Louis Guédet

Vendredi 8 janvier 1915

118ème et 116ème jours de bataille et de bombardement

5h soir  Toute la nuit dernière nous avons eu une canonnade formidable avec une tempête de vent et de pluie. Je ne crois pas que depuis le 1er septembre 1914 nous ayons entendu une canonnade semblable. Tous les canons tonnaient et partaient ensemble ! Pas moyen de dormir ! Il parait que nous avons pris définitivement tout le Linguet (dont nous n’avions que quelques maisons) sur la route de Witry-les-Reims ! On aurait aussi gagné quelque terrain à La Neuvillette et au Linguet ! Malheureusement pour nous cela ne change pas notre situation et nous pouvons toujours être bombardés !

Service à la Caisse d’Epargne de 9h à 11h, vu M. Charles Heidsieck avec son gendre René Ernoult, sous-lieutenant d’automobiles et interprète avec les anglais, qui venait chercher du Champagne pour les blessés, il est actuellement à Compiègne. Son père est à Fismes assez exposé. Il est proposé pour la Croix et le grade de lieutenant-colonel, il est actuellement commandant d’intendance. Il devrait plutôt être à l’arrière, mais à la suite d’un discours qu’il aurait prononcé sur la tombe d’un soldat où il aurait fait allusion à la vie future, il aurait été dénoncé et quelques jours après il était envoyé sur le front, après avoir reçu une lettre anonyme où on lui annonçait que le croyant à la vie future, il ne serait pas surpris qu’on l’envoyât incessamment sur le front pour lui procurer l’occasion de jouir de la Vie future le plus tôt possible. On ne peut être plus lâche ni plus cynique. Et c’est sur toute la ligne comme cela. La Franc-maçonnerie ne désarme pas.

La journée a été relativement calme malgré que notre canon n’ait cessé de tonner.

Que va être la nuit qui commence !! Pourvu que les allemands ne veulent pas faire payer à la Ville son insuccès de la nuit précédente ! Que je suis las !! Mon Dieu !

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Paul Hess

Aussi dès le matin, on se questionne. Qu’en est-il de cette formidable attaque de notre part ? On apprend bientôt, en ville, que notre tir d’artillerie a porté sur les tranchées allemandes où il y aurait eu des pertes plus élevées que pour nous. Néanmoins, le résultat de l’action n’est pas appréciable, paraît-il des tranchées abandonnées que nous avions pu occuper, ont été reprises par l’ennemi.

Cette fois, nous sommes impatients de savoir ce que nous annoncera officiellement le “communiqué”.

 Paul Hess dans Reims pendant la guerre de 1914-1918, éd. Anthropos

Cardial Luçon

Vendredi 8 janvier – Nuit terrible à partir de 10 h jusqu’au matin, surtout de 10 h à minuit. Obus, éclairs, détonations précipitées formidables. C’étaient les canons français qui prenaient l’offensive sur toute la ligne. Les Allemands répondent peu.

Dans la journée : canons français, obus allemands.

Visite aux Sœurs de St Vincent de Paul, rue de Bétheny.

Visite aux petites Sœurs de l’Assomption, rue du Jard.

Mort d’un Colonel, Lieutenant-Colonel Hébert, tué à la tranchée. Nuit tranquille en ville.

 Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. Travaux de l’Académie Nationale de Reims

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Eugène Chausson

8/1 Vendredi – Toujours du mauvais temps. Canonnade intense et bombardement toute la journée. Calme la nuit.

 Carnet d'Eugène Chausson durant la guerre de 1914-1918

Voir ce beau carnet sur le site de sa petite-fille Marie-Lise Rochoy