Louis Guédet

Lundi 24 décembre 1917

1200ème et 1198ème jours de bataille et de bombardement

1h1/2 soir  Couché en bas, assez bien dormi. Quelques bombes et vers 5h du matin bataille. Temps horriblement froid. Des nuages de neige roulent dans le ciel, il fait glacial, je suis grelottant. Travaillé ! travaillé ! quand même. Courrier assez tard, rien à répondre rapidement, mon retard est rattrapé ou à peu près. Lettre de ma chère femme, bonnes nouvelles. Déjeuné en bas près de mes 2 bonnes, et remonté vite travailler. Je vais partir porter mon courrier et voir le papa Millet pour lui donner le reste de mon travail. Et puis j’attendrai le bon vouloir des jeunes mariés Dor ! Pourvu que le futur arrive bientôt, je pourrai ainsi partir à St Martin. (Mariage de Marie-Thérèse Dor (1895-1971) avec Marcel Ernest Charles Landragin (1896-1965))

Reçu lettre de Narcisse Thomas

6h soir  Journée glaciale, de la neige à demi-fondue mais qui reste tout de même, gare le verglas. Bonnes nouvelles de ma chère femme. Rien d’autre au courrier…  Bref je suis à jour d’aujourd’hui. J’ai donné tout le travail que j’avais à faire faire partir au Papa Millet. Je suis donc parti dès que mes futurs mariés auront signé leur contrat. Je souhaite que cela soit le plus tôt possible. Ecrit presque toutes mes lettres du 1er de l’an. Rien appris. Vu personne. Le Cardinal Luçon aurait eu un éclat d’obus dans son cabinet de travail pendant qu’il lisait. J’irais bien lui rendre visite ces jours-ci, et je saurai ce qu’il en est… Je me suis décidé à prendre mes repas dans le sous-sol près de mes 2 bonnes et de continuer à y coucher. J’y ai moins froid que dans ma chambre, et puis ayant quelqu’un près de moi j’ai une sensation de sécurité que je n’ai pas dans ma chambre, étant assez éloigné d’elles maintenant qu’elles sont au sous-sol. Tant qu’elles étaient dans la cuisine qui touche à la salle à manger où je suis installé cela allait, car je les entendais, je les sentais près de moi. C’est singulier comme ce sentiment de sentir quelqu’un près de soi vous tranquillise et vous donne une sensation de sécurité, tellement il est vrai que l’homme a besoin de société.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Cardinal Luçon

Lundi 24 – Froid, – 8°. Nuit tranquille, sauf vers 9 h. 1/2, et coups de canons, de fusils, de mitrailleuses fréquents. Vers 6 h. canonnades non loin de Reims. Visite à M. Biaise à Mencière et aux Sœurs de l’Orphelinat Rœderer avec M. Compant. M. Biaise ne sait plus où il est. Il a eu une attaque de congestion dans la rue devant la maison de M. Huart (École Professionnelle) et divague comme un homme en délire ou dément. Nuit tranquille du 24-25.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173


Lundi 24 décembre

Activité réciproque des deux artilleries sur la rive droite de la Meuse et dans la région du Mort-Homme.
L’ennemi a tenté sans succès un coup de main au bois des Caurières.
Des avions ennemis ont lancé une Quarantaine de bombes sur Dunkerque et sa banlieue. Une personne de la population civile a été tuée, trois autres blessées, dont une femme et un enfant.
Canonnade sur le front belge.
Le général Guillaumat remplace à Salonique le général Sarrail qui recevra une autre affectation.
Sur le front italien, petites rencontres d’importance locale. Au nord de Pedescala, les occupants d’un petit poste ennemi ont été surpris et anéantis.
Sur la rive gauche de l’Assa, à l’ouest de Canove di Sotto, un détachement italien, après une courte mais efficace préparation d’artillerie, et après avoir dépassé avec un mordant magnifique les défenses accessoires adverses, a fait irruption dans un poste avancé et ramené 12 prisonniers avec du matériel.
Dans plusieurs secteurs, des patrouilles ennemies ont été repoussées avec des pertes.
A l’ouest d’Osteria di Lepre, capture de prisonniers.
Échec de tentatives autrichiennes au mont Solarolo et au sommet du val Calemo. Canonnade dans la plaine de la Piave.
Les pourparlers de paix russo-allemands s’ouvrent à Brest-Litowsk.

Source : La Grande Guerre au jour le jour