Paul Hess

Ce jour, une pluie de shrapnells s’abat sur le faubourg de Laon. Sur la place Amélie-Doublié, les toitures de plusieurs immeubles, ainsi que leurs murs de façade ou d’arrière sont criblés de mitraille. Dans la maison n°8, où habite mon beau-frère Montier, des éclats assez gros et des morceaux de plomb (balles déformées) sont trouvés en haut de l’escalier où ils ont pénétré en trouvant la couverture et les enduits intérieurs.

Le Courrier de la Champagne publie aujourd’hui l’article suivant :

Si le Courrier s’imprimait à Paris…

Notre numéro d’hier sera un numéro à peu près unique dans les fastes journalistiques de la guerre et nous défions L’Homme enchaîné lui-même d’en produire beaucoup de pareils. Avis aux collectionneurs, car un exemplaire du Courrier du 1 janvier 1915n constituera plus tard une pièce extrêmement rare.

Anastasie a donc cru devoir opérer des coupures plus sombres que jamais dans nos colonnes. Ferons-nous remarquer une fois de plus que la plupart des passages censurés ont été publiés en même temps que par nous, sinon avant nous, dans les journaux de Paris vendus à Reims – voire même pour l’un de ces passages, au Journal Officiel ! Alors quel peut bien être l’effet de ces suppressions dans notre seul organe ? Mais nous avons épuisé à cet égard et en vain tous les appels possibles à l’égalité… (blanc)… Il n’y a donc plus lieu d’insister. Toutefois nous ferons remarquer que si nous prenions le parti de faire imprimer notre journal à Paris ou à Épernay, nous serions sûrs d’être traités sur un pied d’égalité avec tous nos confrères de France.

Nous lasserons-nous de publier notre journal ? Non, cent fois non. Nous éprouvons certes une peine profonde lorsqu’au retour de la censure nous voyons nos pauvres morasses lamentablement criblé des de ratures et notre pensée incomprise. Mais une grande idée nous soutien, qui nous a fait tenir bon jusqu’ici à travers vents et marées ; l’idée que nous pouvons être utiles à nos compatriotes malheureux et que notre dernier devoir est de demeurer à côté d’eux, de les réconforter quotidiennement et de servir leurs intérêts, dans la mesure où ils sont compatibles avec la défense nationale.

 Paul Hess dans Reims pendant la guerre de 1914-1918, éd. Anthropos

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Cardinal Luçon

Mardi 12 – Nuit tranquille. Visite au Général de Pélacot.

Service funèbre pour soldats, caves Roederer.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. Travaux de l’Académie Nationale de Reims

Eugène Chausson

12/1 Mardi – Toujours du mauvais temps. Violente canonnade et fusillade dans le faubourg de Laon et Neufchâtel et dans la direction de Berry-au-Bac. A 5h 1/2 du soir, il fait encore un temps affreux et le silence parvient à renaître mais peut-être n’est-ce que du provisoire car dans la direction de Soissons, avec la canonnade qui s’y passe depuis quelques jours, il doit s’y préparer un coup terrible en vue du débordement de l’Aisne. nuit assez calme.

Carnet d'Eugène Chausson durant la guerre de 1914-1918

Voir ce beau carnet sur le site de sa petite-fille Marie-Lise


Mardi 12 janvier

Dans la région d’Ypres, notre artillerie a bombardé efficacement celle de l’ennemi et détruit des tranchées. Entre Lys et Oise, nous avons pris une tranchée près de la Boisselle. Au nord de Soissons, nous avons progressé après avoir repoussé une attaque allemande : nous sommes solidement établis sur un éperon dominant. Duels d’artillerie en Champagne; au nord de Perthes, nous avons encore saisi quelques tranchées, dessinant nettement notre offensive; prés de Beauséjour, de nouvelles contre-attaques allemandes ont été refoulées par nous. En Argonne et sur les Hauts-de-Meuse, aucun incident sérieux; dans les Vosges, on ne peut signaler qu’un léger bombardement de Vieux-Thann et des hauteurs de Steinhach par les Allemands.
Les avions germaniques ont vainement essayé d’atteindre la côte anglaise; toutes les mesures y avaient d’ailleurs été prises pour les recevoir.
Les réservistes roumains sont décidément convoqués : trois classes pour le 23, et trois classes pour le 29.
Les combats en Pologne continuent à être défavorables aux Allemands qui s’obstinent toujours à reprendre l’offensive aux mêmes endroits.
Le roi Albert I a protesté auprès du pape contre le traitement infligé au cardinal Mercier.
M. Ramsay Mac Donald, l’un des chefs du parti ouvrier anglais, a exprimé l’avis que la Grande-Bretagne devrait introduire chez elle le service militaire obligatoire.
La presse américaine se montre satisfaite de la réponse de l’Angleterre au sujet de la liberté du commerce dans l’Océan.
Le bourgmestre de Dortmund, après beaucoup d’autres, invite les Allemands à restreindre leur consommation de denrées alimentaires, afin d’éviter la disette.

Source : La Grande Guerre au jour le jour