Abbé Rémi Thinot
9 SEPTEMBRE : On dit dans le Petit Parisien que Reims est bombardée, détruite brûlée… Çà va bien et nos gens d’Abondance vont être rassurés. C’est du moins ce qu’un Consul d’ici aurait fait lire à une personne.
Et j’ai su – et vu – ce matin qu’une bombe avait frappé directement la cathédrale – au transept nord – une autre a éclaté au-dessus de ce transept – voir les détails que je reporte plus loin.
Ce qui est encore évident ; c’est qu’il arrive ici ce matin de grandes quantités de blessés allemands. Des troupes en nombre ont traversé la ville de grand matin, se dirigeant vers Châlons. Le canon tonne toujours par-là, très rudement et sans discontinuer…
La vie devient douloureuse, non seulement rien ne vous prend des occupations ordinaires, mais il semble qu’il n’y ait plus de demains, ou bien des demains si incertains.. ! qu’ils sont irréels. St il faut du réel pour éveiller l’activité. Puis, c’est la séparation radicale d’avec tous ceux qui composent votre vie. Pas de nouvelles… combien de temps encore? C’est la plainte dite et redite tous les Jours… Sortirons-nous même un Jour de notre île?
Nos gardiens sont dans une fièvre troublante. Sont-ils battus là-bas, là où le canon ne cesse de tonner… Mais, même s’ils sont battus, d’autres légions viendront remplacer celles qui sont écrasées, leur nombre est écrasant…
Et là-bas, en Savoie, que faites-vous, mes amis ? La montagne doit être belle, séduisante, d’un calme divin… Les soirs doivent être frais pour l’âme comme pour le corps…
Ô sainte Création, œuvre adorable, fruit de Dieu bon et miséricordieux… ô paix de la montagne, descends sur mon cœur troublé !
Les aéroplanes brûlent l’air… l’odieux ronflement ! C’est encore un biplan allemand à la rude Croix de Malte noire. Il vire par-là, du côté où le sang coule… Pauvre France ! Chère Patrie si coupable.. !
La vie est lourde en ce moment !
Dans mon petit jardin, une rose toute tendre, parmi le désert des feuilles brûlées et les buis déjà fatigués… (illisible) et s’épanouit. Est-ce un gage d’espérance ?
Lumière de mon Dieu, brillez sur moi ; chassez les ténèbres de la nuit…
Extrait des notes de guerre de l'abbé Rémi Thinot. [1874-1915] tapuscrit de 194 pages prêté à ReimsAvant en 2017 pour numérisation et diffusion par Gilles Carré.
Juliette Maldan
Mercredi 9 septembre 1914
Comme hier, je passe ma matinée aux fourneaux de la rue Brûlée, à aider les Sœurs qui sont débordées.
C’est là une procession de misères, qui s’allonge chaque jour.
La ville, qui a dû verser toutes ses réserves pour les indemnités de guerre exigées par l’ennemi, s’est vue obligée de cesser les distributions de secours.
C’est donc un défilé navrant où passent côte à côte des mendiants en loques, des ouvriers sans travail qui meurent de faim, puis des gens qui n’ont pas l’habitude de demander : mères de famille, petits employés correctement vêtus qui tendent leur marmite avec une gêne qui serre le cœur.
On ne sait auquel entendre tant ces malheureux sont nombreux. 800 rations en moyenne sont distribuées chaque matin.
L’autorité allemande semble désireuse de voir rentrer dans leurs pays les émigrés belges et ardennais.
Des affiches sont placardées en ville pour les y inviter. Un exode recommence donc dans l’autre. Nous voyons repasser sous nos fenêtres, les lourds charriots belges avec leurs bizarres entassements. Mais les lignes de chemin de fer n’existant plus, c’est surtout à pied que se font ces tristes retours vers le foyer que prétend maintenant sauvegarder l’autorité allemande.
Parmi tant d’autres choses pénibles, nous souffrons du manque absolu de nouvelles. C’est dur de sentir tous les fils coupés avec ceux que l’on aime !
Et puis, que se passe-t-il dans le reste du monde ! Mystère ! et impossible de rien savoir. Par exemple, nous ignorons encore si nous avons un pape.
Au point de vue de la guerre, les officiers allemands annoncent sans cesse de nouvelles grandes victoires de leurs troupes. Ceci ne trompe personne, mais tout de même on aimerait connaître la vérité !
Le canon gronde toujours dans le lointain.
Reims semble plutôt un chemin de passage pour les troupes ennemies, qu’un centre d’occupation sérieuse.
Ils n’ont pas arboré leur drapeau et c’est toujours le, drapeau blanc qui flotte sur l’Hôtel de ville et sur la cathédrale.
Le général allemand qui avait pris possession de la ville a été successivement remplacé par un colonel, puis par un capitaine. C’est nous faire peu d’honneur !
L’Etat-Major ayant annoncé l’intention de ne laisser que cinq cents hommes de troupe pour garder la ville, le conseil municipal a dû en réclamer au moins mille. Il est impossible en effet que l’ordre soit assuré avec cette poignée d’hommes, et si quelque incident survenait, la ville serait rendue responsable et livrée aux pires représailles.
Journal de Juliette Maldan, grand-tante de François-Xavier Guédet, retranscrit par lui-même.
Louis Guédet
Mercredi 9 septembre 1914
9h Temps un peu nuageux, gris, lourd. Vu passer du train militaire allemand descendant la rue Libergier. Il y en avait une centaine environ.
L’autorité militaire a décidée que 2 notables désignés par la Mairie coucheraient comme otages une nuit à l’État-major général. Quand sera-ce mon tour ? Cela m’est bien égal !! Si je savais seulement que ma femme et mes enfants sont en sûreté.
Je viens de dresser une liste de tous les fonctionnaires publics ou ministériels (notaires, avoués, huissiers et commissaires-priseurs) pour signaler ceux qui sont, soit à l’armée, soit filés, soit restés et ceux qui ont enlevé leurs plaques et panonceaux. Ce sera une manière de tuer le temps et ce sera un document intéressant pour l’avenir.
11h Il parait que les allemands ont reculés de 15 kilomètres, hier. Mais ils sont tant et tant !!! J’ai déjà relevé mes listes. Reste 2 notaires : Peltereau-Villeneuve et moi, 2 huissiers : Villet et Touzet (à vérifier), un seul et unique avoué Dargent.
Gobert du Courrier de la Champagne me dit qu’un de ses rédacteurs a vu un numéro récent du Matin qui annonçait en manchette l’entrée des cosaques de Rennenkampf (commandant la 1ère armée russe) dans Berlin qui serait à feu et à sang. M. Gobert l’a même dit à un Général Allemand à qui il avait à causer, et ce dernier serait devenu rouge tomate, puis se ressaisissant il aurait répondu que c’était faux… et qu’au contraire ils avaient fait 80 000 prisonniers russes.
2h10 L’abbé Andrieux est venu bavarder avec moi. C’est lui qui a conduit l’employé envoyé par la mairie en haut de la Grande tour du Grand portail, côté nord, pour arborer le drapeau blanc. Il me raconte ses impressions : Dans l’escalier intérieur ils ont été aplatis tous deux sur les marches par le vent d’un obus. C’était formidable. Un avion allemand est venu les survoler pendant qu’ils attachaient le drapeau blanc.
Il me disait que causant avec un aviateur polonais allemand, celui-ci ignorait la mort du Pape Pie X, et quand l’abbé lui dit que les russes avançaient sur Berlin, qu’ils étaient il y a quelques jours à Koenigsberg, celui-ci disait : « Vous n’en tuerez jamais assez de ces allemands, et je souhaite que vous soyez vainqueurs, car être sous leur joug, c’est de l’esclavage. Dieu vous en préserve ! »
Il ignorait le manifeste de Nicolas II promettant la reconstitution de la Pologne ! Il n’en pouvait croire ses oreilles et il murmurait : « Je vais dire cela à 5 de mes autres camarades qui sont aussi polonais ! » Il en était tout ému.
4h1/2 Vu Dollé pharmacien, revenu de conduire sa femme à Épernay. Cette ville a été pillée, mais il parait que les allemands ont été écharpés du côté de Vertus. Pourvu que ma femme et mes enfants soient sains et saufs !! Je puis dire que je souffre de tant d’incertitude. Quand aurais-je des nouvelles ! Et quelles nouvelles ? Je n’y résisterai pas !
Je me force à sortir, à m’occuper, mais je suis comme un somnambule !
Le bruit court que le commandement aurait été retiré au Général Joffre (source allemande, par conséquent fort sujette à caution).
9h soir Vers huit heures, entendant des quantités de voitures passer rue de Vesle, je me décide à pousser jusque là. Ce sont des voitures de blessés allemands qui arrivent. Elles sont nombreuses et nous allons en être inondés. Je rencontre M. Ochet, interprète, qui nous raconte ainsi qu’à M. (en blanc, non cité) propriétaire du Grand Hôtel, qu’il vient de quitter la Mairie où est arrivé un nouveau gouverneur de Reims, un député du Reichstag, sous-secrétaire d’agriculture, qui a annoncé à la Municipalité que l’on s’est battu dans la région de Montmirail pendant 4/5 jours et que maintenant 3 de nos armées sont encerclées autour de Paris et qu’en principe la campagne est terminée, et que Reims va devenir un chef-lieu de région très important qui deviendra probablement le quartier général Impérial avec l’Empereur. Que nous devons nous souvenir qu’eux les saxons en 1866 ont soufferts comme nous en ce moment et qu’il devine les pensées qui nous agitent, etc…
Alors c’est la fin de la France ??!! Non cela n’est pas possible !… (Rayé). Ce saxon mâtiné de prussien nous ment !! Et le Droit, la Justice, l’Humanité ne sont même pas des mots ! Et le mensonge ! La fourberie ! La déloyauté sont les maîtres du monde !
9h1/2 soir Un aéroplane marqué d’un grand trèfle noir vient de passer vers la place d’Erlon, traîné en 2 parties par deux autos !
Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils
Paul Hess
Une affiche officielle, avec l’en-tête « Ville de Reims » et intitulée « Organisation de l’administration municipale », a fait hier son apparition sur les murs ; elle n’a pas été sans surprendre beaucoup de ceux de nos concitoyens qui ignoraient les défaillances qui se sont produites au sein de la municipalité, ces temps derniers.
C’est la publication d’un arrêté du maire, daté du 7 septembre 1914, rapportant les dispositions de celui qu’il avait pris le 19 mai 1912, concernant la délégation des adjoints, à la suite des dernières élections municipales.
L’administration municipale nommée dans la séance du conseil municipal du 19 mai 1912, était composée de :
MM. le Dr J. B. Langlet, maire et 1 – Chappe Paul, avocat 2 – Dr Knoeri Jean 3 – Rousseau Louis Emile 4 – Lesourd Edmond, prof. 5 – Dr Jacquin Adjoints
Or, MM. C… et L…, ayant quitté Reims et abandonné leurs postes, le maire, en l’absence du Dr Knoeri, mobilisé, s’est vu dans l’obligation de procéder au remplacement de ses deux ex-collaborateurs et il a choisi MM. Emile Charbonneaux et de Bruignac, conseillers municipaux au dévouement sûr et dont il apprécie certainement la compétence, afin de compléter sans tarder l’administration municipale.
D’après le dit arrêté, dont voici la teneur exacte, les attributions y seront ainsi réparties :
« Organisation de l’administration municipale. Nous, maire de la ville de Reims,
Vu l’arrêté de la mairie du 19 mai 1912, concernant la délégation des adjoints,
Arrêtons ce qui suit :
Art. Ier – M. Knoeri, adjoint au maire, actuellement sous les drapeaux, est déchargé de toutes attributions spéciales.
Art. 2 – M. Rousseau, est délégué pour exercer en notre lieu et place, les fonctions de maire, en ce qui concerne l’octroi, la police, la bureau de mesurage et de conditionnement, les foires et marchés, les contributions directes et indirectes, les listes électorales, l’état civil, les naturalisations, les cimetières et inhumations, l’assistance publique, la prévoyance sociale, les visas et légalisations.
Art. 3 – M. ,Jacquin , est délégué pour exercer en notre lieu et place, les fonctions de maire, en ce qui concerne le service de l’hygiène publique, les subventions municipales, la protection des enfants du premier âge, le fonctionnement de l’abattoir, les bains et lavoirs publics, les écoles primaires, les bibliothèques populaires, les sociétés de gymnastique et de tir, les sapeurs pompiers, les subventions aux sociétés, les affaires militaires, les adjudications de l’armée, les fêtes publiques.
Art. 4 – M. Emile Charbonneaux, conseiller municipal, est adjoint à l’administration municipale et délégué pour exercer en notre lieu et place, les ,fonctions de maire, en ce qui concerne l’alimentation et le ravitaillement des troupes, les assurances, les postes et télégraphes, les tramways, les chemins de fer, l’agriculture, les habitations ouvrières.
Art. 5 – M. de Bruignac, conseiller municipal, est adjoint à l’administration municipale et délégué pour exercer en notre lieu et place, les fonctions de maire, en ce qui concerne la voirie, l’éclairage public, les égouts, la navigation, les cours d’eau, les promenades et plantations, les alignements, le contentieux.
Art 6 – Sont spécialement réservées au maire, les fonctions relatives à toutes les autres affaires, notamment celles concernant la bibliothèque et le musée, le personnel, Ies finances, la Bourse du travail, les syndicats professionnels, les sociétés mutuelles, les travaux d’architecture, le domaine communal, les baux et ventes, les écoles pratiques de commerce et d’industrie, l’école professionnelle et ménagère, le cours d’apprentissage, l’école régionale des arts industriels, l’enseignement secondaire, le théâtre, le cirque, la musique municipale, l’école de musique.
Art. 7- Sont, en outre, délégués aux adjoints, sans distinction entre eux, les certificats, signatures de copies et paraphes des registres soumis à cette formalité, ainsi que la présidence des commissions municipales et, s’il y a lieu, des commissions administratives et permanentes.
Art. 8- Les adjoints sont autorisés à se suppléer au besoin dans l’exercice des fonctions à eux déléguées, ainsi qu’à nous suppléer également au besoin dans l’exercice de celles que nous nous sommes réservées.
Art. 9- Le maire agira et statuera par lui-même toutes les fois qu’il le jugera convenable dans les affaires dépendant des parties du service qui font l’objet des présentes délégations.
Art. 10- Sont rapportées toutes dispositions de l’arrêté du 19 mai 1912, contraires au présent arrêté.
Reims, le 7 septembre 1914 Le maire, Dr Langlet. »
La lecture de cette affiche donne naturellement lieu à bien des commentaires.
L’attitude des élus qui se sont dérobés à leur devoir devant le danger, alors que le maire signait de si belles déclarations dans le but de rassurer la population, les 2 août et 3 septembre 1914, est très sévèrement jugée. Ainsi, il ne les rend pas vaines, ces déclarations ; il leur garde toute la valeur qu’il a voulu leur donner. Si les habitants avaient eu de l’inquiétude à ce propos, ils seraient maintenant rassurés.
La décision et le choix du Dr Langlet sont unanimement approuvés, car dans les circonstances très graves que nous traversons, on ne se paye pas de mots. Les Rémois sont très heureux de voir dorénavant des hommes résolus à la tête de l’administration de la ville, et tout en reconnaissant que chacun est en droit de songer à sa sécurité personnelle, ils estiment inadmissible qu’on se libère, par le départ, d’une magistrature que l’on a briguée mais n’offrant plus que des obligations et des charges périlleuses, comme l’ont fait les deux ex-adjoints.
– Nous tombons, aujourd’hui, de surprise en surprise.
Dans Le Courrier de la Champagne du 9, nous avons, en effet, la stupéfaction de lire un long article intitulé « Impressions d’une personnalité rémoise sur les causes du bombardement ».
Vient ensuite le préambule que voici : Une personnalité rémoise qui, de par ses fonctions, a suivi de près les événements de ces jours derniers, nous communique ses impressions sur les véritables causes du bombardement et sur l’inexacte interprétation des faits par une partie de la population rémoise, – et l’article explique assez longuement que le bombardement du 4 fut le résultat d’une erreur. La personnalité rémoise appuie ses dires principalement sur la présence d’officiers allemands à l’hôtel de ville, alors que des obus tombaient rue de Mars.
Donc, on tient à nous persuader qu’il y a eu erreur.
J’ai lu et relu cette thèse, qui paraît faire écho aux déclarations du commandant d’armes déjà exprimées dans le journal d’hier, et je garde les premières impressions qu’il m’a été donné de ressentir directement, dès le déclenchement du bombardement, en persistant à supposer que, s’il y a eu erreur, ce n’est pas dans le sens que l’on veut donner à ce mot.
Le vendredi 4 septembre, ainsi que je l’ai noté, j’ai vu arriver, tandis que causant à un ami, je me trouvais sur le trottoir gauche, à l’entrée de la rue Cérès, deux automobiles bizarrement armées. Les officiers qui les conduisaient, ont contourné la statue de Louis XV, pour filer vers la rue de Vesle, par la rue Carnot, à une allure telle que la pensée m’est venue tout de suite qu’ils devaient connaître Reims.
Lorsque après avoir appris que je ne pourrais pas passer vers la place de l’hôtel de ville, je me suis retrouvé, environ une demi-heure plus tard encore à l’entrée de la rue Cérès, à peu près devant le café Louis XV, les deux mêmes voitures automobiles, revenant directement par la rue Carnot sont repassées, retournant en vitesse dans la direction de Witry-les-Reims et, comme les premiers obus, tombant à ce moment rue de Vesle, arrivaient en somme derrière elles, qu’en outre le tir s’allongeait insensiblement, j’ai eu nettement et spontanément l’impression que les officiers les pilotant venaient de donner l’ordre de tirer.
Il est vrai qu’il y avait d’autres officiers allemands à ce moment, à l’hôtel de ville. Ces officiers des services, intendance ou réquisitions, n’avaient-ils pas été trop pressés de venir à Reims dans la matinée, après avoir appris la veille au soir, le raid audacieux du capitaine de hussards, dont l’exploit avait dû courir comme une traînée de poudre les formations ennemies environnant notre ville et prêtes à s’y précipiter ? Étaient-ils d’accord avec le commandement qui, lui, avait fixé l’entrée de ses troupes d’occupation pour l’après-midi, à 16 heures ? En résumé, devaient-ils se trouver à l’hôtel de ville à cette heure ?
Un malentendu entre les Allemands à ce sujet ne serait-il pas ce qui pouvait être facilement baptisé « erreur » à notre endroit, mais après coup, – surtout, lorsque pour faire admettre cette version, on pouvait y ajouter l’histoire assez embrouillée de parlementaires allemands envoyés à la Neuvillette et non rentrés dans leurs lignes.
Je serais porté à laisser la personnalité rémoise avec ses impressions et à croire qu’il n’y a eu aucunement « erreur » sur ce qui avait été prévu nous concernant, nous Rémois – malgré les regrets exprimés par les autorités militaires allemandes.
– Une petite note paraît dans le journal de ce jour, afin de rassurer bien des personnes qui se sont émues, en voyant les succursales des maisons d’alimentation fermées et ont émis des craintes de disette.
Il est expliqué que les réapprovisionnements sont très difficiles en ce moment, tant à cause de la suppression des moyens de transport et de la disparition de la main-d’œuvre que par suite des grosses quantités réquisitionnées par l’autorité militaire allemande, mais que l’administration municipale se préoccupe constamment de la question et qu’elle fera tout le nécessaire pour assurer, au fur et à mesure des besoins, le ravitaillement de la population.
– Aujourd’hui, des ouvriers vitriers de la maison Minelle, rue de l’Université 55 sont venus pour commencer à travailler au remplacement des cent quatre-vingts vitres environ, brisées dans les magasins du mont-de-piété, par les déplacements d’air, pendant le bombardement du 4 courant.
Paul Hess dans La vie à Reims pendant la guerre 1914-1918
Paul Dupuy
Un régiment d‘Infanterie qui débouche de rue Chanzy et prend la rue de Vesle, se
dirigeant vers le Canal, nous réveille à 5H3/4, au son de ses clairons.
Il semble ne comporter qu’un effectif fort réduit, bien qu’ayant ses voitures au
grand complet.
Vers 10H défile en sens contraire un long convoi d’automobiles-ambulances toutes
garnies de malades ou blessés.
Paul Dupuy - Document familial issu de la famille Dupuis-Pérardel-Lescaillon. Marie-Thérèse Pérardel, femme d'André Pérardel, est la fille de Paul Dupuis. Ce témoignage concerne la période du 1er septembre au 21 novembre 1914.
Source : site de la Ville de Reims, archives municipales et communautaires
Jeudi 9 septembre
Actions d’artillerie : en Belgique, au nord d’Ypres; en Artois, autour d’Arras; dans le secteur de Roye; entre Oise et Aisne; en Champagne, entre Reims et l’Argonne, et en Woëvre septentrionale.
Dans la partie occidentale de l’Argonne, les Allemands ont, après un bombardement intense, avec large emploi d’obus suffocants, prononcé contre nos positions une attaque menée par deux divisions. Ils ont, sur quelques points, pris pied dans nos tranchées avancées. Mais une violente contre-attaque de notre part a déterminé leur échec dans leur nouvelle tentative de rupture de notre front.
Pour riposter au raid des taubes au-dessus de Nancy, une escadrille française a lancé des obus sur les établissements militaires de Frescaty et sur la gare des Sablons, à Metz.
Trois zeppelins ont opéré au-dessus de la côte orientale de l’Angleterre: dix morts, quarante-trois blessés.
La situation demeure stationnaire sur le front russe. Le grand-duc Nicolas est chargé, par rescrit du tsar, du commandement de l’armée du Caucase.
Le sultan de Turquie a lancé un suprême appel à l’empereur d’Allemagne. La situation, en effet, devient de plus en plus précaire à Constantinople.
Les Italiens ont remporté un succès dans le secteur de Tolmino.
Plusieurs bâtiments français ont été coulés par un sous-marin allemand dans l’Atlantique (au large de la pointe de la Coubre et de Belle-Isle).