Apollinaire est engagé volontaire depuis octobre 1914.

Le 2 janvier 1915 Apollinaire croise dans le train Madeleine Pagès. Ils se plaisent, trois mois après il lui envoie du Front de Champagne une carte postale qui débutera entre eux une correspondance riche et d’une grande liberté de ton.

Voici des extraits de cette correspondance concernant la ville de Reims :

Le 5 mai 1915

«… Je suis plus près de la Cathédrale, le sol est marneux… »

Le 25 août 1915 Poème à l’Italie :

« Ô frères d’Italie Vos plumes sur la tête Italie Entends crier Louvain Vois Reims tordre ses bras… »

Le 25 octobre 1915

« Le lit est en planches, le fond en treillage de fil de fer, les clous sont fabriqués de bouts de fil d’acier, sur le treillage il y a la paille sur la paille un sac puis un isolateur que j’ai trouvé du côté de Reims puis ma toile de tente pliée en 2 je me couche dedans et sur moi couverture de cheval couvre pied, manteau, au pied du lit devant la porte il y a ma table…. »

Le 10 mars 1916 en permission à Reims il écrit à Madeleine :

«  …J’ai vu la ville royale, sa cathédrale, et j’ai ramassé des fragments de vitraux. J’ai vécu deux jours de cette vie singulière de la ville sous les obus. J’ai visité la cathédrale avec M. Huart l’architecte et M. Gulden, un Anglais propriétaire de la marque Heidsieck. J’ai déjeuné au Lion d’Or en face*, à l’intérieur la cathédrale a peu souffert au dehors tout ce qui était en bois à brûlé. Un seul obus de 77 a troué la voûte d’un très petit trou qu’on ne voit qu’à peine près d’un pilier. A l’intérieur la boiserie Louis XV près du porche ont brûlé (incendie par obus) et ont découvert des statues que le feu a malheureusement très  endommagées, la rose de vitrail qui était si belle a été en partie détruite du fait de l’incendie, les vitraux du chœur, dits de St Louis (1227) sont quasi intacts ainsi que l’ecclesia remensis…. »

*Comme Pierre Loti lors de son premier voyage à Reims, Guillaume Apollinaire a dormi dans le Grand Hôtel du Lion d’Or avant sa destruction (voir l’article sur Loti)

Le 13 mars 1916 il lui écrit :

« …En te parlant de Reims, j’ai oublié de te dire une des choses qui m’a le plus frappé dans cette ville maintenant déserte. C’est sur l’infiniment déserte place d’Erlon où débouchent des rues marmitées comme la rue de l’Arquebuse sur cette grande place donc une douzaine de fiacres stationnent stoïques attendant l’improbable client, les cochers classiquement coiffés du chapeau haut de forme blanc vivent sans doute d’amour et d’eau fraîche. »

Donc en mars 1916 Apollinaire est de passage à Reims, il évoque la place d’Erlon qu’il trouve infiniment déserte en dehors des fiacres.

Il est probable que ces deux photos reflètent ce qu’il a vu.
Nous devons ces photographies au collectionneur rémois Michel Thibault

Le 12 avril 1916

« …Je ne t’avais pas écrit que j’avais été à Reims. J’ai été blessé au Bois des Buttes à l’ouest du Choléra et de Berry au Bac… »

Sur le site de Béatrice Keller : en savoir plus sur Apollinaire et la Grande Guerre

Crédit photo : Michel Thibault
Réalisation de l’article : Eric Brunessaux