Louis Guédet
Mercredi 6 février 1918
1244ème et 1242ème jours de bataille et de bombardement
7h1/2 matin Temps doux et fort nuageux. Hier soir Sainsaulieu est venu m’apporter quelques larmes de plomb en fusion, provenant de la toiture de la Cathédrale lors de l’incendie du 19 septembre 1914. On croirait des feuillages d’herbes marines ou de fougères. Voilà encore un souvenir à mettre dans mon petit musée de Guerre. Aurais-je la joie de le voir installé dans une vitrine ou dans un meuble vitré après la Guerre. Je me sens si las et j’ai une angoisse dont je puis me défaire. Je pars à 9h. Pourvu qu’il n’arrive rien ici durant mon absence.
Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils
Cardinal Luçon
Jeudi 6 – Nuit tranquille. – 4°. Visite à M. Charles Heidsieck, non trouvé ; au Capitaine des Pompiers de Paris, non trouvé.
Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173
Journées du 6 au 19 décembre 1917
LA GUERRE : POLITIQUE ET DIPLOMATIE
L’armistice sur les fronts russo-roumains :
Les négociations entamées le 3 décembre par les maximalistes avec les puissances centrales ont abouti, comme on devait s’y attendre, à la conclusion d’un armistice signé à Brest-Litovsk le 15 décembre. Cet armistice, qui a commencé à jouer le 17 décembre, à 12 heures, est valable jusqu’au 14 janvier 1918. A moins d’une dénonciation faite sept jours d’avance, il continuera automatiquement.
Il s’étend à toutes les forces terrestres, aériennes et navales des fronts communs, englobant, par le fait même, le front russo-roumain. On en verra plus loin les dispositions détaillées et les conséquences militaires et navales. Ainsi le gouvernement de Lénine et de Trotzky a délibérément, dénoncé les traités d’alliance qui unissaient la Russie aux autres nations de l’Entente. Le geste qu’il a accompli avait été précédé par l’établissement d’une trêve de dix jours, conclue le 5 décembre avec le prince Léopold de Bavière, à laquelle la Roumanie avait été contrainte de participer.
Ces événements considérables n’ont pas été sans troubles profonds à l’intérieur de l’immense État, aujourd’hui en complète désorganisation anarchique. Des mouvements séparatistes ont amené l’Ukraine, la région du Don occupée par les cosaques, la Bessarabie, La Finlande, une partie de la Sibérie, l’Arménie, à proclamer leur indépendance. Une réaction violente contre les bolchevicks s’est manifestée parmi les éléments qui n’ont pas perdu le sens national, comme le parti bourgeois des cadets, les paysans, les socialistes-révolutionnaires qui, malgré leur étiquette, représentent une fraction modérée, les cheminots. Aux élections pour la constituante, qui se sont poursuivies, les maximalistes sont loin d’avoir obtenu la majorité. Mais, ils ont empêché par la force l’assemblée de se réunir, tandis que leurs troupes tenaient tête à celles de Kalédine, chef de la contre révolution militaire. On se bat encore en Russie, mais c’est la guerre civile.
Cependant les nouvelles les plus inattendues, généralement contredites dès le lendemain, n’ont cessé de parvenir par exemple, celle de l’assassinat, puis de l’évasion de l’ex-tsar.
La seule chose certaine, c’est que les conditions de la paix séparée de la Russie avec l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie, la Bulgarie et la Turquie se discutent avec, de part et d’autre, un égal désir d’une solution rapide .
Un coup d’État au Portugal.
Le 8 décembre, des dépêches de source espagnole annonçaient que des troubles graves avaient éclaté à Lisbonne et à Porto, à l’occasion de la cherté de la vie. Il s’agissait, en réalité, d’un véritable coup d’Etat politique. Il a eu pour instigateurs M. Sidonio Paës, qui fut ministre dans plusieurs cabinets républicains, le colonel Recadas, ancien aide de camp du roi Manuel, et M. Suarez Branco, ancien ministre des finances des cabinets royalistes. Pendant trois jours, les forces révolutionnaires ont combattu les troupes régulières; elles en ont triomphé. Le gouvernement a dû capituler. Il a été remplacé, en décembre, par un gouvernement provisoire dont M. Sidonio Paës a pris la présidence, avec les portefeuilles de la Guerre et des Affaires étrangères. M. Bernardino Machado, président de la République déchu, a été banni. La même peine a été prononcée contre M. Joao Chagas, ministre du Portugal à Paris. Le nouveau régime a déclaré officiellement qu’il continuerait sa politique d’alliance avec l’Entente.
L’Amérique contre les puissances centrales. Le président Wilson a signé, le 7 décembre, la déclaration officielle de guerre des Etats-Unis à 1’Autriche-Hongrie. D’autre part, le 8 décembre, la République de l’Equateur a rompu les relations diplomatiques avec l’Allemagne.
OPÉRATIONS MILITAIRES
FRONT FRANÇAIS
Tandis que semblent se multiplier les indices d’une prochaine offensive ennemie sur le front Occidental – ç’est une éventualité que la défection russe doit rendre inévitable – les opérations militaires de la quinzaine dernière ont été réduites à fort peu de choses. Ce sont des nécessités locales et non une pensée d’ensemble qui les ont déterminées.
Le seul secteur où la fréquence des coups de main mérite d’être relevée est celui de la Meuse. Les Allemands y ont prononcé en effet un certain nombre de tentatives, d’ailleurs vaines, les 7, 8 et 9 décembre vers Bezonvaux et Beaumont; le 10, sur le front du bois le Chaume; le 12, à la cote 304, sur la rive gauche de la rivière; le 13, au bois des Caurières, ce fut l’action la plus importante; le 15, au bois le Chaume.
FRONT BRITANNIQUE
Nos alliés ont dû, à la suite des dernières attaques allemandes devant Cambrai, rectifier leur ligne et abandonner sans combat le saillant formé par leurs positions vers Noyelles-sur-l’Escaut et le bois Bourlon. Leur mouvement de repli qui s’est accentué, jusqu’au Sud-Ouest de ces localités, a eu lieu dans la nuit du 4 au 5 décembre, sans que l’ennemi s’en rendît compte. Les travaux de campagne ont été systématiquement détruits.
Le 6 et le 7 décembre, la lutte s’est encore maintenue assez vive vers la Vacquerie. Des engagements locaux se sont produits à l’est de Boursies le 8 et le 10. Une forte attaque a été menée par les allemands le 12, sur un front de 500 mètres environ, à l’Est de Bullecourt. Les assaillants ont pu être rejetés, sauf sur un point. Le 13, le combat a repris et s’est même étendu. Il n’a abouti à aucun résultat appréciable.
Dans le secteur d’Ypres, une entreprise a été menée par l’ennemi au Sud-Est du bois du Polygone, aux abords du château de Polderhoek, le 14 décembre. Une tranchée a été perdue puis reprise le lendemain.
Ce sont là les incidents les plus marquants que les communiqués britanniques ont enregistrés du 6 au 19 décembre.
FRONT RUSSE ET ROUMAIN
L’ARMISTICE
Au point de vue militaire, l’article 2 du protocole d’armistice est le plus important. Les contractants s’y interdisent, sur le front d’Europe, tous déplacements de troupes en préparation d’une offensive locale, et, d’une manière plus générale, tous déplacements de troupes jusqu’au 14 janvier, « à moins que ces déplacements aient été en cours au moment de l ‘armistice ».
Cette dernière clause vise hypocritement le transport d’unités austro-allemandes d’Orient en Occident; mais elle est sans valeur. En effet, tous les mouvements ordonnés par Hindenburg étaient déjà en cours le 17 décembre, et les Russes, au surplus, dont les armées sont en pleine dissolution, ne possèdent aucun moyen de contrôle sur l’observation des engagements acceptés. Si ceux-ci ne sont pas respectés, aucune sanction ne peut intervenir.
L’armée roumaine, de par sa situation, est forcément comprise dans les stipulations de l’armistice. Celles-ci, d’autre part, interdisent aucun déplacement de troupes en Asie; et bien plus, d’après l’article 1O, les armées belligérantes doivent immédiatement évacuer le territoire persan.
Ainsi les Turcs seront en mesure de concentrer tous leurs moyens disponibles soit en Mésopotamie, soit en Palestine.
La trahison maximaliste est totale.
FRONT ITALIEN
Sur le plateau d’Asiago.
Après une accalmie générale d’une semaine, la bataille générale s’est rallumée le 4 décembre au matin à l’est d’Asiago, dans la partie du plateau des Sette Communi, voisine des gorges de la Brenta. Les forces autrichiennes, soutenues par des batteries allemandes, ont mené une offensive déterminée contre la 1re armée italienne.
L’objectif de l’attaque était fixé dans le massif entier des Meletta, que flanque au nord-ouest les monts Tondarecar et Badenecche, au sud-ouest le mont Sisemol. Cet ensemble de sommet couvre les entré du val Frenzela qui conduit à Valstagna, localité située sur la Brenta, à l’issue des gorges les plus étroites.
Le 4 décembre, dans l’après-midi, après des combats acharnés, les Italiens perdirent leurs positions de droite, au Tondarecar et au Badenecche. Dès lors, leur résistance au centre étant gravement affectée, vers la tombée de la nuit, les pentes des Meletta furent abandonnées, et la défense reportée sur les hauteurs en arrière de Foza.
Le 5, la position avancé du mont Castelgomberto, encerclée au cours des événements de la veille, fut perdue, et le lendemain, le mont Sisemol, se présentant en flèche devant la nouvelle ligne italienne, dut être évacué.
A partir de ce moment, nos alliés firent front en travers du val Frenzela et aux revers occidentaux des escarpements dressés directement au-dessus de la rive droite de la Brenta. Les Autrichiens, de leur côté, suspendirent leurs opérations, et la lutte se réduisit aux actions habituelles de l’artillerie.
Entre la Brenta, et la Piave.
Mais quatre jours plus tard, une nouvelle bataille était engagée dans l’épais massif montagneux qui s’étend entre la Brenta et la Piave, au Nord de Bassano. La 4 armée italienne, sous les ordres du général de Rebilant, devait y soutenir l’assaut des divisions austro-allemandes de von Krobatin et de von Below.
Au centre du secteur, et à proximité de la plaine, se dresse le mont Grappa, dont les multiples ramifications couvrent la majeure partie de l’espace compris entre les deux fleuves. Du massif central s’embranche vers le nord une arête qui aboutit au col dell’Orso, et, qui sépare en deux positions sensiblement égales un théâtre tourmenté, localisé entre deux profonds sillons.
Il semble que les troupes autrichiennes opèrent à l’Ouest de cette arête, tandis que les éléments allemands combattent à l’Est, l’ensemble des mouvements offensifs convergeant vers le massif du Grappa.
Le 10 décembre, l’artillerie ennemie entrait en scène par des bombardements intenses répartis sur tout le front envisagé, et le 11 deux attaques principales étaient prononcées, qui devaient se poursuivre au cours des journées suivantes.
La première à l’Ouest, à l’aplomb de la Brenta, était dirigée contre les positions du col della Beretta et du col Caprile. Il est bon de remarquer que dans ces montagnes vénitiennes l’expression « col » désigne généralement non un passage mais une cime.
La deuxième, à l’est, aux approches de la Piave, était menée vers le mont Spinoncia et les défenses du val Calcino qu’il domine. Elle tendait à déborder le saillant formé par le col de l’Orso et le mont Solarolo. L’altitude de ces divers sommets varie entre 1300 et 1700 mètres.
Des combats, plus ou moins opiniâtres, se sont succédé sur ce terrain difficile durant les journées des 12 au 13 décembre, la résistance italienne surmontant les efforts accumulés par un adversaire tenace.
Cependant le 14, à l’Est de la Brenta, les Autrichiens parvinrent à couronner le col Caprile, menaçant ainsi les derrière du col della Beretta, et prenant commandement sur un plateau qui longe vers le Sud les escarpements de la Brenta.
En même temps, les Allemands répétaient diverses attaques dans la région orientale du secteur contre le saillant du Solarolo, qu’étayent à droite le Spinoncia, à gauche le col dell’ Orso. Bien qu’ils aient échoué dans leurs tentatives directes, une certaine avance réalisée par eux sur le Spinoncia rend précaires les positions du Solarolo.
De ce côté du champ de bataille, les soldats de la 4 armée italienne étaient dès lors soutenus par des éléments des divisions franco-britanniques, portés en première ligne. En effet, à 3000 mètres environ à vol d’oiseau au Sud du Spinoncia se dresse la montagne allongée du Tomba dont l’ennemi, venant de Quero, a pu atteindre la crête. Mais les pentes méridionales du massif, d’une défense naturelle aisée, sont occupées par des contingents français, qui se relient au long de la Piave aux détachements anglais installés aux revers de la colline oblongue du Montello.
Le 15 décembre, les combats diminuèrent d’intensité. Le 16 ils reprirent violent devant le col Caprile, avec développement jusqu’au fond des gorges de la Brenta, au barrage de San Marino, sans qu’aucune modification fût signalée dans la situation réciproque des adversaires.
Cependant le 18, une attaque nouvelle parvint aux pentes du mont Asolone, débordant ainsi au Sud-Est le col della Beretta.
Le 17, à 11 heures, des colonnes allemandes débouchèrent des pentes du mont Spinoncia; leur élan fut brisé par les concentrations des feux de l’artillerie italienne et des batteries françaises. Aux mêmes instants, un assaut direct contre le mont Solarolo, entrepris par une division de chasseurs allemands, échouait après une lutte acharnée.
Au long de la Piave, aucun incident de guerre sérieux n’a été signalé.
EN PALESTINE
LA PRISE DE JÉRUSALEM
La manœuvre britannique, déroulée depuis la prise de Gaza, a trouvé un premier aboutissement dans la glorieuse conquête de Jérusalem. Le général Allenby, en poussant sa gauche au Nord de Jaffa et son centre selon un arc de cercle tendant vers la chaussée de Naplouse, s’était rendu maître des communications principales d’un adversaire progressivement isolé du gros de son armée.
Il ne resta plus aux forces turques du plateau de Judée qu’une ligne de retraite en direction de la vallée du Jourdain, par la région de Jéricho. Une menace vers cette ligne devrait sans aucun doute entraîner l’évacuation de la Ville Sainte ou la capitulation de sa garnison. Ce fut l’œuvre de la colonne de droite britannique qui, après avoir dépassé Hébron, atteignit Bethléem, et tourna Jérusalem par le Sud-Est. Cette colonne était complétée par un contingent français sous les ordres du général de Piépape et un détachement italien.
Le 5 décembre et les jours suivants, une attaque générale était prononcée au Sud et à 1’Ouest par les forces anglaises, tandis que la colonne alliée de droite poursuivait sa marche enveloppante, et le 9, les Turcs capitulaient. Tous les monuments des Lieux Saints étaient demeurés intacts.
Le 11 décembre, le général Allenby, entouré des commandants français et italien, des membres de la mission politique française, fit son entrée solennelle dans l’antique et religieuse cité.
Depuis ce brillant événement, la situation militaire n’a pas été sensiblement modifiée. Les avant-postes anglais ont été quelque peu avancés tant, au Nord-Est de Jérusalem qu’en plusieurs secteurs du front jusqu’au nord de Jaffa.
EN MÉSOPOTAMIE
Le général Marshall, nouveau commandant en chef du corps expéditionnaire anglo-indien, a fait attaquer le 3 décembre, par des colonnes convergentes, les positions ottomanes établies sur les collines de la rive droite de la Diala, au Nord de Deli-Abbas. Le 4, l’ennemi fut mis en fuite, refoulé au delà du défilé de Sakaltoutan, sur la route de Khanikin. Le lendemain, il était chassé du village de Karaténé, situé à 41 kilomètres au Nord de Deli-Abbas.
Un détachement russe, durant ces opérations, couvrait le flanc droit des forces britanniques.
LA GUERRE NAVALE
Mer du Nord.
Un convoi de six cargo-boats, dont un anglais et cinq neutres, allant de Norvège en Angleterre, escorté par les destroyers Partridge et Pellew et quatre chalutiers armés, a été attaqué le 12 décembre, à 11 h. 45 du matin, par quatre croiseurs allemands. Au cours de l’engagement, le Partridge, les chalutiers et les cargos (ceux-ci représentaient une jauge totale de 8000 tonneaux) furent coulés. Le Pellew parvint à se débarrasser de ses adversaires et, malgré ses avaries, il entra dans un port anglais. Plusieurs destroyers britanniques détachés d’une division de patrouilleurs arrivèrent à toute allure sur le lieu du combat et recueillirent une centaine de naufragés.
Les Allemands ont fait quelques prisonniers. Cette attaque rappelle celle du 17 octobre dernier, qui eut lieu sur la même ligne de communication et qui causa la perte de deux destroyers britanniques et de neuf cargos neutres.
Le même jour, à 4 h.30 du matin, trois destroyers allemands ont attaqué, à l’embouchure de la Tyne, les chalutiers anglais Ranta et Smart; ce dernier a été coulé ainsi que deux navires marchands neutres.
Ces engagements deviendront de plus en plus fréquents maintenant que les Allemands, complètement maîtres de la Baltique, peuvent disposer de toutes leurs forces pour toutes opérations dans la mer du Nord.
Le 18 décembre, vers 6 heures du soir, des aéroplanes allemands ont franchi les comtés d’Essex et de Kent, qu’ils ont bombardés; quelques-uns ont atteint Londres. Ils ont fait 85 victimes: 10 tués et 15 blessés. Un appareil ennemi a été abattu en mer au large de la côte de Kent.
Un autre raid, auquel vingt-cinq aéroplanes ennemis participèrent, avait eu lieu le 6 décembre, entre 1h.30 et 4 h.30 du matin; dans la direction de Londres. Il y eut, 7 tués et 22 blessés. Dégâts peu importants.
Atlantique. – Le destroyer américain Jacob Jones, commandant David Bagley, a été torpillé et coulé, le 6 décembre dans la zone de guerre.
Un communiqué du gouvernement portugais, du 12 décembre, annonce qu’un sous-marin allemand a bombardé Funchal, ville principale de l’île Madère, faisant plusieurs victimes et détruisant quelques maisons. C’est la seconde attaque de Funchal par un sous-marin.
Méditerranée. – Le croiseur français Châteaurenault a été coulé le 14 décembre par un sous-marin ennemi qui a été détruit. Il était affecté aux transports et avait à bord des passagers, tous militaires; ils ont été sauvés. Il manque dix hommes de l’équipage. Ce croiseur faisait partie d’une série d’essai de deux navires (l’autre est le Guichen) dits croiseurs-corsaires, de 8200 tonnes et 23 nœuds, peu armés et peu protégés, destinés à la guerre de course.
Adriatique. – La marine italienne, vient d’accomplir un bel exploit. Dans la nuit du 9 au 10 décembre, deux de ses torpilleurs, franchissant les champs de mines, passant à travers les barrages et trompant la vigilance des patrouilleurs, ont pénétré dans le port de Trieste et lancé chacun deux torpilles sur des navires de guerre au mouillage, dont l’un, le Wien, a été coulé. L’amirauté autrichienne le reconnaît. Ce bateau faisait partie d’une série de trois garde-côtes cuirassés de 5600 tonnes, lancés en 1895 et 1896.
Levant. – Le 13 décembre, le patrouilleur français Paris II, qui s’était distingué la veille au cours d’une opération sur la côte de Syrie, a été coulé par le feu des batteries turques dans le golfe d’Adalia. Une partie de l’équipage a atterri à Castelorizo. On croit que plusieurs hommes ont été faits prisonniers.
Le traité d’armistice russo-allemand
D’après l’article 5, concernant la guerre navale, l’armistice comprend la Baltique à l’Est du 15° degré de longitude Est du méridien de Greenwich, toute la mer Blanche et les côtes russes de l’océan Arctique et toute la mer Noire. Il n’est pas question du littoral russe du Pacifique, mais l’accord » contiendra des prescriptions destinées à empêcher, dans la mesure du possible, que les forces navales des parties contractantes se combattent dans d’autres mers « . Le gouvernement russe fournit la garantie que les forces navales de l’Entente qui se trouvent dans les eaux indiquées par le Traité ou s’y trouveront ultérieurement, se comporteront comme les forces navales russes. Comment le gouvernement maximaliste, que les puissances de l’Entente n’ont pas reconnu, peut-il donner une telle garantie. En tout cas, les forces navales de l’Entente dans la Baltique – il ne doit pas y en avoir ailleurs – sont peu importantes: quelques sous-marins et navires légers britanniques qui ne pourront d’ailleurs pas facilement sortir de cette mer devenue allemande.
Le traité consacre une situation déjà existante en fait depuis longtemps dans la Baltique, à travers laquelle les Allemands trafiquaient librement avec la Suède; au point de vue militaire il libère les forces navales allemandes d’opération dans cette mer et permet également à l’ennemi de disposer des sous-marins qu’il employait au blocus des côtes septentrionales de la Russie.
Dans la mer Noire, l’action navale russe n’a jamais été bien vive; mais l’ennemi pouvait redouter qu’elle le devint quelque jour; il n’a plus cette crainte et peut la parcourir en toute tranquillité. Les avantages que les Allemands tirent de ce traité les inciteront peut-être à entreprendre des opérations de grande envergure qui détermineraient la sortie des escadres de ligne. Ce serait le commencement de la guerre navale proprement dite, dont le but principal est la destruction de l’ennemi flottant.
Source : La Grande Guerre au jour le jour