Louis Guédet

Lundi 2 décembre 1918

1543ème et 1541ème jours

10h matin  Temps gris couvert relativement doux. Pluie ou neige. Je suis toujours bien délabré moralement ! Je suis comme un malheureux qui se noie. Je ne vois autour de moi qu’abîmes ! Nulle planche de salut ! Nul point où me diriger, me sauver !

3 heures soir  Peu de courrier. Lettre de Jean qui va mieux et espère avoir 30 jours de permission. Il vient d’avoir sa 3ème citation, et en parait content. Lettre de Robert qui ne parait pas enchanté d’aller à Saverne et Haguenau. Sa lettre fait allusion à l’accident (?) du Général Mangin ! et semble dire qu’il y aurait attentat de la part d’Alsaciens-Lorrains ? mais sa lettre n’est pas assez claire, ne voulant rien dire qui fut divulgué sans doute. Il nous dira cela dans une autre lettre probablement. (Montant un pur-sang anglais un peu craintif, ce dernier s’est emballé après avoir été effrayé par un chien faisant chuter son cavalier. La gravité de la chute du Général Mangin l’a privé de son entrée triomphale dans Metz libéré. Il se remettra heureusement rapidement) Jean ne parait pas fâché d’échapper aux 14 étapes que son régiment va faire pour gagner son cantonnement en Alsace.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

 Cardinal Luçon

Lundi 2 – Écrit au Cardinal Mercier, sur invitation du Vatican, pour le prier, s’ il était admis à la Conférence de la Paix, de rappeler la situation du Saint-Siège, et d’attirer sur elle l’attention bienveillante et équitable de l’Assemblée. Soupe à S.-Sulpice

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Lundi 2 décembre

Guillaume II a enfin et réellement abdiqué à la date du 28 novembre. Il déclare qu’il renonce pour toujours à tous ses droits à la couronne de Prusse et aux droits connexes à la couronne allemande. Il rejette, d’autre part, la responsabilité de la guerre sur ses ministres de 1914.
La situation paraît de plus en plus chancelante à Berlin où le comité des commissaires du peuple est attaqué à la fois par l’extrême gauche et par les impérialistes. Les élections à la Constituante ont été fixées au 16 février, sous réserve de ratification de cette date par le congrès général des comités ouvriers et soldats qui siégera le 16 décembre. Le groupe Spartacus s’est rendu maitre des stations de T.S.F. de toute l’Allemagne.
Les 70.000 hommes de Mackensen ont été internés en Hongrie.
La flotte russe de la mer Noire a été remise aux Alliés.
Le Danemark a décidé de poser la question du Slesvig devant la conférence de la paix.
L’amiral Koltchak, qui s’est proclamé dictateur à Omsk, et qui a fait arrêter les membres du directoire panrusse, affirme qu’ils étaient d’accord avec les bolchevistes.
Le comte Czernin, après Bethmann-Hollweg, essaie de se disculper. Il veut démontrer que si la guerre s’est prolongée, le cabinet de Berlin et Ludendorf en sont seuls responsables.
D’après les évaluations faites, 200 sous-marins allemands ont été détruits au cours de la guerre.
Le dernier budget américain s’est élevé à 40 milliards.
Le dernier emprunt français a recueilli 28 milliards.

Source : La Grande Guerre au jour le jour

Amiral Koltchak