Louis Guédet

Vendredi 15 juin 1917

1007ème et 1005ème jours de bataille et de bombardement

7h soir  Nuit calme. Temps de chaleurs torrides. Rien de saillant, la journée monotone, courrier assez chargé. J’ai répondu à tout, sauf une lettre qui sera pour demain, je suis trop las. Après-midi fait quelques courses, dont une à l’Hôtel de Ville (Caves) où j’ai rencontré Raïssac qui m’a parlé de remise de valeurs que l’autorité militaire voulait faire au Maire pour la Caisse des dépôts et Consignations, valeurs soi-disant trouvées par des soldats dans les décombres de la ville. Pourquoi pas dans les rues ? mais comme par hasard ces valeurs n’en n’ont aucune, les bonnes ont été mises en lieu sûr par les galonnés sans doute ! J’ai dissuadé à Raïssac de laisser le Maire accepter le dépôt. C’est un piège, car l’autorité militaire déchargerait ainsi sa responsabilité, et lorsqu’on lui reprocherait les pillages, elle s’écrierait candidement : « Comment, nous, piller ! nous, pillards ! mais chaque fois que nos hommes ou nous-mêmes, avons trouvé des valeurs, nous les avons religieusement, rigoureusement remises au Maire de Reims !! Et vous osez nous reprocher des pillages !! etc…  etc… Et le tour serait joué. J’ai dit à Raïssac de répondre à ces galonnés retors qu’il les refusait, n’ayant pas qualité pour les recevoir. Les galonnards se débrouilleront, et conserveront la responsabilité entière de leurs vols…  S’ils s’adressent à moi ils seront bien reçus, et je leur casserai le nez en leur disant que je ne peux recevoir des valeurs que de civils ou d’agents connaissant la provenance de ces lots, ou bien les trouvant moi-même j’ai le devoir de les prendre et de les mettre en sûreté à la Caisse des dépôts et Consignations, ce qui est régulier, autrement, non !

Vu Mignot, Dramas, etc…  tout ce monde fort agité, car je crois que ces jours-ci on doit leur accorder leur décoration. Grand bien leur fasse. Rentré travailler, voilà ma journée. Les couvreurs ont fini de déboucher les gouttières de la maison (mon refuge) des obstructions faites par les 3 obus. En attendant d’autres… Hélas !!

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Cardinal Luçon

Vendredi 15 – + 17°. Combat toute la nuit à l’est de Reims. Contre-ordre pour Ville-en-Selve où je devait aller ce matin dire la messe aux soldats pour la fête du Sacré-Cœur. Circulaire Painlevé par un soldat à 5 h. du matin, interdisant la Consécration au Sacré-Cœur. Visite au Général des Vallières qui nous en lit le texte, et nous en explique la raison. Via Crucis in Cathedrali. Aéroplanes, après-midi, visite au Général de Bouyer, à Villers- Allerand.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173


Vendredi 15 juin

Activité moyenne des deux artilleries sur la plus grande partie du front, assez violente dans la région de Craonne et au sud-est de Corbeny.

Sur le front belge, vive activité d’artillerie spécialement dans la région de Steenstraete, Lizerne et Boesinghe. Lutte de bombes vers la Maison-du-Passeur. Combat entre patrouilles au sud de Dixmude.

Les Anglais ont réalisé une marche progressive à l’est de Messines et la pression qu’ils exercent sur l’ennemi au sud de leur front d’attaque, a contraint les Allemands à abandonner une partie importante de leur système de défense de première ligne, dans le secteur entre la Lys et Saint-Yves. Poursuivant leurs avantages, nos alliés ont marqué une avance importante à l’est du bois de Ploegstaert. Ils ont également gagné du terrain aux abords de Gapaard.

Au nord de Bullecourt, et au sud de Hooge, ils ont exécuté des coups de main qui leur ont permis de ramener des prisonniers.

Combats secondaires sur le front russe.

Échec autrichien dans le Trentin, sur le plateau d’Asiago.

En Grèce, nos troupes occupent Trikala, Velestino et Volo. Constantin et sa famille se sont embarqués pour l’Italie.

Source : La Grande Guerre au jour le jour