Louis Guédet

Jeudi 26 décembre 1918

1567ème et 1565ème jours

Le Pape Benoit XV

Parti pour Reims. Madeleine a continué sur notre ville tandis que je m’arrêtais à Aÿ pour l’affaire Abelé. Vu toute la famille. Vu le Cardinal Luçon réfugié dans une petite maison de la rue de l’Ouest. Causé très longuement avec lui de son voyage à Rome. Il avait été chargé officieusement de parler de nos intérêts en Palestine et en Syrie par le gouvernement par l’entremise d’Antonin Dubost (Préfet, député, ancien ministre de la Justice, président du Sénat de 1906 à 1920 (1844-1921)). Mais comme toujours le Gouvernement ne veut pas faire les premiers pas ! Et au Vatican on se tient sur la réserve. Néanmoins Benoit XV a dit qu’il était tout disposé à faire tout ce que la France désirait, mais qu’il fallait qu’elle lui exprime ses désidératas !! Il a ajouté : « Je ferai tout ce que voudra la France, je lui donnerai un doigt de ma main, la main toute entière et le bras s’il le fallait ! » Mais ces politiciens sont toujours des sectaires. L’ambassadeur d’Angleterre près du Vatican a dit lui-même au cardinal : « Mais dites donc à vos Gouvernants d’envoyer un ambassadeur ici, je ne puis moi discuter cette question pour la France, étant dans l’occurrence votre adversaire !! »

Arrivé à Reims vers 5h1/2. Trouvé la maison Mareschal, mon ancien refuge, à peu près intact, mais dans un état de désordre indescriptible. Les Pillards étaient passés par là. Je relève des traces d’effraction sur mon coffre-fort, officiers et soldats cambrioleurs !! Ces galonnards sont complets !! Il ne leur manque plus que des rouflaquettes et des casquettes à 3 ponts !!

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

 Cardinal Luçon

Jeudi 26 – Visite de M. le Capitaine du Guerny, angevin. Mgr Neveux va à Reims

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Jeudi 26 décembre

Les journaux espagnols annoncent qu’au cours de son séjour à Paris, M. de Romanones a traité la question du Maroc.
Le gouvernement français a converti le ministère du Blocus en ministère des Régions libérées.
La première brigade de cavalerie belge est entrée en Allemagne, atteignant Dalfdorf.
Les troupes françaises ont occupé le faubourg de Nied, près de Francfort-sur-Mein.
La Chambre turque a été dissoute. On sait qu’elle était composée à peu près exclusivement de créatures d’Enver pacha.
Un envoyé polonais, M. Hompel, est arrivé à Paris.
De nouvelles instructions ministérielles ont été envoyées aux armées concernant la démobilisation.
Le président Wilson a quitté Paris pour aller visiter les troupes américaines sur le front.
M. Poincaré a quitté également Paris pour se rendre dans les Ardennes.
Un office de liquidation des stocks de guerre a été créé au ministère de la Guerre.
La délégation roumaine à la conférence de la paix aura à sa tête M. Bratiano.
Plusieurs villes sont proposées pour siège de la future Constituante allemande: Bayreuth, Cassel, Erfurt, Weimar, Nuremberg.
100.000 officiers allemands ont formé une ligue pour défendre leurs droits. Les marins ont tenté un coup de force à Berlin, mais ils ont été repoussés. Il y a eu 68 morts et blessés.

Source : La Grande Guerre au jour le jour