Louis Guédet

Lundi 23 août 1915

345ème et 343ème jours de bataille et de bombardement

6h soir  Calme complet, pas de bombardement jusqu’à présent. Je prépare mon déménagement qui ira bien j’espère. J’ai trouvé un caveau chez Maurice Mareschal qui sera parfait et de toute sécurité. Je propose mon départ pour mercredi. J’ai hâte de partir et de plus revoir mes ruines et mes épaves. On parle d’une victoire de la flotte russe sur la flotte allemande. Mais ceci ne nous avance guère, nous ici.

Vu Marcel Farré pour le conseil de famille de ses petits enfants. Ce sera pour mon retour. Je suis fatigué, las et découragé en voyant le désastre de nos pauvres meubles ! Quelle tristesse !! Je n’aurai de rien été épargné !!

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Paul Hess

23-24 août 1915 – Journées calmes.

— Le service municipal de ravitaillement de la population ci­vile, délivre aux commerçants des denrées diverses, que la ville fournit actuellement aux prix suivants :

Farine : 46 F le quintal

Les prix antérieurs avaient été successivement :

  • 41 F le quintal, jusqu’au 19 septembre 1914
  • 42 F le quintal, à compter du 20 septembre 1914
  • 40 F le quintal, à compter du 15 octobre
  • 41 F le quintal, à compter du 30 octobre
  • 40 F le quintal à compter du 2 décembre
  • 42 F le quintal à compter du 23 mars 1915
  • 44 F le quintal à compter du 22 mai
  • 46 F le quintal à compter du 24 juin 1915

Le quintal de farine de seigle vaut 40 F et le quintal de gruau ndu 5 F de plus que celui de farine.

Le bois, est compté aux boulangers 16 F le stère ; le bois de chauffage, quand il y en avait, était taxé 20 F (on n’en livre plus).

Le prix fait aux maisons d’alimentation pour le sucre, a été d’abord de 90 F le quintal. Ce prix, après être monté à 92 F – 95 F puis 97 F, a atteint 100 F en avril 1915. Au 3 juin, il était de 102 F ; juin 105 F ; le 5 juillet il devenait 115 F ; le 21 juillet, il était à 147 F ; au 23 août, il est 120 F.

Pour le pétrole et l’essence, les prix de 30 et 50 F l’hectolitre, but, sont devenus 33 et 52 F, après avoir été 40 et 60 F.

L’alcool dénaturé, dont le prix était de 75 F l’hectolitre, est 105 F depuis juin ; on en a manqué et il s’est vendu jusqu’à 1.50 F le litre, au détail.

L’huile, de 115 F les 100 k. est passée, en juin, à 121 F.

Le sel est vendu aux boulangers 25 F le quintal ; il a été vendu des oignons 19 F le quintal ; des pommes de terre, de 10 à 18 F le quintal.

Le prix du charbon est fixé, depuis le 3 courant, à 75 F les 1000 k.

La mairie fait délivrer encore à son dépôt de la chaussée Bocquaine ; du plâtre, au prix de 2,50 F les 100 k. le fin et de 2,30 F le ainsi que des bâches vertes à 3 F. le m2 et des bâches goudronnées à 4 F le m2 (auparavant, les bâches étaient remises en location aux entrepreneurs ou particuliers, moyennant le prix de 0.20 : m2 par mois, avec décompte fait par quinzaine. Pour les immeubles découverts sur de grandes surfaces par les bombardements, cette location devenait, avec le temps, assez onéreuse).

Paul Hess dans Reims pendant la guerre de 1914-1918, éd. Anthropos

Cardinal Luçon

Lundi 23 – Nuit tranquille. Matinée : aéroplanes français, tir allemand. Item après-midi. Visite de M. Fendler, curé de Sillery.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. par L’Académie Nationale de Reims – 1998 – TAR volume 173

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Juliette Breyer

Lundi 23 Août 1915. Aujourd’hui nous avons reçu une lettre de Mme Copin. Elle avait eu notre adresse sur Le Parisien. Elle est au Mans ; elle s’est sauvée de Rethel le 29 août. Elle nous plaint. J’ai reçu aussi une lettre d’un monsieur de Paris qui a un fils qui s’appelle Charles Breyer et qui est sur le front. Tu vois comme c’est bizarre. Il demande s’il est de notre famille. Maintenant j’ai l’adresse d’un prisonnier qui a été blessé et disparu en même temps que toi. Je lui ai écrit. Tout cela me rend une nouvelle ardeur pour chercher. Pauvre grand, comme je te regrette et comme je t’aimerais.

Aujourd’hui on m’a dit que le petit Husson qui travaillait avec toi avait été tué. Tous les jours, et combien encore que l’on ne sait pas.

Je t’aime mon tit Lou. 11 mois …

Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) - Lettres prêtées par sa petite fille Sylviane JONVAL

De sa plus belle écriture, Sylviane Jonval, de Warmeriville a recopié sur un grand cahier les lettres écrites durant la guerre 14-18 par sa grand-mère Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) à son mari parti au front en août 1914 et tué le 23 septembre de la même année à Autrèches (Oise). Une mort qu’elle a mis plusieurs mois à accepter. Elle lui écrira en effet des lettres jusqu’au 6 mai 1917 (avec une interruption d’un an). Poignant.(Alain Moyat)

Il est possible de commander le livre en ligne


Lundi 23 août

En Artois, au nord de Souchez, une tentative d’attaque allemande menée par un faible effectif a été rapidement enrayée. Dans la région du Labyrinthe, combat à coups de grosses bombes. Canonnade violente autour de Neuville et de Roclincourt.
Canonnade aussi à Roye, à Quennevières, sur le front de L’Aisne et autour de Reims.
Lutte d’engins de tranchées aux Courtes-Chausses, dans l’Argonne.
Combat à coups de bombes, à Flirey, en Woëvre.
Une attaque ennemie a été repoussée sur la crête de Sondernach, dans les Vosges.
Un grave incident s’est produit entre l’Allemagne et le Danemark. Un contre-torpilleur allemand avant tiré des coups de canon, au mépris du droit international, contre un sous-marin anglais échoué dans les eaux danoises et l’ayant coulé, le cabinet de Copenhague a adressé une protestation à Berlin.
Les Italiens ont enregistré de précieux succès sur l’Isonzo.
Les Allemands ont perdu un croiseur et deux torpilleurs dans le golfe de Riga.
M. Venizélos garde, dans son ministère, le portefeuille des Affaires étrangères.
Une entrevue a eu lieu à Boulogne-sur-Mer, entre M. Ribot et M. Mac Kenna, chancelier de l’Échiquier brit
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Source : La guerre au jour le jour