Louis Guédet
Vendredi 26 mai 1916
622ème et 620ème jours de bataille et de bombardement
8h3/4 soir Pluie, température rafraîchie. Le matin audience civile, conseil de famille de Sainte Marie (suite au décès de Jean Marcotte de Sainte Marie, père de 4 enfants, le 6 octobre 1915 à la Ferme de Navarin), je vois mon confrère Peltereau-Villeneuve qui n’a qu’un souci, celui de quitter Reims au plus tôt. M. Charles Hurault, fort vieilli… (Charles Hurault, avocat, Président du Tribunal de Commerce de Reims en 1903, né en 1848 et décédé à Paris le 18 février 1917) une conciliation pour accusation calomnieuse, provoquée par un gendarme de Reims contre un de ses voisins. Singulière histoire qui n’a pas de sens, mais qui me fait connaître un motif de punition infligé au susdit gendarme par son capitaine, c’est à encadrer : Ce gendarme a une femme assez… légère. Celle-ci était appelée par le capitaine Théobald et le maréchal des logis Dorigny pour s’expliquer sur certains propos qu’elle aurait tenu contre… son prochain femelle, avait dans le feu de son explication appliquée une magistrale paire de gifles au maréchal des logis Dorigny, supérieur immédiat du gendarme mari de la citoyenne, qui n’assistait pas à la scène. Comment punir cette audacieuse ? Qu’à cela ne tienne, c’est très simple et écoutez-moi ce motif de punition : « 20 jours d’arrêts au gendarme François pour n’avoir pas empêché sa femme de frapper son supérieur !! » Je répète, le mari n’assistait pas à la scène ! Hein ! Qu’en dites-vous ? Je me tordais et mes greffiers aussi.
Après-midi inventaire avec levée de scellés pour mon confrère Béliard que je substituais. J’ai également fait le commissaire prévu. Rentré chez moi, écrit mon courrier, relu mes notes pour l’Académie. Je les recopie au net et… il est 9h du soir, il est temps de se coucher. Je souffre beaucoup en songeant à mes 2 grands !!
Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils
Paul Hess
26 mai 1916 – L’avis suivant est publié par Le Courrier :
Ravitaillement en pommes de terre.
Pour parer aux difficultés présentes du ravitaillement, la municipalité fera venir chaque semaine un ou deux wagons de pommes de terre, qui seront mises à la disposition des marchands et particuliers.
On peut dès maintenant se procurer des pommes de terre rondes blanches à 22,50 F les 100 kilos, et par 50 kilos au minimum ; ces pommes de terre devront être revendues au détail 0,25 F le kilo au plus.
Sous peu de jours, on recevra des pommes de terre rondes jaunes, cédées à 26,50 F les 100 kilos, pour être revendues au détail, au plus 0,30 F le kilo.
S’adresser à l’abattoir, de 8 h à 12 h et de 14 à 16 h 1/2, sauf le dimanche.
Paul Hess dans Reims pendant la guerre de 1914-1918, éd. Anthropos
Cardinal Luçon
Vendredi 26 – Lettre et rapport au Saint-Père. Nuit totalement silencieuse. + 13°. Changement de Division. La 52e s’en va. De 2 h. à 3 h. bombes sifflantes, et canons français. Via Crucis in cathedrali.
Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173
Vendredi 26 mai
Violent duel d’artillerie sur la rive gauche de la Meuse (secteur 304, front du Mort-Homme-Cumières). Nous avons progressé à la grenade dans les boqueteaux à l’est de Cumières. Pas d’attaque ennemie.
Sur la rive droite, les Allemands ont tenté une série d’actions offensives entre le bois d’Haudromont et la ferme Thiaumont. Elles ont été repoussées avec de lourdes pertes sauf sur un pont où les fractions ennemies se sont emparées d’un élément de tranchée.
Le tir d’une de nos pièces à longue portée a provoqué un incendie dans un dépôt de matériel allemand à Heudicourt (nord-est de Saint-Mihiel).
Dans la région d’Étain, une de nos escadrilles a livré bataille à un groupe d’avions allemands ; deux avions ennemis, atteints, ont dû atterrir.
Les Italiens ont arrêté les attaques autrichiennes dans la vallée de l’Adige et à l’est de cette vallée, infligeant à l’ennemi de grosses pertes.
Source : La Grande Guerre au jour le jour