Louis Guédet

Samedi 9 juin 1917

1001ème et 999ème jours de bataille et de bombardement

6h soir  Le calme. Pluie torrentielle la nuit, journée lourde et orageuse. Reçu diverses lettres, dont une de Payen au sujet des réquisitions militaires, et qui proteste (ce que je n’ai jamais pensé) que je veuille bien reconnaitre qu’il ne s’est jamais « dérobé » à nos audiences ici à Reims. Lui, oui, est toujours venu sans difficulté, mais les autres pantouflards ce n’est pas la même chose, c’est ce que je lui réponds en même temps que je le tranquillise sur mes sentiments à son endroit. Dans sa lettre Payen me dit qu’il était fortement question en haut-lieu de transférer mes justices de Paix et le greffe civil à Épernay. Mais au greffe civil où je passe, j’apprends par Villain que l’affaire est enterrée encore une fois, ainsi que le lui dit le Président Hù qui est d’avis que la question ne se pose même pas. J’ai conté toute cette histoire au Maire et à Raïssac qui en ont bien ri.

A la Poste vu Lelarge et Houlon, causé. Lelarge est convaincu qu’on attaquera sous peu vers Moronvilliers. J’apprends par Houlon que l’abbé Remi a donné sa démission d’aumônier des Sœurs de Roederer et qu’il est remplacé par l’abbé Maitrehut, vicaire à St Remy. C’est un bon choix. Repassé à la Chambre des notaires, rien de saillant, les ruines sont calmes ! Rentré ici travailler, non sans être arrêté en route comme de coutume par des gens qui me réclament un tas de renseignements. Il faudrait que je sois une Encyclopédie vivante pour pouvoir répondre à toutes leurs questions… !

Voilà ma journée.

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Cardinal Luçon

Samedi 9 – + 17°. A minuit, orage ; pluie abondante. Nuit tranquille. De 4 h. à 5 h. bombes sifflantes. A 1 h. 30, visite de M. le Maire. Expédié lettre à l’imprimerie des Orphelins d’Auteuil.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. Travaux de l’Académie Nationale de Reims

Samedi 9 juin

Activité très vive d’artillerie sur le chemin des Dames, notamment dans le secteur de Cerny et au sud de Filain. L’ennemi n’a pas renouvelé ses tentatives d’attaque sur cette partie du front.

Les Anglais ont fait 5000 prisonniers sur la ligne Wytschaete-Messines qu’ils ont enlevée. Leur communiqué atteste que la position était particulièrement importante, et que les troupes allemandes n’ont pas été surprises. Elles avaient formidablement aménagé le terrain et des pièces de tout calibre avaient été disposées pour battre le front et les flancs de l’attaque. L’assaut fut donné en stricte conformité avec l’horaire établi. A 3 h. 10 du matin, 19 puissantes mines explosaient à la fois, puis, en quelques minutes, le système de première ligne était occupé. Les troupes se portaient ensuite vers les pentes ouest de la crête de Messines-Wytschaete. Peu après, la totalité du village de Messines tombait entre leurs mains et avant midi, elles achevaient la conquête de Wytschaete. La seconde position était enfin enlevée. Oottaverne était pris à 3 h 45 de l’après-midi. Les pertes ennemies sont énormes; les pertes britanniques, légères.

Le général Gourko, qui avait été désigné pour succéder à Broussilof, dans le secteur sud du front russe, a donné sa démission.

Le généra1 américain Pershing est arrivé à Londres.

Source : La Grande Guerre au jour le jour

Cerny-les-Bucy