Louis Guédet
Lundi 29 novembre 1915
443ème et 441ème jours de bataille et de bombardement
6h soir Verglas, pluie, vent, froid toute la journée, lugubre. Du canon au loin, difficile à distinguer (à cause du vent) vers Berry-au-Bac. Travaillé d’arrache-pied et je n’ai pas encore fini. J’ai encore pour ma soirée à voir 100 procès-verbaux de simple police pour demain à mon audience. Il y a moins de chiens !! Le hanneton des gendarmes (le gendarme est un des noms du hanneton des jardins) et de l’inspecteur de gendarmerie Charles se repose. Ce n’est pas dommage. Vu le Procureur pour une question de chambre. Je vais faire une séance à nos 2 Lefebvre pour délivrer un certificat de moralité à un fils des Laduré !! Nous marchons à travers toutes les illégalités !! Sur 7 membres nous nous réunissons à 2 !! et le quorum ! qu’en fait-on !! allons-y !! Une illégalité de plus ou de moins !! A cela près par le temps qui court !!!
Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils
Paul Hess
Dégel et verglas.
Paul Hess dans Reims pendant la guerre de 1914-1918, éd. Anthropos
Cardinal Luçon
Lundi 29 – Nuit absolument silencieuse. Verglas, pluie, à 8 h. 1/2 matin 2 degrés au-dessus de zéro. Le bruit court – non confirmé – qu’une grande bataille est engagée du côté de Châlons(1). Tranquillité complète à Reims.
Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173
(1) Aucune action d’envergure n’est engagée en Champagne à la fin de 1915. On peut remarquer la prudence du Cardinal par rapport aux informations non fondées.
Lundi 29 novembre
Canonnade sur l’ensemble du front. A Berry-au-Bac, une forte reconnaissance a été dispersée.
En Belgique, nous avons abattu un taube qui est tombé à la mer près de Westende. Un torpilleur et des canots allemands sont sortis pour le sauver. Un canot a été coulé par les hydravions alliés et par notre artillerie.
Dix avions français ont bombardé les hangars d’Habsheim, à l’est de Mulhouse : les hangars ont pris feu. Nos projectiles ont endommagé un aviatik. Vainement l’ennemi a essayé de nous poursuivre. Nous avons forcé un aviatik à atterrir ; un autre a capoté.
Près de Nancy, un avion de chasse français a abattu un avion allemand et contraint un autre à faire demi-tour.
En Macédoine, calme relatif dans notre secteur. Serbes et Bulgares combattent avec acharnement entre Prilep et Monastir. Les Allemands prétendent s’être rendus maîtres de la plaine de Kossovo.
Les Turcs ont essayé en vain de nous faire reculer à Gallipoli en lançant des gaz suffocants.
Les Russes ont progressé près de Mitau, en Courlande.
Les Anglais ont pris des mesures de police contre des agitateurs qui travaillaient les Bédouins de la frontière syrienne.
Source : La Grande Guerre au jour le jour