Louis Guédet

Lundi 16 décembre 1918

1557ème et 1555ème jours

6h soir  Assez beau temps, été à la Gare à bicyclette par une nuit noire. Je me suis étalé en route, mais rien de grave et la route était assez sèche. Voyage de Vitry-la-Ville à Châlons et Épernay avec M. Guérin, Procureur de la République de Châlons, et le Docteur Langlet qui allait à Reims. Causé tout le temps en route des organisations faites et à faire. Le Tribunal se rétablira provisoirement dans les locaux de l’ancien séminaire de la rue des Augustins qu’il occupait déjà durant les réfections du pauvre Palais de Justice qui n’est plus et où j’ai tenu les dernières audiences qu’il ait vues ! J’aurais été le dernier magistrat y ayant rendu justice ! Singulière destinée que la mienne et celle du Palais ! Il aura fallu que ce soit un non-magistrat de carrière qui ait clos ses dernières assises ! avant sa destruction… Nous aurions les locaux comprenant l’ancienne salle d’assises. Pour le moment ce sera moi qui inaugurerai le nouveau Palais !! Car le Tribunal n’a nulle intention de quitter Reims.

Le Procureur que j’ai vu à Épernay m’a dit que le Tribunal ne quitterait pas Épernay, qu’ils n’installeraient à Reims qu’un substitut, un juge et un greffier, et que les audiences auraient toujours lieu à Épernay, mais qu’il entendait faire rendre un Décret pour que mon siège de Paix soit réinstallé à Reims où le canton de Bourgogne serait adjoint à nos 4 cantons de Reims. Ce sera donc moi qui inaugurerai le nouveau Tribunal et  tiendrait les premières audiences à Reims après son évacuation. J’aurais donc tenu les dernières tenues sous les bombardements et les premières depuis la délivrance de Reims.

Tenu à Épernay ma réunion de famille, et repris le train à 2h1/2. Rentré ici le soir vers 5h à nuit serrée.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

 Cardinal Luçon

Lundi 16 – Deuxième audience du Saint-Père. Visite aux Card. Boggiani, Ruialdino ; au Séminaire Français ; aux P. Lazaristes

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Le Pape Benoit XV

Lundi 16 décembre

L’armistice a été prolongé d’un mois dans le wagon-salon du maréchal Foch. La date d’échéance sera le 17 janvier 1919 à 5 heures du matin. Cette prolongation d’un mois sera étendue jusqu’à la conclusion des préliminaires de paix, sous réserve de l’assentiment des gouvernements alliés.
Le haut commandement des alliés se réserve le droit, s’il le juge bon, pour s’assurer de nouvelles garanties, d’occuper la zone neutre sur la rive droite du Rhin, au nord de la tête de pont de Cologne et jusqu’à la frontière hollandaise. Cette occupation sera annoncée par le haut commandement des Alliés avec six jours de préavis.
M. Erzberger a fait une longue déclaration pour essayer d’établir que l’Allemagne avait exécuté les conditions posées, pour demander la cessation du blocus et l’ouverture immédiate des négociations en vue des préliminaires de paix.
Les avant-gardes britanniques, complétant l’occupation de la tête de pont de Cologne, ont atteint la ligne générale Obr-Kassel-Scelscheid-Hohkeppel-0lpe-Solingen-nord de Hilden.
Un régiment français est entré à Wiesbaden.
A Berlin, la rupture semble complète entre les indépendants et les majoritaires, à la veille de la réunion du congrès des ouvriers et soldats de toute l’Allemagne.
La Norvège a rompu avec les bolcheviks.
Le cabinet norvégien, battu aux élections générales, à démissionné.
Le gouvernement des Pays-Bas publie une note pour dire qu’il n’a jamais pris une position contraire aux intérêts belges depuis 1914.
On a découvert à Potsdam la garde robe impériale qui contenait 600 uniformes.

Source : La Grande Guerre au jour le jour