Louis Guédet
Mardi 17 août 1915
339ème et 337ème jours de bataille et de bombardement
5h soir Toujours nuit calme, le temps a fini de se remettre. On déménage toujours la cave pour sécher. Je suis de plus en plus navré. Je crois que j’en tomberai malade. Reçu lettre (rayé illisible) qui revient encore sur (rayé) et qui voudrait que (rayé) ce n’est pas possible. Être (rayé) ce serait le comble. La (rayé) de la cave, elle (rayé) de voir cela et de songer qu’il (rayé). Tout cela (rayé).
Il parait qu’il vient toujours vers St Martin quantité de troupes. Pourvu qu’il n’arrive rien à mes aimés. Entendu siffler et éclater 2 obus rue Chabaud, quand j’étais à l’autre bout. Que je suis las…
Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils
Cardinal Luçon
Nuit tranquille, sauf quelques gros coups par intervalles. Adressé à M. Frédéric Masson mon rapport qui partira pour Paris demain 18, rapport qu’il m’avait demandé pour faire récompenser les Religieuses de Reims qui exerçaient la bienfaisance. Vers 3 h., canonnade violente de part et d’autre. Bombes sifflent à 3 h. 1/4. Item à 6 h.-6 h. 1/2.
Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173
Juliette Breyer
Mardi 17 Août 1915. Mon bon tit Lou, ta belle petite fille pour la première fois aujourd’hui a dit papa. Pense donc, elle n’a que sept mois. Mais cela m’a fait mal au cœur. Si ça avait été un garçon je l’aurais appelé Charles : au moins en l’appelant ça aurait été une douceur. Charlotte, cela y ressemble un peu Je te dirai maintenant que j’ai la crainte de rentrer chez nous. J’y retrouverai tous tes souvenirs et vois-tu, je crois maintenant que je ne pourrais supporter ta disparition. Je perds des forces tous les jours. Je n’ai plus d’espoir. Pourtant je devrais me réjouir un peu : avec tous les travaux que l’on fait en ce moment pour repousser les boches, on parle d’une attaque d’ici un mois. Je voudrais être vingt ans plus vieille, mes petits seraient élevés, j’irais te retrouver.
En attendant je ne sais pas ce que je deviendrai. Je t’aime tant et je suis si triste.
Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) - Lettres prêtées par sa petite fille Sylviane JONVAL
De sa plus belle écriture, Sylviane Jonval, de Warmeriville a recopié sur un grand cahier les lettres écrites durant la guerre 14-18 par sa grand-mère Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) à son mari parti au front en août 1914 et tué le 23 septembre de la même année à Autrèches (Oise). Une mort qu’elle a mis plusieurs mois à accepter. Elle lui écrira en effet des lettres jusqu’au 6 mai 1917 (avec une interruption d’un an). Poignant.(Alain Moyat)
Mardi 17 août
Le combat d’artillerie redouble de violence sur un grand nombre de points du front.
Nos batteries causent de très fortes pertes à l’ennemi dans la région de Quennevières et arrêtent le bombardement sur le plateau de Nouvron. Elles endommagent les travaux allemands, entre Berry-au-Bac et Loivre.
Pour riposter à la canonnade dirigée contre Saint-Dié, nous faisons sauter les gazomètres de Sainte-Marie-aux-Mines; un autre tir de représailles détermine l’incendie d’une fabrique allemande, à l’est de Munster.
Un coup de mines sur une tranchée ennemie, entre Burnhaupt-le-Bas et Ammertzwiller, nous a permis de faire des prisonniers.
Les Russes ont infligé des échecs aux Allemands entre la Narew et le Bug. L’ennemi a été arrêté sur la rive gauche du Bug, le long de la voie ferrée de Siedlec à Loukow. Nos alliés ont fait 800 prisonniers. De nouvelles attaques ont été repoussées à Novo-Georgievsk. Succès russes sur la Zlota-Lipa et sur la Dounaïetz; rencontre avec les Autrichiens sur le Dniester.
Progrès italiens dans le val Popena, dans la vallée de Sexten, dans le bassin de Plezzo et sur le Monte Nero.
La Chambre grecque s’est réunie. Le candidat de M. Venizélos a obtenu pour la présidence, 182 voix contre 93 au candidat de M. Gounaris. Le cabinet Gounaris a démissionné.
Le baron Burian, ministre des Affaires étrangères d’Autriche-Hongrie, s’est rendu à Berlin pour discuter la question du régime de la Pologne, qui met aux prises les deux empires alliés.
Source : La guerre au jour le jour