Louis Guédet
Samedi 31 août 1918
1450ème et 1448ème jours de bataille et de bombardement
6h soir Temps nuageux tendant à la pluie, mais se remettant peu à peu. Été à La Chaussée voir les de Vaucresson. Celui-ci aura ses galons de lieutenant-colonel bientôt. Il ne les aura pas volés. Causé très longuement, nous avons les mêmes idées sur bien des points. Il me disait que Foch était de beaucoup supérieur à Joffre et Pétain, que c’était un chef d’Armées de l’avis de tous les alliés. Quant à Pétain il lui est de beaucoup inférieur. En parlant de Joffre il disait que c’était déjà un homme fini avant la Guerre, et que la Bataille de la Marne avait été gagnée non par lui mais par Galliéni qui a eu le trait de génie de sentir l’Armée de Von Kluck glisser le long de Paris pour anéantir notre armée d’abord et il a été obligé de forcer la main à Joffre pour qu’il s’arrêta devant la Seine. Car ce dernier ne parlait rien moins que de reculer sur derrière la Loire, voire même dans les Cévennes !!
Bref le Général Galliéni obtient l’arrêt de notre retraite et en même temps, rassemblant tout ce qu’il avait de troupes sous la main, et par des moyens de fortune comme transports (taxi, charrettes, voitures, etc…) il jetait sur le flanc droit ennemi l’armée de Maunoury qui décida sur l’Ourcq la retraite allemande. (Rayé).
Il est en ce moment vers Ville-sur-Tourbe et Malmy, et un loustic sachant que Poincaré devait visiter le cantonnement eu l’idée de supprimer sur le poteau indiquant le nom de la localité à son entrée, MalMy, les 2 jambages de l’M central de manière à faire un V, ce qui faisait MalVy. De Vaucresson n’eut que le temps de sauter sur le susdit poteau et de l’abattre !! juste comme Poincaré arrivait !! Heureusement, car c’eut fait un chichi du diable ! si l’entourage du Président s’en fut aperçu !
Je les ai quittés vers 2 heures. En rentrant ma femme me montre une lettre de Berthe Bataille qui insiste beaucoup pour que Marie-Louise vienne à Granville pour le mois de septembre. On décide de l’y envoyer, elle en a besoin la pauvre petite.
Robert partant mercredi pour regagner son groupe l’accompagnera jusqu’à Paris et la mettra au train pour Granville. A 18 ans elle est d’âge à se débrouiller. Je pense aller à Vitry lundi pour voir le Président et le Procureur pour m’organiser pour mes audiences. Ensuite j’irai à Châlons voir l’Intendant pour obtenir un greffier et nous entendre pour commencer ces audiences en rattrapage de notre retard.
Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils
Cardinal Luçon
Samedi 31 – Malade, pas dit messe.
Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173
Samedi 31 août
Notre progression a continué dans la région du canal du Nord, que nous bordons entièrement, sauf vers Cartigny et Sermaize. Nous avons occupé le bois du Quesnoy, au nord-est d’Eurvilly et Beaurains.
Plus au sud, la bataille a revêtu un caractère de vif acharnement. Nous avons enlevé Noyon de haute lutte et progressé jusqu’aux lisières sud d’Haplincourt.
A l’est de Noyon, nous avons pris pied sur les pentes sud du mont Saint-Siméon et conquis Landrimont et Morlincourt. Nous avons fait plusieurs centaines de prisonniers.
Entre l’Oise et l’Aisne, nos troupes ont réussi à franchir l’Ailette en plusieurs points, au nord et au sud de Champs, en dépit de la résistance allemande. Guny et Pont-Saint-Mard sont entre nos mains.
Les Anglais ont occupé Bapaume; malgré la destruction des ponts, leurs avant-gardes ont franchi la Somme au sud et à l’ouest de Péronne. Ils ont pris Cléry-sur-Somme et Combles : dans ce seul secteur, ils ont capturé 210 prisonniers et des canons.
Au nord de Bapaume, les troupes de Londres et du Lancashire ont réalisé des progrès importants à l’est de la Sensée, occupé Bullecourt et Hendecourt, ainsi qu’un puissant système de tranchées.
Nos alliés ont encore avancé de part et d’autre de la Scarpe vers Eterpigny, Hamblain-Les-Prés et Plouvain.
Source : La Grande Guerre au jour le jour