Louis Guédet
Dimanche 27 janvier 1918
1234ème et 1232ème jours de bataille et de bombardement
6h soir Toujours du brouillard, mais beau soleil l’après-midi, les jours allongent. Journée relativement calme. Si cela continue Guillaume nous aura laissé tranquille pour le jour de sa fête. Messe rue du Couchant à 7h1/2. Causé avec Sainsaulieu en sortant, il doit venir me revoir ce soir à 8h. Reçu quelques personnes pour une procuration et une notoriété faite séance tenante et ensuite pour des fonds pour une déclaration de succession.
Peu de courrier, il parait que la Censure sévit fortement en ce moment. Pas de lettres de St Martin. Sorti juste pour porter mes lettres à la Poste et acheter un journal. Journée monotone et rendue plus triste en voyant le soleil radieux de l’après-midi. Donc journée fastidieuse. Visite du R.P. Desbuquois, enchanté de mon ruban (rayé) la lettre (rayé) estime qu’il aurait mieux (rayé). Quand à (rayé).
Ma bonne part demain passer 4 – 5 jours à Cumières chez ses parents. Aussitôt rentrée je songerai à aller à St Martin.
Demain séance de Réquisitions militaires, de même jeudi 31 janvier et lundi 4 février. Aussitôt je pourrai prendre mon envolée.
Voilà tout le saillant de cette journée, c’est maigre, et lugubre. Les journaux sont insignifiants, on parle bien de troubles en Autriche, à Berlin, etc… mais qu’y a-t-il de sérieux dans tout cela, on nous a tellement bourré le crâne depuis 3 ans1/2. Je n’ai qu’un désir c’est que l’on ne nous évacue pas, et que les allemands ne cherchent pas à entrer dans Reims ! Nous avons eu assez d’épreuves comme cela sans que cette épreuve nous arrive.
Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils
Paul Hess
27 janvier 1918 – Dans L’Éclaireur de l’Est, l’avis suivant est inséré aujourd’hui :
Ravitaillement municipal — Lait.
La ville ayant assuré la production d’un supplément de lait, peut satisfaire aux diverses demandes formulées depuis le 1er décembre. Les personnes qui se sont fait inscrire au bureau de l’abattoir, peuvent retirer leur carte dans les dépôts, à partir de ce jour.
Paul Hess dans Reims pendant la guerre de 1914-1918, éd. Anthropos
Rue Lesage
Cardinal Luçon
Dimanche 27 – Nuit tranquille. Brouillard, + 2°. A midi, soleil. A 1 h. bombes (sur batteries ?). Visite de l’Attaché Commercial des États-Unis et de sa femme, présentés par le lieutenant de Jouvenel(1), personnages importants, en vue du relèvement matériel et de la reconstruction de la France, et de Reims en particulier. Retraite du mois.
Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173
(1) Le lieutenant Henri de Jouvenel était en 1914 le rédacteur en chef du Matin. En 1912, il avait épousé Colette. C’est lui qui fut à l’origine de l’inhumation du Soldat Inconnu sous l’Arc de Triomple.
Dimanche 27 janvier
Nous avons aisément repoussé un coup de main aux lisières ouest de la forêt de Saint-Gobain.
Bombardement réciproque sur le front bois des Caurières- Bezonvaux.
Notre aviation s’est montrée particulièrement active. De nombreuses prises de photographies ont été réalisées par nos observateurs qui ont survolé la zone ennemie jusqu’à 30 kilomètres à l’intérieur. Plus de 300 clichés ont été pris dans la journée.
Nos aviateurs de chasse ont abattu quatre avions allemands.
En outre, nos bombardiers ont exécuté diverses opérations, tant dans la journée du 25 que dans la nuit suivante. 8000 kilos d’explosifs ont été jetés sur les établissements de l’ennemi, notamment sur les gares de Thionville et de Fribourg-en-Brisgau, sur les usines de la Badische-Aniline de Ludwigshafen, les cantonnements de la région de Longuyon.
Nos alliés britanniques ont fait quelques prisonniers au sud-ouest de Cambrai.
Activité de 1’artillerie allemande contre les positions ang1aises de la vallée de la Scarpe.
Les aviateurs anglais de la marine ont exécuté un raid de bombardement sur l’aérodrome ennemi de Varsenaere.
La Délégation autrichienne a voté la confiance au comte Czernin.
On sait maintenant qu’à la commission du Reichstag, les socialistes Scheidemann et Ledebour ont vivement attaqué le discours de Hertling.
Source : La Grande Guerre au jour le jour