours même lueur vers Bétheny qui baisse et reprend. Le gardien de l’Indépendant dit que c’est le Parc à Fourrage du Petit-Bétheny et non l’aviation. Je crois qu’il a raison par l’orientation en me souvenant quand les aéroplanes baissaient de ce côté plus à gauche. Quelle pluie diluvienne !!

10h  L’incendie du parc à fourrage continue. De la chambre de Marie-Louise par contre, côté ouest le jardin est éclairé d’une lueur blafarde et une odeur de fumée vous prend à la gorge. Ce sont les incendies des villages environnants, car le vent vient de l’ouest.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Paul Hess

Dès 4 heures du matin, le canon recommence à tonner à proximité de la ville ; on entend encore mieux qu’hier la fusillade et les mitrailleuses.

La canonnade s’accentue de plus en plus ; nous nous rendons compte qu’un terrible duel, entre les pièces de différents calibres, est engagé depuis le petit jour.

Les rafales de coups de canon paraissant d’instant en instant moins éloignées, j’ai la curiosité de m’assurer, à plusieurs moments de la journée, si nous ne nous faisons pas illusion à ce sujet. Non, car j’ai pu voir parfaitement, à l’aide d’une jumelle, du haut des magasins de l’établissement, les nuages de fumée de l’artillerie, dans la direction des Mesneux et constater qu’ils se rapprochaient.

Quelquefois, les détonations deviennent si violentes que toutes les vitres tremblent aux fenêtres de notre appartement ; certains coups font vibrer la maison tout entière. Il paraît, d’ailleurs, que les Allemands sont près de la Maison-Blanche et que les troupes françaises viennent de la montagne de Reims.

Dans le courant de la matinée, vers 11 heures, on est venu de la maison Minelle, dire aux ouvriers occupés à la pose des vitres, dans nos magasins du mont-de-piété, de rentrer chez eux.

Reims est désert. Chacun attend chez soi les événements.

– Le journal Le Courrier de la Champagne de ce jour, samedi 12 septembre 1914, avant tout article, a imprimé en lettres majuscules ce qui suit, sans titre, dans sa première colonne :

« Quelles que soient les impressions intimes que peuvent éveiller les nouvelles, vraies ou fausses, qui circulent à tout instant, il est nécessaire que la population reste absolument calme et réservée ; il y va de sa dignité comme de sa sécurité.

Les événements présentent souvent des alternatives diverses, tant que des solutions définitives ne sont pas intervenues.

La ville de Reims, ouverte aux mouvements de troupes et désireuse de rester en dehors de toute action militaire, doit se montrer correcte et déférente vis-à-vis des autorités et des troupes allemandes, hospitalière et bienveillante pour les blessés, comme elle l’a été jusqu’ici. »

En deuxième page, il rappelle aux habitants qu’

il est formellement interdit de stationner et de former, sans aucun prétexte, des attroupements sur la voie publique, notamment dans les grandes artères et sur les places publiques, où les troupes sont appelées à circuler ou à cantonner.

Dans un court article, faisant suite à son entrefilet d’hier, il dit encore, sous ce titre :

« A propos des moteurs du champ d’aviation

Nous pouvons ajouter à notre information d’hier, qu’au moment de quitter leurs hangars, nos aviateurs ont retiré des moteurs une pièce importante, ce qui en empêche le fonctionnement. C’est ainsi, du reste, que l’on procède pour les pièces d’artillerie que l’on est obligé de laisser entre les mains des ennemis ; on en retire les culasses pour les rendre inutilisables. »

Il nous apprend, en outre, que le troisième fils du Kaiser, Prince Auguste-Guillaume, se trouve à Reims depuis deux jours, qu’il est descendu au Grand-Hôtel, où il occupe, au premier étage, la chambre n° 23 et qu’en raison de sa présence, les abords de l’hôtel sont sévèrement interdits à la circulation.

– Vers 15 heures, un nouveau roulement de voitures se fait entendre. De nos fenêtres, sur la rue de la Grue, nous voyons remonter la rue Cérès par une longue file d’autos, caissons, etc. ; elle est suivie de cavaliers puis de fantassins et d’artillerie, enfin d’un mélange assez confus des armes, donnant cette fois l’impression d’une retraite précipitée.

Une demi-heure auparavant, six soldats d’infanterie étaient arrivés chez une voisine d’en face, Mme Erard et cela m’avait donné à penser, tout de suite, que mon tour d’héberger des Allemands n’allait pas tarder. Jusqu’à présent, j’étais plutôt surpris de n’en avoir pas eu à recevoir, soit pour les voir effectuer des réquisitions dans nos magasins, soit pour les loger. Je me crois donc obligé de demeurer chez moi, à attendre, lorsqu’un coup de sonnette au n° 12, encore chez la même voisine, m’attire à la fenêtre.

Je reconnais, tandis qu’il attend qu’on ouvre, un cycliste militaire qui avait amené là, tout à l’heure, les fantassins et qui revient sans doute les chercher, puisque tous sortent presque aussitôt. Ces soldats discutent un moment sous nos fenêtres, le temps de remettre leur sac au dos, et s’en vont. Il devient évident que cela ne va décidément plus pour l’armée allemande. Je vais dont être sûrement exonéré de logement et, du coup, je ne puis que me réjouir du contretemps survenu si vite pour troubler la quiétude de ces hommes.

Les troupes diverses continuent à passer, rue Cérès, l’infanterie chantant sans enthousiasme, comme elle chantait le 4, en faisant son entrée dans Reims et je m’aperçois que nos quasi-voisins d’une demi-heure à peine, ont été prévenus rapidement d’avoir à suivre les derniers éléments de la colonne qui part, cette fois, presque en cohue.

A distance, nous avons remarqué, dans le défilé, encadré de nombreux soldats baïonnette au canon, un groupe très important de civils, la plupart marchant avec leur parapluie ouvert, en raison du mauvais temps, ce qui nous a empêchés de les reconnaître. Nous sommes fortement intrigués, nous demandant quels sont ces hommes et où on les conduit, mais nous apprenons plus tard qu’il s’agissait des otages.

Les autorités militaires allemandes, après s’être assurées, dans la matinée, à la mairie, des personnes du maire, M. le Dr Langlet et de M. Bergue qui lui servait d’interprète, qu’elles conduisirent immédiatement au Lion d’Or ; de celles de Mgr Neveux et de M. l’abbé Camu, qui s’étaient présentés à la Kommandantur, en vue d’intervenir au sujet de l’arrestation arbitraire de deux prêtres du diocèse, avaient demandé l’élaboration rapide d’une liste de cent noms, à choisir dans tous les milieux sociaux et dans tous les partis politiques. Cette liste avait été établie avec l’aide de MM. Eug. Gosset, président de la chambre de commerce, Rousseau, adjoint au maire et Raïssac, secrétaire en chef de la mairie – pas assez vite, au gré des Allemands – car le temps pressait, et avant même qu’elle ne fût complètement terminée, ces messieurs furent obligés d’aller chercher les futurs otages à leur domicile, escortés de soldats en armes.

Une proclamation, portant la liste des otages désignés, avait été rédigée et traduite en français, pour être imprimée aussitôt et placardée. Elle disait ceci :

« Proclamation

Dans le cas où un combat serait livré aujourd’hui ou très prochainement aux environs de Reims ou dans la ville même, les habitants sont avisés qu’ils devront se tenir absolument calmes et n’essayer en aucune manière de prendre part à la bataille. Ils ne doivent tenter d’attaquer ni des soldats isolés ni des détachements de l’armée allemande. Il est formellement interdit d’élever des barricades ou de dépaver les rues, de façon à ne pas gêner les mouvements des troupes, en un mot de n’entreprendre quoi que ce soit qui puisse être d’une façon quelconque nuisible à l’armée allemande.

Afin d’assurer suffisamment la sécurité des troupes, et afin de répondre du calme de la population de Reims, les personnes nommées ci-après ont été prises en otages par le commandement général de l’armée allemande. Ces otages seront pendus à la moindre tentative de désordre. De même, la ville sera entièrement ou partiellement brûlée et les habitants pendus si une infraction quelconque est commise aux prescriptions précédentes.

Par contre, si la ville se situe absolument tranquille et calme, les otages et les habitants seront pris sous la sauvegarde de l’armée allemande.

Par ordre de l’autorité allemande,
Le maire, Dr Langlet.
Reims, le 12 septembre 1914″

La deuxième partie de cette proclamation était en italiques et le passage « ces otages seront pendus », avait amené des protestations de la part du maire et de ceux de nos concitoyens collaborant à la rédaction ou à sa traduction. Ils avaient demandé, paraît-il, que conformément aux lois de la guerre, cette expression fût remplacée par « seront fusillés » – mais satisfaction ne leur avait pas été donnée. La dite proclamation était suivie de la liste des noms de quatre-vingt-un des habitants de Reims ; elle se terminait, après le dernier nom, de celui de M. l’abbé Maitrehut, par ces mots « et quelques autres ».

En même temps que la publication de cette liste, un nouvel appel à la population rémoise était également affiché. Voici son texte :

« Appel à la population rémoise Chers concitoyens,

Aujourd’hui et les jours suivants, plusieurs d’entre vous, notables et ouvriers, seront retenus comme otages pour garantir vis-à-vis de l’autorité allemande le calme et le bon ordre que vos représentants ont promis en votre nom.

Il y va de leur sécurité, de la sauvegarde de la ville et de vos propres intérêts que vous ne fassiez rien qui puisse démentir ces engagements et compromettre l’avenir.

Ayez conscience de votre responsabilité et facilitez notre tâche.

Hommes, femmes, enfants, restez le plus possible dans vos demeures, évitez toute discussion.

Nous comptons que vous serez à la hauteur de la situation. Tout attroupement est absolument interdit et sera aussitôt dispersé.

Les adjoints : L. Rousseau, Dr Jacquin, Em. Charbonneaux,  J. de Bruignac  »
Le maire :  J.B. Langlet

Un certain nombre de ceux dont les noms avaient été portés éventuellement sur la liste des otages, n’ayant pas été trouvés à leur domicile, furent remplacés d’urgence par d’autres habitants désignés pour les suppléer et c’étaient ces malheureux, retenus au dernier moment, que nous venions de voir emmener.

Ils ne savaient s’ils partaient pour longtemps, lorsque arrivés à peu près à un kilomètre au delà du passage à niveau de Witry, sur la route de Rethel, l’officier qui les surveillait leur fit faire halte pour se ranger au bord de la route, puis s’adressant au maire, il dit quelques mots parmi lesquels ils retinrent surtout ceux-ci :

« Il n’y a pas eu de désordre à Reims ; vous êtes tous libres. Vous pouvez rentrer chez vous. »

On peut imaginer la joie qu’éprouvèrent instantanément ces pauvres gens qui ne pensaient pas recouvrer sitôt leur liberté. Aussi, quelque-uns d’entre eux voulant en jouir immédiatement, tentèrent-ils de rompre tout de suite le contact en s’égaillant dans les champs, malgré la pluie, mais des soldats lancés à leurs trousses, leur firent rebrousser chemin par la route, que les troupes suivaient encore et qu’ils reprirent en sens inverse pour rentrer à Reims. Les plus âgés étaient exténués. Le Dr Langlet, très fatigué, devait être soutenu par les deux bras.

Les Rémois, otages de fait, avaient eu de terribles angoisses au cours de cette longue journée. Leurs noms ne correspondant plus exactement avec ceux portés sur la liste faisant suite à la proclamation affichée dans l’après-midi, furent cités dans les numéros du Courrier de la Champagne, des 13, 14 & 15 septembre 1914. D’après ses indications et sauf omissions qui seraient infiniment regrettables, le cortège emmené par les Allemands était composé de : M. le Dr Langlet, maire, Mgr Neveux, M. l’abbé Camu, M. l’abbé Andrieux, MM. Mennesson-Dupont, Demaison, Bataille, Lapchin père, Guernier, Pérot, Ducrot, Menu, P. Jolly, Weiland, Mathieu, Bernard-Cahen, Lorin, Cahen Edouart, Fribourg, Fournier, Pétrement, G. Bonnet, Mars-Antony, Patoux, Osouf, R. de la Morinerie, M. Farre, R. de Bary, F. Kunkelmann, Lethwaitte, Cabanis, Lemaire, Em. Wenz, Ternier, Guerlin-Martin, Pingot, Dallemand, Putz, Latarget, Benoist, Lavoine, Stever, Bouy, Suffert, Darcq, Foureaux, Reuteler, Peltier, Sarrazin débittant, Colignon, Monimart père, Coty, Charlier, Cabay, Brimont, Plichon, Catoire, Lacomblin, Robin, Dorget, Moulet, Triquenaux, Huct, Adam, Savar, Gaillard, Wilmet, Muzin, Legrand, Etienne, Boudin, Abelé, Léon Collet, de Jivigny, Drancourt, Vanier, Gaudefroy-Sichard, Kanengieser, Gomont, Vor Morteau, Benj. Mennesson, Raimbeau, Rémia ou Remier, Saint-Aubin, Touyard, Martin.

Enfin, ce samedi 12 septembre 1914 vécu au milieu d’une atmosphère de bataille toute proche, susceptible peut-être de reprendre et de continuer dans nos murs si l’ennemi n’a pas complètement abandonné Reims, se termine, pour nous dans une grande inquiétude.

Depuis le commencement de la nuit, le ciel s’est empourpré de lueurs qui s’étendent et rougeoient de plus en plus, malgré la pluie diluvienne.

Les Allemands auraient-ils mis le feu à la ville, après avoir, vers 19 h incendié les magasins à fourrage du Petit-Bétheny, qu’ils avaient arrosés d’essence ?

Malgré le désir d’avoir quelques nouvelles, j’ai évité de circuler aujourd’hui – et ce soir, à la maison, nous sommes plongés dans une incertitude complète.

Paul Hess dans La vie à Reims pendant la guerre de 1914-1918

Gaston Dorigny

Aussitôt 8 heures du matin on entend le bruit sourd du canon. Ce bruit se rapproche régulièrement et les troupes allemandes reculent après avoir, au moyen de plus de cent automobiles, emporté leurs blessés. On avait fait mettre pour eux de la paille plein la cathédrale mais ils n’ont pas eu le temps de l’occuper, devant se replier avec précipitation. A noter le passage dans l’avenue de Laon d’un convoi d’au moins 300 prisonniers français, dont plusieurs du 332e emmenés vers la Neuvillette par des allemands baïonnette au canon.

La canonnade qui ne cesse de faire rage se rapproche sans cesse et ne se termine qu’à six heures ½ du soir – Reims s’endort à la lueur des incendies allumés par les Allemands dans trois endroits différents et principalement au parc à fourrage qui est entièrement détruit.

C’est après une bataille de dix heures sans arrêt que la population peut essayer de se reposer.

Gaston Deorigny

Paul Dupuy

Encore grand va-et-vient dans la nuit du 11 et 12.

Dans la soirée d’hier on a tiré, avenue de Paris, sur les Allemands, ce qui a failli nous amener de terribles représailles ; mais le coupable ayant été saisi et fusillé, et sa maison brûlée, il y a tout lieu, ce matin, d’espérer que l’incident est terminé.

Ceci incite le commandant d’armes à exiger de la Municipalité une liste d’otages éventuels comportant des noms de toutes les classes de la société, et principalement d’ouvriers, car c’est dans l’un de ces derniers qu’il voit le coupable de l’attentat de la veille.

C’est à ce titre d’otage que Mr Guédet, accompagné de M.M. Fréville, Lejeune et Rohart, a passé la dernière nuit au Lion d’Or ; ces notables encadraient la chambre dans laquelle reposait le prince Henri de Prusse, cousin de l’Empereur.

Dès 8 heures une canonnade lointaine commence à gronder ; elle ne doit durer que jusque 19H15 allant toujours en progressant et finissant à tonner sans une minute d’interruption à partir de 11 heures. Les mitrailleuses sont aussi de la partie, et comme c’est tout à l’entour immédiat de Reims que se livre cette bataille, la situation n’est vraiment pas gaie pour ceux qui ne peuvent que se terrer chez eux dans l’ignorance de la conclusion du combat.

Les rues ne sont parcourues que par les troupes et services allemands qui exécutent en bon ordre, en chantant même, leur mouvement rétrograde.

À 17H un automobiliste du service municipal vient afficher en face du 23 une proclamation, sur papier vert, menaçant de pendaison pour les individus et d’incendie pour le quartier toute entrave qui serait apportée par les civils aux évolutions des troupes.

Avec les lueurs de deux incendies aperçues à 21 heures, ce sont les seules nouvelles que nous ait apportées cette lugubre journée.

Paul Dupuy - Document familial issu de la famille Dupuis-Pérardel-Lescaillon. Marie-Thérèse Pérardel, femme d'André Pérardel, est la fille de Paul Dupuis. Ce témoignage concerne la période du 1er septembre au 21 novembre 1914.

Source : site de la Ville de Reims, archives municipales et communautaires

Juliette Breyer

C’est aujourd’hui samedi. Toute la journée on a entendu très fort le canon. Il se rapproche. D’anciens disent qu’il va y avoir une bataille dans Reims.

M. Viot me conseille de me rendre chez Pommery avec mes parents. Lui y a conduit sa femme. Je suis longue à me décider mais je pense à André : il faut que je le mette à l’abri, surtout si ce n’est que pour une journée. Ton papa me le conseille aussi.

Il est deux heures après-midi. Je prends quelques conserves et je m’en vais. En passant devant le 22e, quelques Allemands sont assis sur le pas de porte. Un garde civil qui est avec eux pour leur servir d’interprète et qui d’habitude travaille chez Mignot m’aperçoit. Il traverse la route et me fait signe d’arrêter.

« Vous avez fermé votre magasin, me dit-il, vous avez eu raison, mais n’ayez crainte,  nous serons bientôt libres. Voyez là-bas sur la cathédrale, il y a un quart d’heure l’état-major allemand y était encore à surveiller le combat. Il n’y est plus, c’est parce que les leurs battent en retraite. D’ailleurs un chef avec qui j’étais tout à l’heure me l’a dit. Nous nous sommes laissés prendre au piège, tant pis pour nous. Mais il faut que je vous quitte car on nous regarde ».

J’avance et j’arrive chez maman. Ils m’attendent. Nous partons. Arrivés à Passini, deux Prussiens descendent en vélo. L’un d’eux s’arrête mais il s’exprime en allemand. ; nous ne comprenons pas. Enfin il sort un carnet de sa poche et c’est inscrit Nogent l’Abbesse. Ainsi c’est la route de Nogent qu’il demande. Nous n’avons pas le temps de lui répondre : un convoi de munitions sans doute monte la route de Chalons et celui qui est en tête vient de rappeler les deux cyclistes. La route, ils la connaissent mieux que nous. En dix jours ils ont eu le temps de connaître les alentours.

Nous rentrons chez Pommery. On s’installe le mieux possible dans le fond du cellier Jeanne d’Arc et nous attendons les évènements. Les Prussiens qui étaient à la maison sont partis aussi. Mon dieu, que tout cela est long.

La canonnade continue toujours. A six heures on a fermé toutes les portes et défense de sortir. Alors nous voilà forcés de passer la nuit là. On nous arrange le mieux possible et à contrecœur nous nous couchons. Encore bon que j’avais pris des affaires chaudes à André.

Enfin aussitôt le jour on vient nous apprendre que l’on a vu des chasseurs à pied dans Sainte-Anne. Alors tout le monde s’en va joyeux et on n’entend plus que « Vivent les Français ».

Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) - Lettres prêtées par sa petite fille Sylviane JONVAL

De sa plus belle écriture, Sylviane Jonval, de Warmeriville a recopié sur un grand cahier les lettres écrites durant la guerre 14-18 par sa grand-mère Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) à son mari parti au front en août 1914 et tué le 23 septembre de la même année à Autrèches (Oise). Une mort qu’elle a mis plusieurs mois à accepter. Elle lui écrira en effet des lettres jusqu’au 6 mai 1917 (avec une interruption d’un an). Poignant.(Alain Moyat)

Il est possible de commander le livre en ligne

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Dimanche 12 septembre

Activité d’artillerie en Artois (Neuville, Roclincourt, sud d’Arras), et au sud de la Somme, aux environs de Roye.
Entre Somme et Oise, lutte de mines (Fay). Nous avons bombardé les tranchées et travaux ennemis.
Sur le canal de l’Aisne à la Marne, les Allemands ont tenté, à deux reprises, un coup de main, près de Sapigneul. Ils ont été repoussés.
Combats à coups de bombes et de pétards en Argonne, à Saint-Hubert et aux Courtes-Chausses.
Canonnade à l’est des Eparges et en Lorraine (Arracourt, Parroy, Leintrey, régions de la Loutre et de la Vezouse).
L’Allemagne a adressé aux États-Unis une réponse qui constitue une sorte de défi au sujet de l’Arabic. Elle prétend que l’Arabic avait voulu attaquer le sous-marin qui l’a torpillé.
Les Russes contiennent victorieusement l’ennemi sur tout le front de la Drina au Sereth. Ils ont même repris l’offensive sur quelques points et capturé 5000 Autrichiens en Galicie.
Le gouvernement russe négocie avec le parti progressiste de la Douma au sujet des remaniements d’ordre constitutionnel à opérer.
Une fois de plus, mais sans fournir une preuve sérieuse, la presse allemande donne l’accord turco-bulgare comme conclu.
Le cargo-boat Aude a été torpillé en Méditerranée. Il n’y a pas eu de pertes de vies humaines.

Source : La Grande Guerre au jour le jour