Louis Guédet

Lundi 19 avril 1915 

219ème et 217ème jours de bataille et de bombardement

5h soir  Journée calme. Temps magnifique. Je prends mes dernières dispositions. Je pars demain à Paris à 6h1/4. A 5h1/2 je serai à la Banque de France pour prendre les valeurs Mareschal et la voiture me prendra à 6h1/4 pour filer à Épernay. Que Dieu me protège. Nous protège et que je voie enfin la fin de nos peines !!

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Cardinal Luçon

Lundi 19 – Nuit tranquille, sauf fortes bombes entre 11 h et minuit.

Matin : à 5 h ½, aéroplane, mitraillades continues.

Visite à S. J. B. de la Salle avec M. le Curé et M. Dardennes. Bombes au commencement de la visite. Nous étions tout près et en vue des tranchées allemandes.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Hortense Juliette Breyer

Lundi 19 Avril 1915.

Mon tit Lou, aujourd’hui je suis allée voir tes parents à Sainte Anne avec notre Blanchette. Tu vois mon Charles, je fais ce que je peux pour leur faire plaisir. J’y suis allée par un bombardement violent. La poste et la rue Cérès ont eu leur part. Et toujours des bombes incendiaires, mais maintenant cela fait moins de dégâts. On a fait venir quelques pompiers de Paris.

Pour revenir à tes parents, ils étaient contents et ta maman aurait voulu que je couche chez eux, mais je ne suis pas assez hardie et puis en ce moment quand il faut être à charge des autres, ça ne me va pas. A 5 heures je suis donc revenue en passant chez Syren chercher ma petite lampe à alcool. Si tu voyais les dégâts … Et c’est partout comme cela à Reims. Je dois même aller rue de Beine voir si notre maison est toujours là car il y en a une tombée chez Mme Desjardins. Ton parrain a été un moment travailler dans le bureau du marquis et maintenant son bureau est dans les tunnels. Encore bon car aujourd’hui il en est arrivé une et le bureau du marquis a été réduit en miettes.

Ton papa voudrait encore que je sorte André. C’est bizarre : ils ont peur pour eux et ils disent qu’il n’y a pas de danger pour André. Ton parrain me conseille de ne pas le sortir.

Bons bécots. Je t’aime.

Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) - Lettres prêtées par sa petite fille Sylviane JONVAL

De sa plus belle écriture, Sylviane Jonval, de Warmeriville a recopié sur un grand cahier les lettres écrites durant la guerre 14-18 par sa grand-mère Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) à son mari parti au front en août 1914 et tué le 23 septembre de la même année à Autrèches (Oise). Une mort qu’elle a mis plusieurs mois à accepter. Elle lui écrira en effet des lettres jusqu’au 6 mai 1917 (avec une interruption d’un an). Poignant.(Alain Moyat)

Il est possible de commander le livre en ligne


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Le quartier Sainte-Anne et la poste de la rue Cérès
Le quartier Sainte-Anne et la poste de la rue Cérès

Lundi 19 avril

Attaque allemande au bois de Saint-Mard, dans la vallée de l’Aisne : elle est vigoureusement repoussée par le feu de l’artillerie et par une charge de baïonnette.

En Champagne, près de Perthes, l’ennemi doit évacuer l’entonnoir où il s’était installé à la suite d’une explosion de mines : nous lui enlevons aussi quelques dizaines de mètres de tranchées.
Canonnade en Woëvre. Une série de petites offensives allemandes sont brisés par nous au nord et au sud de la forêt de Parroy.
En Alsace, nous refoulons une attaque à Orbey, trois attaques au Reichackerkopf, et nous gagnons du terrain au Schnepfenrieth près de Metzeral.
La bataille des Carapates semble traverser une phase d’accalmie.
Nouveau succès anglais en Mésopotamie.
Un sous-marin britannique, en reconnaissant un champ de mines dans les Dardanelles, s’est échoué à la pointe de Képhis. L’équipage aurait été capturé par les Turcs, d’après un communiqué de Constantinople.
Un navire grec, l’Ellispontos, a été torpillé en mer du Nord.
Le club Union et Progrès a été fermé à Stamboul, sur l’ordre d’Enver pacha et de Talaat bey.

Source : la Grande Guerre au jour le jour