Louis Guédet

Samedi 15 septembre 1917

1100ème et 1098ème jours de bataille et de bombardement

8h matin  Pluie toute la nuit. Calme. Ce matin temps sombre roulant de lourds nuages. C’est l’hiver qui arrive à grands pas. La chute des feuilles et la vie mortelle, mourante. Encore passer un hiver !! Ne sera-ce pas au-dessus de mes forces, autant vivre dans une tombe ! Se produira-t-il sous peu un coup de théâtre, un miracle ? Les allemands sont-ils à bout de forces ? Mais leur succès de Riga doit au contraire leur avoir fait reprendre courage ! Tout cela est bien angoissant, bien sombre.

7h soir  Le temps parait se remettre au beau, alors gare les bombardements. Pas de lettres de Madeleine, ni d’autres (1 ou 2) cela m’inquiète d’autant que je vois dans les journaux qu’hier et avant-hier on s’est fort battu devant Ornes et Caurières. Pauvres Jean et Robert, que deviennent-ils ? C’est une angoisse qui me rend fou ! Pourvu qu’il ne leur soit rien arrivé. J’en tomberais malade ! Vu Raïssac avec qui j’ai longuement causé. Parlé entre autres de la Commission d’évaluation des dommages de Guerre, du dérangement et des frais que cela pourrait m’occasionner si on se réunissait à Épernay. Moi seul devrai me déranger car les autres sont là-bas. Aussi Raïssac est d’avis qu’on me devra une indemnité de dépense et de séjour car on sera obligé de faire des séances de 2 ou 3 jours d’affilée. Alors je serais obligé de coucher, manger à Épernay. Il l’a parfaitement compris et doit en parler à de Bruignac et au Maire. Vu celui-ci en sortant, très aimable. Deux mots seulement…

Rencontré en rentrant Mme Léon de Tassigny qui m’a appris qu’elle venait souvent ici. (Rayé). Ils sont (rayé). Rentré chez moi. Je souffre terriblement d’inquiétude de mes 2 pauvres petits. Ajoutez à cela les bruits d’attaques devant Reims, comme si c’était possible, vers Berru ou Cornillet oui, mais devant Cernay !!?? Cela n’empêche que les langues tournent, tournent, et que malgré soi on se laisse impressionner, et moi surtout en ce moment dans l’état où je suis !… J’ai hâte qu’Adèle rentre de ses vendanges pour partir à St Martin. J’ai besoin de repos.

Absence des 2 feuillets suivants.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Cardinal Luçon

Samedi 15 – + 15°. Nuit tranquille. Visite du Colonel du 152e Barrard et d’un Commandant. Visite de quatre sous-Lieutenants.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

Samedi 15 septembre

Sur le front au nord de l’Aisne, les Allemands ont exécuté au petit jour, contre nos positions du plateau des Casemates, un coup de main qu’ils avaient fait précéder d’un violent bombardement. Après un combat corps à corps, l’ennemi, qui avait essuyé des pertes sérieuses, a été rejeté dans ses lignes.
En Champagne, au cours d’une opération de détail, nous avons pénétré dans les tranchées allemandes, à l’ouest de la ferme de Navarin et fait des prisonniers.
Sur les deux rives de la Meuse, canonnade. Sur la rive droite, les Allemands ont attaqué les positions que nous avons récemment conquises au nord du bois des Caurières. Sur un front de 500 mètres, ils ont réussi à pénétrer dans notre ligne avancée, où le combat continue.
En Macédoine, deux reconnaissances ennemies ont été repoussées, laissant des prisonniers entre nos mains.
Action d’artillerie autour de Monastir. Le total de nos prisonniers à Pogradec est de 370. Nous avons capturé 5 canons, 8 mitrailleuses et plus de 1000 fusils.
Les Russes ont repris leur activité en Moldavie, où ils ont fait 400 prisonniers, et en Livonie, où ils se sont emparés de deux villages.
Le gouvernement américain, par une publication de documents, a prouvé que la diplomatie suédoise servait au Mexique les intérêts allemands.

Source : La Grande Guerre au jour le jour