Louis Guédet

Samedi 9 novembre 1918

1520ème et 1518ème jours

3h1/2 soir  Pluie battante toute la nuit, et pluie toute la journée. Les allemands ont jusqu’à lundi soir minuit pour accepter les conditions de l’armistice. Retrait des troupes de la rive gauche du Rhin, occupation par nous de la rive gauche avec des têtes de ponts, 5 000 machines, 38 000 wagons, etc…

L’Allemagne semble en révolution. Que va-t-il advenir de Guillaume et de son fils ? Sauvages ! Quel châtiment aura-t-il ?

Nous logeons le Colonel Artigue du 262e Régiment d’Artillerie de campagne, qui a logé il y a 15 jours dans le château des de Boullenois à Terme. Il n’est pas abîmé, me dit-il, et a encore presque tout son mobilier. De plus sa propriété est augmentée de casemates en ciment armé, faites par les allemands. J’écris cela à Robert de Boullenois à qui cela fera plaisir.

Peu de courrier, mais je suis obligé d’aller à Épernay mercredi pour voir Girard (Henry Goulet, Perrier-Jouët) et remettre à Châlons des lettres au clerc de Douce.

Le Procureur de Reims, drôle de sire ! un vrai protestant, pas franc et dans le fond sectaire comme ses pareils, me renvoi ma demande de passeport permanent en me priant de m’adresser au Préfet de la Marne, lui ne voulant pas s’exposer à un refus ! (Rayé)! Je crois que Bossu a raison, je dois m’en méfier. Il a été fort jaloux de ma décoration m’a dit à plusieurs reprises Bossu ! Qu’ai-je bien pu lui faire à cet oiseau-là ?! Enfin on verra, mais je n’ai qu’à me méfier.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

 Cardinal Luçon

Samedi 9 – Voyage à Reims. Visite à la maison Pommery. Rencontre M. le Sous-Préfet et Député Lenoir. Vu M. Sainsaulieu (qui a parlé du n° 12 rue Libergier, notre maison volée en 1906) à Sous-Préfet et Député, en vue de la faire réparer avec les Dommages de Guerre, et de me la remettre pour ma résidence, gracieusement. Rencontre à la gare le Lieutenant Colonel Billard, qui nous conduit en auto à notre maison

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

 Samedi 9 novembre

La délégation parlementaire allemande est arrivée au grand quartier général français.
Nos troupes ont continué à progresser. Nous avons franchi et dépassé la route de Vervins-Avesnes, au nord de la Capelle. Au sud de cette localité, nous avons atteint, à l’ouest de la voie ferrée de la Capelle à Hirson la ligne Effry-Origny-en-Thiérache. Plus à l’ouest, nous bordons le Thon.
Sur le front de l’Aisne, nous tenons la ligne générale lisière sud de la forêt de Signy-Wagron-Neil-Saint-Rémy – Mazerny-la Horgue, réalisant une avance de 16 kilomètres au delà de l’Aisne. Nous avons délivré cent villages.
Les Anglais ont pris Angre et ont livré des engagements heureux au sud-ouest de Tournay. Ils sont à l’ouest d’Avesnes et occupent Hautmont. Bavai est entre leurs mains, ainsi qu’Elarges et Hensies. Des centaines de prisonniers, un certain nombre de canons et beaucoup de matériel ont été capturés.
Les Américains ont pris Lisy-sous-Dun, Braudeville, les faubourgs de Sedan, situés sur la rive occidentale. Toute la région entre la Meuse et la Bar est libérée. 250 canons ont été capturés depuis le 1er novembre, ainsi que 2000 mitrailleuses, 5000 fusils, 75 mortiers de tranchées, 3 millions de cartouches.
Toute la flotte allemande de la mer du Nord et de la Baltique est en révolte.

Source : La Grande Guerre au jour le jour