Louis Guédet

Vendredi 20 août 1915

342ème et 340ème jours de bataille et de bombardement

5h soir  Même leitmotiv. Nuit calme. Présidé commission d’allocations militaires ce matin. Bombardement de 2h à 3h rues Buirette, de Thillois, place d’Erlon, descendu à la cave à cause d’un inspecteur d’enregistrement de Sézanne, M. (en blanc) qui entendait cela pour la première fois. Il y était encore quand je suis sorti pour faire mes courses !! Il n’en a pas l’habitude ! Je suis toujours fort las et découragé. L’abbé Andrieux me disait hier qu’il avait demandé à prendre ses 4 jours de permissions parce qu’il craignait une attaque générale due à l’initiative des allemands vers le 8 septembre, et qu’il désirait être là près de ses fusiliers marins lorsque la danse commencerait. Dieu l’entende et qu’enfin nous soyons enfin délivrés. Je ne tiens plus. Je n’ai même plus de volonté. Je me tiens à mon devoir que machinalement. Je suis usé. J’ai tellement souffert ! Que d’épreuves ! Je n’en puis plus !!

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Paul Hess

À 14 h 15, ainsi qu’hier, les sifflements suivis d’explosions à peu de distance de la mairie, recommencent à se faire entendre.

Paul Hess dans Reims pendant la guerre de 1914-1918, éd. Anthropos

Cardinal Luçon

Vendredi 20 – Nuit tranquille. Matin item. A 2 h. Visite aux blessés am­bulance n°17 ; blessés civils des derniers jours. Bombes nous obligent à retarder notre retour.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Juliette Breyer

Vendredi 20 Août 1915. Il y a des lettres que j’avais envoyées à des prisonniers qui me sont revenues avec la mention ‘inconnu’. Tiens, je n’avais pas pensé à te dire que l’oncle Edouard avait eu un accident. Il a été piétiné par ses chevaux à la gare Saint Charles où on expédie les marchandises. Transporté à l’hôpital, il y est mort aujourd’hui. Il n’a été que 10 jours malade.

En même temps que lui on enterre une jeune dame Courte du faubourg Céres qui a été tuée par le bombardement. Elle laisse trois petits enfants et son mari est au feu. C’est que c’est une drôle de vie à Reims. Tous les jours en ce moment on compte une dizaine de victimes. Les nôtres tirent aussi beaucoup. Les 75 qui se trouvent caserne Jeanne d’Arc ont fait feu à volonté pendant une heure. A ce qu’il paraît, ils auraient détruit un ouvrage boche au Linguet. Mais ça n’avance pas vite.

J’ai vu Reppel et le cousin Émile Rollin aujourd’hui. Ils sont en permission et ils ont poussé jusqu’à Reims. Ils sont saisis de voir la ville comme cela et encore plus d’entendre le bombardement. Ils ne sont pas au feu ; ils sont à Troyes.

Enfin encore une journée. Je te quitte mon chipot. A toi toujours.

Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) - Lettres prêtées par sa petite fille Sylviane JONVAL

De sa plus belle écriture, Sylviane Jonval, de Warmeriville a recopié sur un grand cahier les lettres écrites durant la guerre 14-18 par sa grand-mère Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) à son mari parti au front en août 1914 et tué le 23 septembre de la même année à Autrèches (Oise). Une mort qu’elle a mis plusieurs mois à accepter. Elle lui écrira en effet des lettres jusqu’au 6 mai 1917 (avec une interruption d’un an). Poignant.(Alain Moyat)

Il est possible de commander le livre en ligne


Vendredi 20 août

Grande activité sur le front en Artois. Nous avons pris le carrefour de la route Béthune-Arras et du chemin d’Ablain-Angres, où la position allemande faisait saillant dans notre avant-ligne. Nous avons capturé cinq mitrailleuses et un certain nombre de prisonniers.
Au nord de Carleul, l’ennemi qui avait bombardé nos positions à courte distance a ensuite tenté des attaques que nous avons repoussées. Fusillade dans la région Berles-Adinfer.
Canonnade entre Oise et Aisne, dans le secteur de Vailly, ainsi qu’à Quennevières et à Nouvron.
En Argonne, notre artillerie manifeste sa supériorité à la Fontaine-aux-Charmes et à Marie-Thérèse.
Lutte dans les Vosges, sur le sommet du Linge. Nous prenons une tranchée au Schratzmaennele.
Les Allemands sont entrés dans Kovno, où ils prétendent avoir saisi un matériel important.
Les Italiens ont démoli un fort au Tonale et en ont occupé l’emplacement. Sur toute la ligne de l’Isonzo, ils demeurent inébranlables dans leurs positions, malgré les offensives réitérées des Autrichiens.
M. Pachitch a convoqué la Chambre serbe en séance secrète pour lui communiquer les proposition de la Quadruple Entente.
Les journaux italiens réclament de nouveau la rupture avec la T
urquie.

Source : La Grande Guerre au jour le jour


 

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