Louis Guédet

Vendredi 14 février 1919

1617ème et 1615ème jours

9h matin  Il n’a pas gelé, le temps est couvert ce matin et il ne dégèle cependant pas. Je suis toujours aussi désolé ! Je ne vois réellement plus clair à ma situation et dans l’avenir. J’ai le cœur déchiré quand je songe à ma femme et à mes enfants ! et l’âme toute bouleversée ! Quand je me trouve seul, je laisse libre cours à ma douleur, à ma désolation et je pleure désespérément !! Que dirais-je de plus, je suis dans un état lamentable et je m’en vais comme un désespéré. (Rayé) il ne me (rayé) au moins de (rayé) il est (rayé)! Non ! Mais les (rayé).

6h soir  Rien de saillant. Courrier assez chargé. Répondu. Lettre de Melle Marie Devédeix qui a réellement souffert de privations à Soye près de Namur, mais toujours la même ! On nous annonce une maison à louer 89, boulevard de la République, cela me laisse indifférent. Peu m’importe où j’irai abriter mon infortune, ma misère et ma détresse douloureuse. Je n’ai que des souffrances à attendre, alors peu importe l’endroit où je les aurai à subir… Je ne cesse de pleurer, en cachette, mais cela devient du désespoir, car je ne vois aucune solution à mon infortune !! Je n’ai plus aucun espoir !! et je n’ai à en attendre aucun de qui et d’où que ce soit, physique ou moral, divin ou humain !! Tout me manque ! Tout m’écrase de sa fatalité. Oh ! que la Mort est lente à venir !!…

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

 Cardinal Luçon

Vendredi 14 – Visite du Lieutenant Colonel du Bellet ; de M. Dupuit de retour à Reims

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Poincaré et le Lieutenant Colonel Du Bellet de la Croix Rouge américaine

Vendredi 14 février

Le Conseil de guerre interallié, qui s’est tenu au quai d’Orsay, en a terminé avec le débat sur le renouvellement de l’armistice. Il a décidé que la négociation comporterait deux phases.
1° On enjoindrait à l’Allemagne d’exécuter toutes les clauses anciennes de l’armistice et de cesser toutes opérations contre la Pologne. Alors, une prolongation très brève de l’armistice serait admise, avec faculté pour les alliés, de rompre la trêve après un préavis à courte échéance;
2° La seconde phase comporterait l’établissement d’un accord plus stable – qui se substituerait aux conventions successives de prorogations. On exigerait de l’Allemagne des garanties telles qu’elle cessât d’être une menace éventuelle pour la paix.
Si elle s’inclinait, elle aurait droit à un certain ravitaillement en denrées alimentaires et en matières premières: la priorité étant toujours réservée aux nations alliées et spécialement à celles qui auraient le plus souffert pendant la guerre.
La commission de la Société des Nations a abouti sur presque tous les points, à un accord. M. Bourgeois a obtenu des modifications importantes.
Le gouvernement allemand s’est constitué. Scheidemann prend la présidence du Conseil.
Le corps expéditionnaire français a quitté l’Italie.
M. Lloyd George a fait une déclaration au Communes sur la question russe.

Source : La Grande Guerre au jour le jour