Louis Guédet

Vendredi 9 février 1917

881ème et 879ème jours de bataille et de bombardement

6h soir  Toujours le  même froid sec avec lune. Heureusement que dans la journée le soleil est fort chaud à partir d’une heure après-midi jusqu’à maintenant, avec une interruption légère vers 4h3/4. Attaque et contre-attaque furieuses vers St Léonard et La Pompelle. On entendait très bien les grenades et le crépitement de la fusillade et surtout des mitrailleuses. Ce sont les Russes qui tiennent le secteur. On ne s’entendait pas par moment. Tout tremblait et nos canons tonnaient furieusement. Pourvu que nous n’écopions rien cette nuit ou demain.

Ce matin audience civile, 4 ou 5 affaires. 3 jugements rendus pour les affaires Goebel – Fontainier, que j’ai débouté tous avec chacun leurs frais, çà les rafraichira sans doute.

Après-midi sorti pour faire des courses et prendre un peu d’exercice. Attardé à l’Hôtel de Ville où j’ai bavardé avec Houlon et Martin, secrétaire du sous-Préfet ! De ces discutions et conversations sur un cas d’allocation militaire il en est résulté que nous avons découvert que jamais je n’aurais été nommé régulièrement à la Présidence des 4 commissions pour Reims. Les juges de Paix mes prédécesseurs ont pris la Présidence de Droit au début et l’on a continué les mêmes errements. Et voilà.

De fil en aiguille on a parlé du remplacement de M. Bossu Procureur de la République comme Président de la Commission d’appel pour les allocations militaire, les dossiers s’accumulent. On a demandé au nouveau Procureur s’il succéderait à M. Bossu, ou s’il déclinait. Il est convenu qu’on me proposera au sous-Préfet pour prendre cette présidence, et que Gustave Houlon me remplacera pour la Présidence des commissions cantonales.

Si le Procureur accepte, j’ai prié M. Martin de faire aussitôt le nécessaire pour régulariser ma Présidence pour la Commission cantonale. Ce sera plus régulier et plus correct. Toutefois il m’avait semblé, vu dans les nombreux décrets sur les allocations, qu’il était dit que c’était le juge de Paix de canton qui devait avoir la Présidence de ces commissions de Droit, et à son défaut telle personne, désignée alors par le Préfet ou le sous-Préfet. Je vais rechercher cela.

Je ne retrouve rien de l’article 3§1, on peut déduire que le Préfet nomme les Présidents. En tout cas mes prédécesseurs juges de Paix ont commencé, je n’ai donc fait que de continuer leur tâche. De toute façon je vais faire régulariser cette situation. De plus le Procureur de la République m’avait chargé de cette présidence. C’est plutôt drôle comme situation !!!

On parle toujours de faire un dépôt de munitions au Garage automobile de notre rue en face de l’usine Benoit. L’autorité militaire est folle !! au milieu d’une agglomération d’habitants !! C’est de l’assassinat ni plus ni moins.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Cardinal Luçon

Vendredi 9 – Nuit tranquille, sauf vive canonnade entre batteries jusqu’à minuit. – 8°. Messe non dite : rhume. De 1 h. à … canonnade d’une extrême violence ; gros canons qui ébranlent le sol et l’air, font trembler portes et fenêtres, et secouent la maison à la faire écrouler. Quid ? N’ai pas fait le Chemin de la Croix, étant malade.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Vendredi 9 février

Sur le front de Verdun, combats à la grenade et lutte d’artillerie assez vive dans la région cote 304-bois d’Avocourt. Nous avons capturé une patrouille allemande près de Bongée.

En Alsace, rencontres de patrouilles dans les secteurs de Metzeral, d’Aspach et de Seppois.

Un de nos avions a lancé 6 bombes sur les établissements militaires de Lahr (grand-duché de Bade). Une de nos escadrilles a bombardé le terrain d’aviation de Marakecke.

Les Anglais ont dirigé une attaque contre une importante position allemande au sommet de la hauteur de Sailly-Saillisel. Elle a réussi. 78 prisonniers ont été faits. Nos alliés ont progressé sur les deux rives de l’Ancre. Ils ont enlevé la ferme de Raillescourt, sur la route de Beaumont-Miraumont. Au sud de l’Ancre, enlevant une tranchée, ils ont fait 52 prisonniers. Un détachement a fait des prisonniers au sud de Bouchavesnes.

Canonnade dans les régions d’Armentières et d’Ypres. Les aviateurs britanniques ont bombardé un aérodrome.

Les Russes ont eu un succès sur les Autrichiens, près de Kimpolung, un autre sur les Turcs près de Guemisch-Kané (Arménie).

Un sous-marin allemand a torpillé le paquebot anglais California. Il y a des victimes.

Le Sénat américain a approuvé par 78 voix contre 5 la rupture signifiée à l’Allemagne par M. Wilson.

Source : La Grande Guerre au jour le jour

Bouchavesnes