Louis Guédet

Mardi 5 décembre 1916

815ème et 813ème jours de bataille et de bombardement

6h soir  Neigé ce matin, pluie, grand froid humide et pénétrant. Journée triste comme hélas beaucoup d’autres. Je suis las. Les événements ne sont pas là pour vous donner espoir, par ce que je vois aussi autour de moi et entend. Tout à l’heure en allant faire une course je traversais la place Royale et regardais les travaux de protection qu’on établissait autour des statues de Pigalle autour du soubassement de la statue de Louis XV, un mur en briques circulaire dans l’intérieur duquel on coulera du sable ou de la terre. 3 ouvriers passaient et se mirent à déblatérer sur ces travaux, disant qu’ils se moquaient pas mal qu’on protège cette œuvre d’art, qu’on n’en ferait pas autant pour eux, etc…  etc…  et qu’on verrait bien si on la démolirait quand on fouterait en bas les « borgeois ». Des soldats faisaient chorus… !! C’est la première fois que j’entends de semblables propos depuis la Guerre. C’est mauvais signe, hélas !! Tous ces bas-fonds bouillonnent, gare quand cela débordera !

La demi-page suivante a d’abord été rayée, puis découpée.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Cardinal Luçon

Mardi 5 – + 2°. Nuit tranquille. A 2 h. neige qui fondit dans la nuit et ne paraissait plus à 10 h. matin. Visite des Architectes de la Marne (qui proje­taient de doter la Cathédrale de nouvelles cloches). Visite de M. Perot. Visite à l’école de la rue du Barbâtre, S. Maurice.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

barbatre


Mardi 5 décembre

Au sud de la Somme, deux coups de main tentés par l’ennemi sur nos petits postes de la région de Barleux ont été aisément repoussés.

En Alsace, un autre coup de main, dirigé après un vif bombardement sur une de nos tranchées de l’Hilsenfirst (sud-est de Metzeral), a également échoué.

En Macédoine, les Serbes ont enlevé les hauteurs au nord de Grunista. L’ennemi s’est replié en désordre sur Slasavina.

Les Roumains ont reperdu le terrain qu’ils avaient regagné au sud de Bucarest. Une offensive germano-bulgare a été repoussée par nos alliés en Dobroudja.

Une crise a éclaté dans le cabinet britannique. La cause en est la réorganisation du Conseil de la guerre proposée par M. Lloyd George, M. Asquith a annoncé aux Communes qu’un remaniement ministériel serait opéré.

Lord Cecil a déclaré à Westminster que la responsabilité de Constantin Ier était établie dans les événements d’Athènes. Il a refusé de répondre à une question sur ce point: la dynastie sera-t-elle sauvegardée?

La canonnière française Surprise a été coulée à Funchal (Madère) par des sous-marins allemands. La ville de Funchal a été bombardée. Les forts ont répondu.

Le président Wilson et le pape Benoit XV ont prononcé deux allocutions qui constituent la condamnation des crimes allemands.

Source : La guerre au jour le jour