Louis Guédet
Dimanche 21 novembre 1915
435ème et 433ème jours de bataille et de bombardement
8h soir Toujours le canon formidable dans le lointain vers Moronvilliers et quelque fois vers Berry-au-Bac. Journée fastidieuse pour moi, reçu d’un coup 15 lettres auxquelles il m’a fallu répondre. Je n’ai fait que cela de la journée, je suis fatigué. Reçu de mon ancien camarade de collège Hiller, capitaine de Génie, des photographies des journées du 25 septembre 1915 et suivantes, vers le Bois de la Roquette, l’Épine de Vedegrange (près de Souain dans la Marne). Elles sont fort intéressantes et bien rendues. Demain anniversaire de la mort de mon pauvre ami Mareschal. Cela me contriste et je suis fort triste. Écris à sa pauvre veuve toujours bien courageuse. Je suis fatigué et je renonce à écrire les 3/4 lettres que j’ai encore à écrire pour en avoir fini, ce sera pour demain, je n’en puis plus. Je crains de m’affaiblir. Je suis surmené. Je crois que je mourrai à la peine.
Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils
Cardinal Luçon
Nuit tranquille, sauf canonnade assez active jusque vers 10 h. du soir. Le reste paisible. Matinée tranquille sauf vers 11 h. quelques gros coups de canons. Messe des morts pour les fondations. Rénovation des promesses cléricales ; allocution à Chapelle du Couchant ; à l’Est dans la soirée, violente canonnade ; les batteries de la ville tirent activement jusqu’à 11 h. soir.
Annoncé à la grand’messe, la nomination de Mgr Landrieux à l’épiscopat.
Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173
Juliette Breyer
Dimanche 21 Novembre 1915. J’ai reçu une lettre de Charlotte. Elle essaie de me rendre courage. Juliette est encore revenue passer quatre jours à Reims. Je suis allée la voir. J’aurais voulu me soulager près d’elle mais Mèmère était là. Cela me retient et j’ai donc le cœur aussi gros. Je suis revenue toute triste.
J’ai mis ton coco à l’école aux caves. Il a pleuré un peu mais il s’y habitue. Si tu l’entendais causer, tu le mangerais de caresses. Pauvre grand Lou …
Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) - Lettres prêtées par sa petite fille Sylviane JONVAL
De sa plus belle écriture, Sylviane Jonval, de Warmeriville a recopié sur un grand cahier les lettres écrites durant la guerre 14-18 par sa grand-mère Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) à son mari parti au front en août 1914 et tué le 23 septembre de la même année à Autrèches (Oise). Une mort qu’elle a mis plusieurs mois à accepter. Elle lui écrira en effet des lettres jusqu’au 6 mai 1917 (avec une interruption d’un an). Poignant.(Alain Moyat)
Dimanche 21 novembre
Les tirs de concentration de notre artillerie ont obtenu des résultats d’une efficacité constatée, notamment en Belgique, dans la région de Boesinghe, où des ouvrages allemands ont été bouleversés et dans la Somme, près de Beuvraignes, où nous avons démoli des petits postes et une coupole blindée de l’ennemi.
Activité habituelle des deux artilleries sur l’ensemble du front.
Combats à la grenade, en Artois, au Labyrinthe, en Argonne, à Courtes-Chausses et Vauquois, et en Lorraine, près de Reillon.
Les pertes allemandes sur le Styr sont énormes et la situation de l’ennemi est devenue pénible sur la majeure partie du front russe.
L’armée serbe, qui se concentre dans le sandjak de Novi-Bazar, se prépare à se replier sur le Monténégro.
Le gouvernement anglais dément absolument qu’une révolte ait éclaté aux Indes.
Les combats entre Autrichiens et italiens autour de Goritz tournent de plus en plus à l’avantage de nos amis, de l’avis même de la presse viennoise.
L’Angleterre a pris des mesures de défense sérieuse à la frontière égyptienne.
Les manifestations socialistes contre le renchérissement de la vie et contre la durée de la guerre s’accentuent outre-Rhin.
Source : La Grande Guerre au jour le jour