Louis Guédet

Mardi 5 juin 1917

997ème et 995ème jours de bataille et de bombardement

6h soir  Beau temps très chaud, fatiguant. Nuit agitée, des avions allemands ont survolé la ville à 11h1/2, 3h, 4h1/2 et ont lancé des bombes. Mal dormi et on est fort fatigué par conséquent. Journée monotone. Quelques lettres auxquelles j’ai répondues. Je n’ai de goût à rien. Écrit à M. Henri Jadart, notre secrétaire général, pour lui dire que je n’assisterai pas à la séance de l’Académie du 15 juin. Je lui ai envoyé la situation financière qui ne change pas beaucoup, nous faisons plutôt des économies. Reçu lettre de M. Bossu mon ancien procureur, qui me demande de lui faire envoyer divers meubles et une partie de sa bibliothèque. J’y verrai au retour de Touyard, le concierge du Palais de Justice qui a les clefs. Je lui ai répondu longuement. Après-midi fait des courses : Hôtel de Ville, Chambre des notaires, Galeries pour de l’encre, cheveux, et puis rentré tuer mon temps ici. Vu à la Ville le Maire et Houlon. Bref, rien de saillant. Rencontré cependant Émile Charbonneaux qui me disait avoir vu son jardinier, Croix de Guerre, qui est devant Nauroy, et que celui-ci lui avait dit que nous étions à 200 mètres de Nauroy, et que nous occupions la route de Nauroy à Moronvilliers. Ce serait une vraie avance. Je n’ose y croire. Et puis après, ce n’est pas cela qui fera que nous serons dégagés plus tôt, hélas. Serons-nous jamais délivrés !! On nous a tellement leurrés, bernés ! qu’on n’ose plus y croire. On est aussi las ! si découragé. Comme je le disais à M. Bossu, j’ai comme jambes et bras cassées. Je reste par force d’inertie, rien de plus. Il y a comme quelque chose de cassé en moi. Je crois que je ne me relèverais jamais des épreuves terribles et douloureuses que j’ai subies depuis 33 mois, bientôt 34 !…  Trois ans de cette vie d’enfer, lugubre, épouvantable. Quelle existence. On est usé avant l’âge.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Cardinal Luçon

Mardi 5 – + 17°. Nuit tranquille à Reims, canonnade à l’est au loin. A 6 h. 30, bombes sifflantes ; item à 11 h. 30 à midi. Aéroplanes toute la journée. Envoyé lettre à imprimeur à Paris, prescrivant des prières pour fête du Sacré-Cœur. Gros coups de canons français vers 8 h. soir. Bombes rue Passe-Demoiselles ; dans le bureau de Choubey, à l’ambulance Sainte- Geneviève.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Mardi 5 juin

La lutte d’artillerie est devenue violente au nord-ouest de la ferme Froidmont. Une attaque ennemie, déclenchée sur un saillant de notre ligne, a réussi à prendre pied dans quelques tranchées avancées. Sur le front des plateaux de Vauclerc et de Californie, après leur sanglant échec de la veille, les Allemands n’ont pas renouvelé leur tentative et se sont bornés à réagir sur nos positions par un bombardement assez vif.
En Champagne, nous avons exécuté un coup de main sur les tranchées adverses à l’est du Téton. Nous avons pris trois mitrailleuses et fait des prisonniers.
Le combat au sud de la Souchez a continué sur le front britannique. L’ennemi, après avoir subi de lourdes pertes, a réussi à lancer un certain nombre de violentes contre-attaques qui ont obligé nos alliés à évacuer le terrain conquis. Ils ont fait 92 prisonniers. Ils ont fait d’autres prisonniers à l’est de Laventie et au sud de Wytschaete. Ils ont abattu quatre avions allemands.
Sur les pentes du San Marco, l’ennemi a réussi à pénétrer dans quelques éléments avancés. Il a été ensuite repoussé jusqu’à ses positions de départ, en laissant 82 prisonniers.
Les avions italiens ont bombardé des rassemblements ennemis à Santa Lucia di Tolmino et à Chiapovano.

Source : La guerre de 1914-1918 au jour le jour