Cardinal Luçon
Annonciation. Nuit tranquille. Dans la journée, canonnades et bombes par intervalles.
Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173
Juliette Breyer
Jeudi 25 Mars 1915. Hier mon tit Lou, je suis allée encore aux caves. Je m’ennuyais tant après mon coco. J’ai été mettre mon argent en ordre. Mais aujourd’hui mon Charles, je suis désemparée. Je serais heureuse de te demander conseil. La guerre aura été dure pour certains.
Ce matin je suis retournée chez nous et j’ai encore été saisie : au magasin il ne reste plus rien ; les voleurs sont encore revenus ; ils sont passés par la fenêtre de notre cuisine. J’en suis navrée. Je suis retournée chez Mignot et ils disent qu’il faut attendre 4 ou 5 jours, le temps que ça aille au général commandant la place et ensuite au général commandant le secteur. Pendant ce temps là, ils pourront voler le mobilier, j’en ai peur. Je me demande ce qu’il pourra me rester après la guerre. Mais je vais faire les démarches, cela ne peut durer si longtemps.
En parlant de mon argent, j’avais 15 francs qu’on avait donnés à André pour ses étrennes. Je lui avais pris un livret de caisse d’épargne. On ne sait pas ce qui peut arriver ; comme cela il ne les perdra pas.
Tiens, hier soir il y avait à peu près une heure que nous étions couchés, il est tombé 5 gros obus près de nous. J’ai été réveillée en sursaut. Cela arrive souvent mais on s’y habitue.
Je te quitte ; mille bécots et à demain. Ta petite femme qui t’aime toujours. Ta Juliette.
Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) - Lettres prêtées par sa petite fille Sylviane JONVAL
De sa plus belle écriture, Sylviane Jonval, de Warmeriville a recopié sur un grand cahier les lettres écrites durant la guerre 14-18 par sa grand-mère Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) à son mari parti au front en août 1914 et tué le 23 septembre de la même année à Autrèches (Oise). Une mort qu’elle a mis plusieurs mois à accepter. Elle lui écrira en effet des lettres jusqu’au 6 mai 1917 (avec une interruption d’un an). Poignant.(Alain Moyat)
Il est possible de commander le livre en ligne
Cette photographie tirée du site des Archives Municipales, en savoir plus sur l’article « Les services de santé rémois (août-décembre 1914) »
Jeudi 25 mars
A l’Hartmannsweilerkopf en Haute-Alsace, nos gains se sont encore accentués.
Les captures faites par les Russes à Przemysl sont d’exactement 2602 officiers et 117000 hommes. Des depêches ont été échangées entre M. Poincaré, le tsar et le grand-duc Nicolas. Le détachement russe qui avait fait un raid sur Memel s’est replié, mais nos alliés ont eu un avantage marqué dans la région du Niémen.
Les avions anglais ont fait un raid important à Hoboken, près d’Anvers. Il s’agissait de détruire des sous-marins allemands en construction. L’opération semble, au moins partiellement, avoir réussi. Des aviateurs français ont, de leur côté, survolé la région d’Ostende.
Les Turcs ont subi un grave échec près de Suez.
Guillaume II a fait déménager sa galerie artistique du château du Hohkoenigsburg, en Alsace.
Des désordres ont éclaté à Prague, en Bohême, où la population se plaint du manque pain.