Louis Guédet

Lundi 22 avril 1918

1319ème et 1317ème jours de bataille et de bombardement

6h soir  Temps gris avec tension au beau. Travaillé toute la journée à un partage Lepitre. Pas sorti, même dans le jardin. Lettre de Mgr Landrieux qui m’envoie son sermon de Pâques sur la Paix. Très bien ! Il flagelle les égoïste et ceux qui ne sont pas sur le front. Mgr Neveux m’a adressé également sa conférence sur Reims et ses habitants durant les bombardements. Il rappelle l’incendie de la Cathédrale du 19 septembre 1914 et fixé la scène qui s’est déroulée devant la Cathédrale en feu où les habitants, principalement des ouvriers, voulaient égorger à coups de couteaux les blessés allemands qu’on faisait sortir de la Basilique pour les sauver des flammes, et l’attitude énergique de Mgr Landrieux qui les a protégés.

Il fixe cette scène devant le portail Nord. Monseigneur Neveux se trompe, la scène a eu lieu juste sur la place du Parvis, alors que le groupe des blessés était entouré des infirmiers et des dames de la Croix-Rouge, Mgr Landrieux et le maréchal des logis d’artillerie qui venait d’apporter l’ordre de les évacuer sur le Musée, rue Chanzy, sortait par la vieille porte de planches qui donnait accès au chantier de pierre de la Cathédrale, les ouvriers, une 20aine (vingtaine) environ, couteaux en main, se précipitèrent sur le groupe qui était alors à hauteur de la statue de Jeanne d’Arc, entre celle-ci et le Lion d’Or (l’hôtel). Ils criaient, gesticulaient tout en marchant et quelques 10 pas en venant sur la rue Libergier le groupe s’arrêta, et c’est à ce moment que Mgr Landrieux, en couvrant de son corps les blessés allemands qui levaient les bras en criant piteusement « Kamarad ! », ils croyaient leur dernière heure arrivée, s’écria : « Il ne sera pas dit que la France aura répondu par un crime au crime allemand ! » On parlementa longuement, puis le cortège se dirigea vers le Musée par la rue Libergier et la rue Chanzy, accompagné par les ouvriers qui criaient : « A mort ! les sauvages !

C’est au moment où le groupe était arrêté sur la place, devant la lanterne réverbère qui est là, près du chalet du photographe Rothier, et parlementait, que je relevais de ma canne le fusil d’un fantassin qui était de garde au coin de la pharmacie Boncourt (rue Libergier) et qui couchait en joue tout le groupe. Je relevais vivement de ma canne son fusil en lui disant : « Arrêtez donc ! vous voyez bien que vous risquez de tuer des infirmiers et des Français en même temps que ces sauvages-là !! »

Quand je verrai Mgr Neveux, je lui signalerai cette légère erreur de topographie.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils


Cardinal Luçon

Lundi 22 –  Ecrit au Cardinal Gasparri pour la réception des Veuves de la guerre au Vatican. Audience, et Messe du Pape le 4 mai, fête de sainte Monique. Reçu visite de M. Belleney, du Curé de Cumière. Visite de M. le Curé d’A…

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Lundi 22 avril

L’ennemi a tenté un coup de main dans la région de Hangard-en-Santerre. Des prisonniers dont un officier sont restés entre nos mains.
L’activité des deux artilleries s’est maintenue très vive entre Lassigny et Noyon.
Nos détachements ont effectué de nombreux coups de main sur divers points du front ennemi, notamment au nord-ouest et à l’est de Reims, en Champagne, dans le secteur de Juvincourt et vers les côtes de Meuse.
Nous avons fait un certain nombre de prisonniers. De son côté, l’ennemi a dirigé plusieurs tentatives, toutes repoussées, à l’ouest de la butte du Mesnil et en Woëvre.
L’artillerie ennemie s’est montrée active sur différents points du front et a entrepris, dès l’aube, sur les positions de nos alliés, à Caudescure, au nord de Merville, un bombardement violent qui n’a été suivi d’aucune attaque d’infanterie.
L’artillerie britannique a bombardé efficacement des troupes ennemies et des transports le long des routes en arrière du secteur de la Lys.
M. Sonnino a fait une déclaration au Parlement italien au sujet des maneuvres de paix de l’Autriche-Hongrie. L’Italie à cet égard, n’a cessé de demeurer en parfait accord avec ses alliés.

Source : La Grande Guerre au jour le jour