Louis Guédet

Samedi 22 juin 1918

1380ème et 1378ème jours de bataille et de bombardement

7h soir  Beau temps, brise légère, l’air du matin était d’une légèreté surprenante. Parcouru Troyes, visite ses vieilles églises, revu St Urbain, une merveille de légèreté et sa statue de la douleur, si expressive, si touchante. Parti à 11h1/2 avec une heure de retard, mais heureusement trouvé à Vitry-le-François le train de midi 20 qui nous attendait et qui n’est parti qu’à 1h1/2. Arrivé vers 3h chez moi.

Je ne sais si j’ai noté ce que m’avait dit M. Leroux, du ministère de la Justice, à propos des vins sous séquestre  de Mumm. L’autorité militaire n’avait rien trouvé de mieux, de plus génial, que de vouloir réquisitionner tous les vins de Champagne de G.H. Mumm pour…  en faire de l’alcool…  à brûler !! Çà c’est bien culotte de peau !! Leroux les a envoyés coucher et haussait les épaules en me contant cela.

Minelle m’avait bien renseigné sur Chaumel, qui est actuellement Premier Vice-président du Tribunal de la Seine et habite 35, rue d’Eylau à Paris, dont le fils s’injectait de l’albumine d’œuf dans la vessie pour se faire réformer, et le Père, le Premier Vice-président, venant voir le médecin-chef de Minelle le Docteur Luys (Georges Jules Luys, médecin urologue (1870-1953)), pour demander la réforme de son fils, en faisant peser le poids de sa situation de 1er Président, etc… Le fils a été pris dans sa manœuvre de fraude et il a écopé d’1 mois de cellule et l’envoi au front, mais on n’a pas osé le faire passer en Conseil de Guerre ! Si c’avait été les miens ou un pauvre bougre c’aurait été une autre histoire. C’est honteux.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Cardinal Luçon

Samedi 22 – Mgr Neveux et M. Compant vont à Épernay pour la Relique de Sainte Hélène et les objets déposés chez M. l’Archiprêtre. Répondu au Secrétaire général du Secours National pour l’annonce des 12.010 F. Écrit à Mme Havard de la Montagne et à Mme la Ctesse de Barral pour les Veuves de la Guerre. Visite de M. le Sous-préfet pour Sœurs de l’Enfant- Jésus à évacuer, et… : 2 wagons et fourgon, récupération de caisses appartenant à M. Goubernaud, déposées dans la crypte Ste Clotilde

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Samedi 22 juin

Nous avons amélioré nos positions au nord de Faverolles et dans la région au sud de Hautevesnes. Une vingtaine de prisonniers sont restés entre nos mains.
Les Anglais, au cours de raids et de rencontres de patrouilles dans le bois d’Aveluy, aux environs d’Hébuterne et de Boyelles et sur les deux rives de la Scarpe, ont fait des prisonniers et infligé des pertes considérables à l’ennemi.
Ils ont repoussé avec pertes pour l’adversaire plusieurs tentatives faites par lui pour reprendre du terrain au nord-ouest de Merris.
Les Américains ont avancé leurs lignes et amélioré leurs positions dans la région de Château-Thierry. En Woëvre et dans les Vosges, dans leurs secteurs, vive lutte d’artillerie.
Les Italiens ont vigoureusement contenu la pression autrichienne sur le Montello. Ils ont fait dans cette région 400 prisonniers et capturé des mitrailleuses et des canons. Ils ont brisé une offensive et regagné du terrain sur la Piave, en faisant plusieurs centaines de prisonniers.
A l’ouest de San Dona, plusieurs tentatives autrichiennes ont échoué. Au nord de Cortellazo, 200 prisonniers ont été faits. Le nombre de ceux-ci, depuis le début de la bataille, atteint à 12000.

Source : La Grande Guerre au jour le jour