Louis Guédet
Samedi 27 mars 1915
196ème et 194ème jours de bataille et de bombardement
Belle journée de soleil, mais froide. La nuit dernière, vers 11h, obligé de quitter mon lit pour aller coucher à la cave. Remonté à 6h1/2 du matin pour tâcher de dormir dans un air plus sain.
J’entassette. Levé, vu à divers actes pour l’Enregistrement, apposition des scellés chez Madame Perceval, place d’Erlon. Répondu à ma chère Madeleine pour St Martin : j’approuve son idée d’y renvoyer d’abord Robert et André en reconnaissance, sauf à y aller après avec les autres petits.
- Barat m’a dit qu’il avait donné les ordres nécessaires pour que les militaires installés chez mon Père leur laissent la place (train des équipages du 19éme Corps, Commandant Bosc).
Reprise des feuillets rédigés par Louis Guédet.
Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils
Cardinal Luçon
Nuit troublée. Bombes à 10 h ½. Canonnades de temps à autre. 9 h du matin, bombes.
Visite d’un Colonel qui inspecte depuis Fères jusque très loin.
Venu une douzaine de fois à Reims où il accompagne la Mission des Neutres, des Alliés et du Japon, venant visiter la Cathédrale, parent, par sa femme, de Mgr Delaunay, Évêque d’Aire. Sa femme est de Lille. Exerce depuis le 2 août.
Reçu colis Barère, Bily…
Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173
Hortense Juliette Breyer
Samedi 27 Mars 1915.
Ce matin il était 9 heures. On sonne chez ton parrain et l’on demande après moi. C’était le comptable de chez Mignot, M. Liénard, qui venait me prévenir de me tenir prête pour dix heures, et qu’il viendrait me chercher afin de nous rendre ensemble chez le colonel du 291e, celui qui s’occupe de la rue de Beine. Il habite rue de Bethlehem et à 10 heures sonnantes nous y étions. Sais-tu ce qu’il m’a dit en arrivant ?
« – Vous en avez un toupet, Madame, de dire que l’on a passé et volé chez vous. J’y suis allé ce matin même et je n’ai rien vu.
- Je vous demande pardon, mon colonel, lui ai-je répondu, mais on a volé malgré la sentinelle qui est à la porte.
- Et qui a pu vous le dire puisque vous ne pouvez aller chez vous.
- Ce sont les soldats du poste ».
Après bien des formalités nous obtenons un laisser-passer pour le lundi 29 de 6 heures du matin à 6 heures du soir, mais défense avant ce temps de nous voir l’un et l’autre dans le quartier. Rendez-vous est donc pris pour le lundi.
Je pars chez vous en attendant. Je voudrais, mon Charles, que cette journée là soit passée. Je te quitte aujourd’hui. Je m’ennuie toujours mais je veux quand même espérer.
Bons baiser.
Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) - Lettres prêtées par sa petite fille Sylviane JONVAL
De sa plus belle écriture, Sylviane Jonval, de Warmeriville a recopié sur un grand cahier les lettres écrites durant la guerre 14-18 par sa grand-mère Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) à son mari parti au front en août 1914 et tué le 23 septembre de la même année à Autrèches (Oise). Une mort qu’elle a mis plusieurs mois à accepter. Elle lui écrira en effet des lettres jusqu’au 6 mai 1917 (avec une interruption d’un an). Poignant.(Alain Moyat)
Il est possible de commander le livre en ligne
Samedi 27 mars
Combat d’artillerie en Belgique, dans la région de Nieuport ; plus au sud, dans la région de Saint-Georges, nous avons enlevé une ferme. En Champagne, simple bombardement entre Meuse et Moselle, mais nous avons facilement repoussé des attaques : deux au bois de Consenvoye et au bois des Caures (près de Verdunj; trois aux Eparges; deux au bois Le Prêtre. Près de Badonviller, nous avons solidement organisé les positions occupées par nous. En Alsace, au Reichackerkopf, les Allemands ont, de nouveau, aspergé nos tranchées de liquide enflammé, mais sans obtenir de résultat.
Six de nos aviateurs ont bombardé les hangars des zeppelins, à Frescaty, et la gare Metz. Ils ont déterminé une panique, puis sont rentrés à bon port. D’autres aviateurs français ont bombardé les hangars à l’est de Strasbourg.
Les Russes ont remporté un très sérieux succès dans les Carpates, au col de Lupkov, et enlevé une partie de la crête des Beskides aux Autrichiens. Ceux-ci ont reculé, en abandonnant, au cours de la seule journée du 24, près de 6.000 prisonniers.
Un incident assez sérieux s’est élevé entre l’Allemagne et la Hollande. Celle-ci a déjà fait des représentations au sujet du vapeur Zevenbergen, qui fut attaqué le 21 par un avion. Or, le vapeur Medca, dont la nationalité néerlandaise était clairement affirmée, a été canonné trois quarts d’heure durant et coulé.
Von der Goltz et Liman von Sanders, les deux dictateurs allemands de la Turquie, ont quitté Constantinople. La situation des Allemands, dans cette ville, devient de plus en plus critique, et un fort parti s’y est créé en faveur de la paix.
source : Grande Guerre
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