Louise Dény Pierson

9 mai 1916

A l’autre bout de Reims la bataille continuait et nous nous en apercevions de temps en temps. Pour nous protéger en cas de bombardement un abri sommaire avait été édifié au milieu des vignes avec des bottes de pailles et recouvert des paillassons utilisés en hiver pour protéger les ceps de la gelée.
Tout était réuni pour être grillé vif en cas d’obus incendiaires, ce qui par chance ne s’est jamais produit. Un matin, que tout à mon travail, j’étais courbée vers la terre, un sifflement, une explosion semble me soulever puis je retombe sur le sol où je reste
étendue à plat ventre, le cœur battant, écoutant le cliquetis des éclats et de la terre dans les
échalas.
Je me relève et cours vers l’abri où se rassemblent les autres ouvrières (nous étions une dizaine ayant chacune notre secteur). Leurs premières paroles furent « Ma pauvre, on t’a bien cru tuée en voyant la fumée de l’obus monter de ta place ». Une fois dans l’abri je m’aperçois que mon bracelet montre n’a plus que le boitier, verre et mouvement ont disparu.
Je n’ai jamais rien retrouvé. C’était mon cadeau de première communion !

Ce texte a été publié par L'Union L'Ardennais, en accord avec la petite fille de Louise Dény Pierson ainsi que sur une page Facebook dédiée :https://www.facebook.com/louisedenypierson/

 Louis Guédet

Mardi 9 mai 1916

605ème et 603ème jours de bataille et de bombardement

6h  Temps couvert mais beau. Bombardement vers le boulevard de la Paix fort intense. Journée monotone. Pouvant marcher, j’ai essayé de faire une promenade, je suis donc allé par l’allée des Tilleuls jusqu’à Cormontreuil avec mon laissez-passer permanent, mais arrivé à l’écluse du château d’eau j’ai été obligé de rebrousser chemin, j’étais trop fatigué. J’essaierai un autre jour. Je suis toujours fort triste, découragé. Je crois que je vais tomber malade, je suis très irritable et je sens mes forces faiblir. 21 mois de cette vie c’est lourd, dur, et cela m’a usé. Je verrai, je crois, venir la mort comme une délivrance. Car tout ce que j’ai souffert, vu, subi, supporté, affronté, m’a dégouté de l’existence. Et puis, à quoi bon se battre !! On ne peut rien contre le malheur et la fatalité.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Cardinal Luçon

Mardi 9 – Voyage à Lyon. Départ pour Paris 9 h. arrivée à S. Sulpice à 2 h.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

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Mardi 9 mai

Sur la rive gauche de la Meuse, les combats ont continué avec acharnement dans la région de la cote 304. Les tentatives furieuses de l’ennemi se sont brisées devant notre résistance et n’ont valu aux Allemands que des pertes très élevées. Une vive contre-attaque de notre part a chassé l’ennemi du boyau de la cote 204 où il s’était implanté. Nous avons fait une cinquantaine de prisonniers.
Sur la rive droite (région sud et bois d’Haudromont) nous avons rejeté les Allemands de la plus grande partie des éléments de première ligne où ils avaient pénétré la veille. Une trentaine de prisonniers, dont deux officiers, sont restés entre nos mains.
En Woëvre, lutte d’artillerie assez active.
Nous canonnons efficacement les campements au sud de Thiaucourt.
Canonnade aussi dans les bois de Rennères et du jury.
Deux avions allemands ont été abattus près de Verdun, l’un aux environs d’Ornes, l’autre au sud d’Azannes.
Bombardement intense sur le front belge, près de Dixmude.
Le cabinet de Washington délibère toujours sur la note allemande.
Guillaume II a mandé le prince de Bülow au quartier général

Source : La Grande Guerre au jour le jour