Louis Guédet

Mercredi 10 janvier 1917

851ème et 849ème jours de bataille et de bombardement

8h1/2 soir  Assez beau temps, de la neige la nuit, mais adoucissement de la température progressif, au point que le soir il faisait doux.

Après-midi à l’archevêché pour la Fabrique, mais il y avait une réunion générale avec « Denier du Culte », « Bons et recours », « Vêtements », etc… (Rayé) était là (rayé), abbé Camu, Mgr Neveux, de Bruignac, Chanoine Prévoteau, abbé Frézet curé de St Jacques, abbé Lecomte secrétaire Général, abbé Compas, vicaire Général…  et votre serviteur.

Réunion banale à laquelle j’ai été invité à partir des « Bons et Journaux économiques ». C’est la Caisse Nationale qui parfait la différence, sans distinction civile ou religieuse, mais c’est formidable comme portion, près de 180 000 F !! en un an. Ensuite l’œuvre du vêtement. Le Cardinal a reçu différents secours, il s’est adressé à 3 évêques américains et il en concluait que les quêtes dans cet état étaient difficiles à cause du cosmopolisme, et dans un sermon il ne pouvait être quêté que discrètement pour tel ou tel belligérant, car les uns sont pro-allemands et d’autres pro-alliés…  Donc…

J’en reviens à nos 3 évêques américains. Le premier, pro-alliés, envoya 1 000 F… le 2ème, pro-allemand, 6 000 F, et le 3ème, celui de Montréal, 13 000 F !…  Bizarre !

D’autre part ce dernier déclarait à son Éminence que la femme d’un de ses illustres paroissiens avait déjà recueilli à elle seule pour les alliés plus de 3 millions !…  C’était le solde qu’on lui envoyait.

Notre fabrique est toujours en déficit, ce qui n’est pas surprenant…  comme casuels 5 enterrements, etc…  etc…  Bref le déchet (déficit) est comblé avec les fonds de la Paroisse et de ses dons. Triste. Après cela vu à la Caisse d’Épargne et rentré voir à mon retard de la journée. C’est fait. Dieu ce que j’aurais fourni de labeur durant ce siège !…  J’aime mieux ne pas y penser, y songer. Pour le gré qu’on m’en saura !! mais ce n’est pas pour cela que je me suis dévoué, que je me tue et que je mourrai ! J’ai fait mon devoir et tâché de rendre service à ma chère Cité Martyre !…

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Cardinal Luçon

Mercredi 10 – Nuit tranquille ; + 2° ; neige fondante. Conseil des Œuvres ; Conseil de Fabrique ; et du Denier du Clergé.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Mercredi 10 janvier

En Champagne, combat de patrouilles à l’ouest de Navarin.
En Alsace, dans la région du canal du Rhône au Rhin, un tir de notre artillerie a détruit un dépôt de matériel ennemi près d’Illfurth.
Canonnade intermittente sur le reste du front.
Sur le front belge, activité réciproque de l’artillerie, de Pervyse par Dixmude jusqu’au sud de Steenstraete.
Sur le front britannique, l’ennemi a fait jouer un camouflet au sud de Loos sans occasionner de dégâts. Les Anglais ont pénétré dans les tranchées allemandes en face d’Hulluch. Bombardement des positions ennemies de part et d’autre de Loos et dans le saillant de Gommécourt.
Activité des deux artilleries dans les régions de Souchez, Armentières, Messine et Ypres. Le bombardement d’un point d’appui ennemi allemand au nord de Wieltje a déterminé une violente explosion.
Canonnade et activité d’aviation sur le Carso.
Les Russes ont enlevé aux Allemands une petite île de la Dwina, mais ils continuent à reculer, ainsi que les Roumains en Moldavie.
Les Alliés ont envoyé au roi Constantin Ier un ultimatum à échéance de 48 heures pour obtenir l’exécution des conditions stipulées dans leur note du 31 décembre (réparations et garanties).
Le général Trepof, président du Conseil de Russie depuis le 23 novembre 1916, a été mis à la retraite ainsi que M. Ignatief, ministre de l’Instruction publique. Le prince Galitzine, sénateur, membre du Conseil de l’empire, remplace le général Trepof. M. Neratof, ministre-adjoint des Affaires étrangères, s’est également retiré pour entrer au Conseil de l’empire.
L’Italie appelle de nouvelles classes sous les drapeaux.
Un discours que l’ambassadeur américain Gérard a prononcé à Berlin, et où il aurait affirmé la cordialité des rapports entre son pays et l’Allemagne, fait grand bruit à Washington. M. Wilson a demandé des éclaircissements à M.Gerard.

Source : La Grande Guerre au jour le jour

Illfurth