Abbé Rémi Thinot
1er FEVRIER – lundi –
Demain, il paraît qu’il y aura attaque ; J’irai au poste de secours. J’apprends la nomination du P. Bhalluin, chevalier de la Légion d’Honneur. Je lui envoie un mot d’amitié.
Extrait des notes de guerre de l'abbé Rémi Thinot. [1874-1915] tapuscrit de 194 pages prêté à Reims
Louis Guédet
Lundi 1er février 1915
142ème et 140ème jours de bataille et de bombardement
8h1/2 soir Journée grise, pas un coup de canon. Ce calme est impressionnant auprès des jours précédents où de part et d’autre le canon grognait et la mitraille sifflait. Rien. Rien. Journée de dégel !! Quand serons-nous délivrés.
Reçu lettre Maître Lefèvre, notaire à Ay, notre Président de Chambre qui m’annonce (ce que je sais déjà) que le Procureur l’avise qu’il m’a proposé pour être cité à l’ordre du jour des civils. Le brave Lefèvre m’en félicite très gentiment. Mais « peu m’en chaut », le moindre petit grain… de délivrance ferait bien mieux mon affaire, non… ne me ferait plus plaisir. Foin de la Gloire. J’ai fait mon devoir et çà me suffit.
La demi-page suivante a été supprimée.
Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils
Cardinal Luçon
Lundi 1er – Nuit tranquille. Journée tranquille.
Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. Travaux de l’Académie Nationale de Reims
Eugène Chausson
Février 1915 – 1/2 – Gelée et temps couvert. Canonnade et bombardement (néant), il semble assez drôle qu’une journée entière se passe sans un seul coup de canon de part et d’autre. Ce silence sera sans doute payé en gros. Nuit calme.
Carnet d'Eugène Chausson durant la guerre de 1914-1918
Voir ce beau carnet sur le site de sa petite-fille Marie-Lise Rochoy
Hortense Juliette Breyer
Lundi 1erFévrier 1915.
Cette fois-ci on dit que c’est pour ce mois-ci que les boches vont être repoussés. Il y a déjà si longtemps qu’on le dit et ils sont toujours là.
La vie à Reims est bizarre, vois-tu. Tout le monde en prend son parti. Beaucoup s’en vont encore mais on hésite car pour revenir, on ne rentre plus à Reims une fois partis. Ton parrain, lui, peut le faire ; il a des allers-retours pour Paris, mais on croit que c’est pour le commerce. Aussi il en profite.
Je m’ennuie aujourd’hui mon Charles ; les papillons noirs reviennent. Tu me manques. Aussi pour me changer les idées, j’ai promis à ta maman que ma première visite serait pour eux. Le parrain doit partir à Paris. Aussitôt j’irai ; ta maman sera contente de voir sa petite-fille. Cela me fait penser à notre première sortie avec André. On était heureux à ce moment là.
Bonne nuit. Je t’aime toujours. Ta Juliette.
Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) - Lettres prêtées par sa petite fille Sylviane JONVAL
De sa plus belle écriture, Sylviane Jonval, de Warmeriville a recopié sur un grand cahier les lettres écrites durant la guerre 14-18 par sa grand-mère Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) à son mari parti au front en août 1914 et tué le 23 septembre de la même année à Autrèches (Oise). Une mort qu’elle a mis plusieurs mois à accepter. Elle lui écrira en effet des lettres jusqu’au 6 mai 1917 (avec une interruption d’un an). Poignant.(Alain Moyat)
Il est possible de commander le livre en ligne
Cartographie 1914-1918 – Carte des positions au 1er février 1915
Lundi 1 février
Combat d’artillerie sur tout le front : notre artillerie prend l’avantage. A la Bassée, l’armée britannique ressaisit toutes les tranchées qu’elle avait momentanément perdues. Les Allemands canonnent Fouqueviers près d’Arras. Nous dispersons plusieurs rassemblements, d’Arras à Perthes. En Argonne, trois attaques ennemies sont repoussées près de Fontaine-Madame. Aucun changement de l’Argonne aux Vosges.
Le bulletin russe signale une heureuse progression au sud-ouest de la passe de Doukla dans les Carpates : trois lignes de tranchées allemandes ont été enlevées; 2500 prisonniers ont été faits. En mer Noire, la flotte russe a donné la chasse aux croiseurs turcs Medjidieh et Breslau. Un torpilleur russe a opéré un raid audacieux contre Trébizonde.
Les sous-marins allemands ont torpillé les vapeurs anglais Toko-Maru et Icaria, près du cap d’Antifer (côte de la Seine-Inférieure), et les vapeurs anglais Linda-Blanche et Ben-Cruackan, dans la mer d’Irlande.
Il se confirme que le prince de Bulow a essayé de séduire certains hommes politiques italiens en leur laissant entendre que la Péninsule pourrait, sans coup férir, s’enrichir de Trente et de Trieste.
La Grèce est prête à prendre les armes pour secourir la Serbie, si ce dernier pays voit encore s’aggraver le péril qui pèse sur lui.
Une brochure, sinon officielle, du moins officieuse du gouvernement de Bucarest, atteste que la Roumanie revendique près de la moitié du territoire et le tiers de la population de la Hongrie.
La Triple Entente a exposé son point de vue au gouvernement américain au sujet du projet qui prévoit l’acquisition, par les États-Unis, de bâtiments de commerce allemands. Ce point de vue est contraire aux principes du projet.
Source : La Grande Guerre au jour le jour