Abbé Rémi Thinot
25 JANVIER – mardi –
De 9 heures du soir, jusque 11 heures, une attaque furieuse. La fureur sauvage des mitrailleuses m’impressionnait profondément. Les canons allemands tonnaient éperdument…
Comme j’ai hâte d’aller aux tranchées ! Eux ne comprennent pas bien, mais moi, je suis sûr que les hommes verront une soutane avec quelque édification.
Extrait des notes de guerre de l'abbé Rémi Thinot. [1874-1915] tapuscrit de 194 pages prêté à Reims
Louis Guédet
Lundi 25 janvier 1915
135ème et 133ème jours de bataille et de bombardement
8h40 soir Journée calme, grise, très froide. Fort occupé par lettres et courses. Scellés chez Madame Veuve Collet-Lefort. Que deviendra cette affaire pour moi ? Je ne sais. J’aurais peut-être tiré les marrons du feu, mais j’ai encore là fait mon devoir.
A 8h1/4 bombes et obus sifflent au-dessus et proches de chez moi. Ma domestique me supplie de descendre. A quoi bon ? Je suis las de cette vie !! de cette comédie de descendre et de remonter. Je descends tout de même, et je remonte pour écrire ces lignes ! Quel martyre et combien durera-t-il encore de temps ?!
Demain matin mon pauvre enfant, mon aîné, mon cher Jean va passer la révision 1916. Que Dieu le protège !! et que Dieu compte tout ce que j’ai souffert pour me le garder !! me le conserver !
Ce sera pour moi demain 26 un jour bien pénible, bien dur à passer et puis après que m’annoncera-t-on ? Quand je vois tout ces jeunes hommes forts, vigoureux, se promener ici dans les rues ne pensant qu’à jouir et à s’amuser bien à l’abri des balles et des obus, car ce sont des embusqués. Cela me saigne le cœur quand je songe à mon pauvre enfant qui lui, s’il le faut, fera son devoir, plus que son devoir, tandis que ces lâches ne penseront qu’à bien manger ! Oh ! que Dieu les maudisse !!
Lettre du Procureur de la République, M. Henri Bossu, à Louis Guédet
Entête : Copie
Cabinet du Procureur de la République
Reims, le 26 janvier 1915
Confidentiel
Mon cher Maître,
J’ai le plaisir de vous faire savoir que je vous ai proposé à Monsieur le Garde des Sceaux pour l’inscription au livre d’or des civils en raison de votre belle conduite au cours des 5 derniers mois.
Bien cordialement à vous
Henri Bossu
Guédet, notaire, Reims
Mention en travers en bas : « Reçu à 4h1/4 soir »
Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils
Paul Hess
Éprouvant le besoin de respirer le bon air matinal avant d’aller m’enfermer au bureau, je me dirige, vers 7 h 1/2, du côté du champ de Grève. Au bas de l’avenue de la Suippe, je me heurte à un poteau portant l’inscription : « Défense de passer – zone militaire ». Je n’ai qu’à faire demi-tour, mais je monte alors le boulevard de la Paix pour voir à gagner le but de ma promenade par la rue Lagrive ; au bout de cette rue, la même indication m’oblige également à retourner sur mes pas. J’aperçois, en outre deux sentinelles, rue de Sillery, dont la présence est assez significative.
Renonçant alors à mon circuit quasi journalier d’avant la guerre, dans ces parages, je me contente d’examiner le terrain que je connais parfaitement et devant moi, je vois des abris dissimulant probablement des pièces d’artillerie, car leurs caissons se trouvent incomplètement cachés en contrebas, sur la gauche, dans l’emplacement longeant le mur de clôture de l’ancienne propriété Luzzani.
Paul Hess dans Reims pendant la guerre de 1914-1918, éd. Anthropos
Cardinal Luçon
Lundi 25 – Nuit tranquille pour la ville. Canonnade et fusillade française toute la journée. Récit de M. l’Archiprêtre sur le voyage de Mgr Baudrillart, à Rome.
Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. Travaux de l’Académie Nationale de Reims
Alfred BAUDRILLART | Académie française
Né à Paris, le 6 janvier 1859. Après une scolarité à l’école Bossuet, Alfred Baudrillart entra à l’École Normale Supérieure en 1878. Agrégé d’Histoire, docteur ès lettres et en théologie…
Eugène Chausson
25. Lundi. Temps gris. Toujours le canon jusqu’à 1 heure du soir. L’après-midi et la nuit, canonnade légère et bombardement
Carnet d'Eugène Chausson durant la guerre de 1914-1918
Voir ce beau carnet sur le site de sa petite-fille Marie-Lise Rochoy
Lundi 25 janvier
L’ennemi a bombardé la région de Nieuport-Lombaertzyde en Flandre, mais sans pouvoir exécuter l’attaque d’infanterie qu’il préparait. Ses rassemblements ont été, en effet, dispersés par notre artillerie.
Arras a été encore une fois bombardée, tandis qu’une vive fusillade s’engageait à proximité. Près de Vermelles, nous avons contraint les Allemands à évacuer une tranchée avancée; nous avons fait taire leurs canons aux alentours de la Boisselle. Nous avons jeté des obus, qui ont produit des effets utiles, sur leurs ouvrages entre Reims et l’Argonne, spécialement vers Beauséjour et Massiges.
En Argonne, où des combats violents se sont livrés, depuis plusieurs jours, dans la région du Four-de-Paris, nous avons gardé nos positions. En Alsace, nous avons progressé dans le massif d’Hartmannsweilerkopf et repoussé une offensive à Uffholtz.
Une escadre de croiseurs légers anglais a arrêté un raid naval allemand en mer du Nord. Le croiseur allemand Blücher, que montaient 847 hommes, a été coulé; deux autres bâtiments, parmi ceux qui l’accompagnaient, ont été endommagés. Les pertes anglaises sont insignifiantes : quelques hommes blessés.
M. Millerand, ministre de la Guerre, qui s’était rendu à Londres, est revenu à Paris.
M. Bryan, secrétaire d’État de l’Union américaine répond à l’Allemagne par une fin non-recevoir : on sait que le cabinet de Berlin avait protesté contre les fournitures faites par l’Amérique aux alliés.
La Hollande déclare officiellement qu’elle se tient toujours sur ses gardes.