Louis Guédet
Dimanche 30 juillet 1916
687ème et 685ème jours de bataille et de bombardement
9h matin Temps magnifique, mais nuit très mauvaise, impossible de dormir à cause du canon vers Sillery. Quelle nuit. Je suis éreinté.
5h soir Déjeuné au Cercle avec Charles Heidsieck, Mme André Lambert (Madeleine, 1886-1952), Mlle Margotin sa sœur (Simonne ou Henriette), Hurault de La Haubette (avocat, 1848-1917), Gérardin-Dutemple (1864-1937), Robinet, Lainé père (Albert Lainé, ancien conseiller municipal (1843-1927)), Lelarge, Lieutenant-colonel Colas. Causé d’un tas de choses, rien d’intéressant. Quitté aussitôt sorti de table pour me rendre au Palais pour voir le Procureur Général Herbaux. Il y avait avec moi Dondaine et Lépinois. C’est tout. Le Procureur Général a été très aimable et nous a couverts de fleurs. Cela a duré 10 minutes. Le Procureur de la République de Reims a beaucoup insisté sur moi. Je lui ai renvoyé la balle.
Rentré ici pour finir mon courrier, écrit à Mgr Landrieux, évêque de Dijon… Me voilà libre et prêt à partir.
Je suis fort fatigué, et je me sens en quittant le Palais que j’étais réellement ébranlé. Je ne suis guère fort.
Je viens d’apprendre la mort de ce pauvre Jules Maugin, mon seul et unique camarade de conscription. Il est du 28 avril 1863, et moi du 27 mai. Camarade d’enfance et de village. Cela m’a péniblement impressionné, que de tristesse, de deuil. Tout cela me fait beaucoup de mal et avance mes jours. Je le sens. Je ne suis plus aussi alerte et mon esprit s’obscurcit parfois, au point de me faire croire que je vais tomber, ou de me faire craindre de ne plus pouvoir m’exprimer. 2 ans de solitude sous les bombes. C’est beaucoup, c’est trop.
Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils
Cardinal Luçon
Dimanche 30 – Messe militaire à Saint Remi par Mgr Neveux. Visite de Mesdames Devpatys, Bourin et Barthélémy.
Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173
Dimanche 30 juillet
Sur le front de la Somme, à l’ouest de Vermandovillers, deux détachements ennemis qui tentaient d’aborder nos lignes, ont été repoussés à coups de fusil.
Sur la rive gauche de la Meuse, une tentative allemande sur nos positions de la cote 304 a échoué sous nos feux.
Sur la rive droite, deux attaques allemandes, lancées au cours de la nuit sur une redoute dans le ravin au sud de Fleury, ont été brisées par nos tirs de barrage, et nos feux d’infanterie qui ont infligé des pertes sérieuses à l’ennemi.
Nos troupes ont enlevé quelques éléments de tranchées au nord de la chapelle Sainte-Fine et dans la région de l’ouvrage de Thiaumont, où nous avons pris une mitrailleuse.
Les Allemands, sur le front britannique, ont fait des efforts désespérés pour reprendre le bois Delville : ils ont été repoussés avec de grandes pertes.
Lutte ininterrompue au nord et au nord-est de Pozières. Les Anglais ont progressé en plusieurs endroits sous le feu de l’ennemi. Deux ou trois régiments allemands semblent avoir été anéantis au cours des derniers combats.
Les Russes ont enfoncé les Austro-Allemands à l’ouest de Loutsk, vers la voie ferrée Kovel-Vladimir-Volynski. Ils ont pris Brody, en Galicie, capturant en tout 20000 hommes, 4OO officiers, 55 canons. D’autre part, le général Letchisky a été victorieux près de Stanislau, en Galicie.
Source : La Grande Guerre au jour le jour