Louis Guédet

Vendredi 30 août 1918

1449ème et 1447ème jours de bataille et de bombardement

6h soir  Parti lundi matin à 5h. Passé par Châlons, Oiry, Avize, Fère-Champenoise où je vois de nombreuses tombes de la bataille de la Marne, la gare brûlée, et entre cette commune et Sézanne une ville de baraquements avec voies ferrées…  formidable ! Je descends à Sézanne où je trouve mon Procureur et Texier qui m’ouvre mon testament Renard. Celui-ci demande à être enterré civilement. Nous causons. Je déjeune avec eux à l’Hôtel du Commerce (Le Café Brasserie du Commerce est toujours situé 46, place de la République à Sézanne), puis je visite la ville qui me rappelle beaucoup Fismes. L’église est bien, belles promenades en terrasse dominant la campagne environnante. L’ancien baillage, justice de Paix actuellement avec sa tour ronde est un vestige avec sa tour de la demeure des d’Orléans.

J’oubliais de dire qu’à Châlons en passant durant l’arrêt je vis un train de troupes arrêté en face de mon wagon, c’était la 1ère batterie du 61e d’Artillerie, et mon Jean était dans le train suivant avec sa 2e batterie. J’ai prié un soldat de lui dire qu’il m’avait vu. A 10 minutes près j’aurais vu ce pauvre grand. Ils n’ont pas eu de pertes, ou presque. Ils pensaient être dirigés vers la Lorraine. Je quittais Sézanne à 5h et à Romilly je pris la correspondance de 7h39 pour Paris où j’arrivais à 10h du soir.

Le lendemain matin j’étais à St Cloud à 10h. Personne chez M. Renard que la bonne qui me dit qu’il n’y a là que M. Maurice Renard. M. et Mme Guelliot et M. et Mme de Tassigny ne sont pas venus quoique prévenus. Je vois Maurice Renard à Midi, très ennuyé des obsèques civiles de son Père, et causons affaires et voyons au plus pressé. L’enterrement eu lieu à 3 heures. J’étais seul avec M. Renard qui était avec ses 2 jeunes fils, le Père Clément jardinier de M. Renard, Georgina Millet et sa fille femme de chambre, le concierge de la maison et c’est tout !! Triste enterrement à la Victor Hugo ! Nous montons au cimetière de Montretout, 4 kilomètres à pied. J’étais fourbu ! Rentrés ensemble à la maison, 7, rue d’Orléans, 7, donné mes dernières instructions et rentré à Paris à 8h du soir ! Quel triste et lugubre enterrement que ces obsèques civiles. Le pauvre Président, s’il a voulu des obsèques sans fastes, il a été bien servi.

Le lendemain mercredi fait mes courses à Paris. Vu à la Mairie de Reims (19, rue de l’Opéra) où j’ai donné quantités de légalisations, aux Hospices de Reims 12, rue du 4 septembre, avec la Police où j’ai vu Bochard remis de ses blessures.

Quitté Paris jeudi matin à 8h, arrivé (par Coulommiers, Esternay, Sézanne, Fère-Champenoise, Oiry) à Châlons vers 1h. Fait des courses, repris le train à 4h et rentré ici vers 5h du soir.

Un monceau de lettres m’attendait comme toujours. Je n’ai pas encore fini d’y répondre. Et comme toujours aussi des rendez-vous ratés et impraticables parce qu’absent. C’est comme un fait exprès. Rien d’autre. Je suis fatigué et surtout très énervé !

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

 


Cardinal Luçon

Vendredi 30 – Visite de 2 Aumôniers militaires. Indisposition de saison. On apprend la prise de Noyon. Visite du Général Pellé qui est à Vandieres. Visite de M. de Aiala, que je n’ai pas vu, étant avec le Général

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Vendredi 30 août

Nos troupes ont continué à poursuivre l’ennemi qui, sous notre poussée victorieuse, a précipité sa retraite sur un front d’une trentaine de kilomètres.
Nous avons atteint les hauteurs de la rive gauche de la Somme, depuis Cézancourt jusqu’à la région à l’est de Nesle.
Plus au sud, nous bordons la rive ouest du canal du Nord sur la majeure partie de son parcours entre Nesle et Noyon.
Notre avance du jour excède dix kilomètres en certains points, et quarante villages ont été repris dans la journée. Nous avons fait 500 prisonniers.
Les Américains ont repoussé plusieurs contre-attaques dans la région de Juvigny, entre Oise et Aisne. Ils ont arrêté une tentative allemande sur la Vesle, au sud de Bazoches et de Fismettes.
Les troupes anglaises ont accentué leur pression au sud de la Somme. Dans le secteur de la Scarpe, elles ont repoussé de fortes attaques près de Vis-en-Artois, de Boury et de Gavrelles. Elles ont fait au total 26000 prisonniers et capturé plus de 100 canons depuis le 21. Les tanks ont pris une part active à cette lutte.
Le Sénat américain a voté la nouvelle loi des effectifs.
Le général Horvat, a fait un coup d’Etat à Vladivostock.

Source : La Grande Guerre au jour le jour